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Air Moorea : « L’avion n’était plus navigable trois mois après son arrivée en Polynésie »

© Grégory Boissy

Pour l’expert judiciaire Hubert Arnould, il n’y a pas de doute, le crash de 2007 est dû « à de graves manquements dans la gestion de la navigabilité (…) et de l’entretien de l’avion ». Il estime même que cet avion « n’était plus navigable trois mois après son arrivée en Polynésie ».

Après le ballet des témoins lundi c’était au tour de l’expert judiciaire Hubert Arnould de s’exprimer mardi matin. Il a souligné : « Je ne défends personne, je n’ai aucun parti pris ». Il a rappelé qu’au niveau de la règlementation « c’est le propriétaire donc l’exploitant qui est responsable de s’assurer que toutes les tâches soient effectuées par un organisme agréé (…). La pièce maîtresse c’est le programme d’entretien, qui collecte l’ensemble des informations qui évoluent tous les jours de la part du constructeur, tout cela est analysé pour faire un programme d’entretien adéquat (…). On ne fait pas de la maintenance curative mais préventive c’est le principe de base ».

L’expert judiciaire ne comprend d’ailleurs pas pourquoi la compagnie Air Moorea n’a pas fait appel à Air Tahiti pour l’aider car selon lui « il est tout à fait possible de sous-traiter des tâches du maintien de navigabilité (…) Air Moorea n’est pas obligé de choisir un atelier maison ».

 « Le pilote a toujours été conscient et a réagi face à cette problématique » 

Hubert Arnould déclare : « le pilote a bien réagi face à la situation observée à travers le manche c’est une réponse réflexe qu’a eu le pilote et face à cela il est conscient de la situation, et en plus c’est un vol de routine ». Selon Hubert Arnould, le pilote aurait pu récupérer l’avion « mais avec des commandes fonctionnelles ». Il précise aussi «même si je ne suis pas médecin (…)»  que si le pilote avait perdu connaissance il n’aurait pas touché aux volets et n’aurait pas non plus remis les gaz. Et l’expert judiciaire de conclure « le pilote a toujours été conscient et a réagi face à cette problématique ».

« Il y a eu de graves manquements dans l’entretien de l’avion » 

Pour ce qui est de l’entretien des câbles, l’expert judiciaire précise qu’on trouve tout dans un document traduit de l’anglais.  Il estime que la « tension du câble doit être fréquemment réglée du fait de la variation de la température mais cela n’a pas été fait à l’arrivée de l’avion en Polynésie (…). À chaque période d’inspection normale, on doit vérifier que les fils des câbles n’ont pas été rompus, et le câble de commande doit être remplacé si les fils sont usés, et s’il y a trois fils cassés, le câble doit être changé ». Il considère qu’avec ce type d’avion il faut régler et vérifier les câbles régulièrement.

Hubert Arnould précise qu’on ne sait pas quelle est la tension réelle du câble lors de l’accident. Mais pour lui ce dernier était surtendu  : « c’est l’aspect du cadran qui nous le démontre car il est très marqué par l’empreinte du câble ». Il affirme aussi que l’approche de Moorea comporte souvent de fortes turbulences et qu’on peut parler d’endommagement du câble car ce Twin-Otter a réalisé plus de 5 000 vols et que le câble subit plusieurs variations par vol. L’expert judiciaire affirme que le « câble aurait dû être vérifié tous les 3 mois mais cela n’a jamais été appliqué. Si cette inspection avait été faite cela ne se serait jamais passé ». Selon lui il y avait « une usure anormale du câble qui dépasse la tolérance (…). L’accident est dû à de graves manquements dans la gestion de la navigabilité. L’avion n’était plus navigable trois mois après son arrivée en Polynésie, il y a eu de graves manquements dans l’entretien de l’avion ».

La défense n’était pas d’accord avec cette analyse. « On partage tous une certitude (…). Le relevage a provoqué la rupture du câble ». Pour Me Quinquis « le câble n’a pas pu se rompre en vol tant pour des raisons de constatations physiques faites par le Centre d’essais des propulseurs (CEPR) que pour des raisons de résistance physique du câble et enfin en raison des données aéronautiques, notre besace est relativement pleine pour démontrer que ce câble n’a pas pu rompre en vol ». Quant à la différence de point de vue entre l’expert judiciaire et les témoins de la défense, Me Quinquis assure tout simplement que « je crois avoir compris au travers des CV de nos experts que ceux-ci sont largement plus diplômés, je n’ai pas dit compétents, que l’expert judiciaire et je n’en dirais pas davantage pour ne pas être déplaisant ».

Pour la partie civile Me Rosenthal affirme que la cause du crash est la rupture du câble en plein vol. « On a énormément d’éléments dans ce dossier qui permettront de retenir une causalité directe. (…) il faut être sérieux, c’est un avion qui n’était pas navigable et qui était condamné à tomber à l’eau un jour ».

Mercredi d’autres témoins seront appelés à la barre. Les familles des victimes pourront elles aussi s’exprimer.

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2 Commentaires

  1. 20 novembre 2019 à 5h15 — Répondre

    Le corrosion due à l’air marin est un facteur d’usure prématurée de câbles de commande en acier et il semble que l’entretien dans ces conditions particulières doit être beaucoup plus fréquent et rigoureux, mais bon je ne suis pas un spécialiste je reste logique c’est tout.

  2. Sloan OFoirtcheirn
    20 novembre 2019 à 6h54 — Répondre

    L’expert ne se base sur aucune preuve scientifique, tout juste quelques essais effectués dans son garage avec des bidons d’eau et une pince coupante…. il n’était pas encore descendu de l’avion qui l’amenait de métropole pour l’expertise qu’il était déjà convaincu que c’était Le câble qui était en cause, dès lors, difficile de mener objectivement une expertise…. Je connais le personnage et comme l’avocat de La defense je n’en dirais pas plus ! .

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