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Allemagne : l'AfD, parti populiste qui surfe sur le mécontentement anti-migrants

Berlin (AFP) – Le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD), qui a fait dimanche à Berlin son entrée dans un nouveau parlement régional, est en passe de briser un tabou dans le pays : ancrer pour la première fois depuis 1945 un parti de droite populiste dans l’opinion.

Né il y a seulement trois ans sur un programme anti-euro, il s’est depuis transformé en parti anti-immigration et anti-islam à la faveur de l’afflux d’un nombre record de réfugiés, captant les craintes de la population, les déçus du parti conservateur d’Angela Merkel (CDU) et mobilisant de manière générale ceux qui s’estiment laissés-pour-compte, notamment parmi les abstentionnistes.

L’AfD enchaîne désormais les succès électoraux. Avec un score de 12% environ, selon les sondages sortie des urnes, dimanche lors des élections locales à Berlin, il va faire son entrée au parlement régional de la capitale allemande et siègera désormais dans dix des 16 parlements régionaux que compte le pays.

Si ses plus gros scores, supérieurs à 20%, ont été enregistres dans l’ex-RDA communiste, l’AfD peut désormais se targuer de bons résultats aussi dans des régions plus prospères, comme ses 15% en mars dans le riche Bade-Wurtemberg, ou dans des villes réputées de gauche comme Berlin.

Le parti a été fondé il y a trois ans par Bernd Lucke, un professeur d’économie de l’Université de Hambourg (nord), attirant notamment des transfuges de la CDU, déçus du recentrage opéré par la chancelière.

Il surfait alors sur le sentiment assez répandu dans l’opinion que les contribuables allemands n’en finissaient plus de payer pour autres membres de la zone euro, moins vertueux.

Si l’AfD échoue en 2013 à entrer au Parlement fédéral, le Bundestag, il parvient à envoyer sept élus au Parlement européen en mai 2014 et entre dans cinq assemblées régionales.

Mais il est tiraillé par la lutte interne opposant Bernd Lucke et Frauke Petry, incarnation d’une ligne plus nationale-conservatrice. Le congrès d’Essen, début juillet 2015, donne la victoire à Mme Petry, et le parti entame son virage vers une droite populiste qui va encore s’accentuer avec la décision de Mme Merkel en septembre 2015 d’ouvrir grand les portes du pays aux réfugiés.

Avec l’arrivée d’un million de demandeurs d’asile, Mme Petry, quadragénaire au verbe sec et aux formules choc, capitalise sur une ligne anti-islam et anti-migrants. Elle a par exemple créé la polémique en suggérant que la police fasse « au besoin » usage d’armes à feu pour empêcher les migrants d’entrer.

Le parti rejette le qualificatif d’extrême droite et la plupart des médias allemands ne l’ont pas jusqu’ici rangé dans cette catégorie, infamante dans un pays toujours hanté par son passé nazi. Divers courants continuent de s’affronter à l’intérieur du mouvement, entre personnalités flirtant avec les milieux d’extrême droite et tenants d’un profil plus modéré pour ne pays effrayer les électeurs. 

A gauche, néanmoins, le pas a souvent été franchi. Le vice-chancelier, le social-démocrate Sigmar Gabriel, les compare aux nazis : « Tout ce qu’ils disent, je l’ai déjà entendu notamment de mon propre père, qui a été un nazi jusqu’à son dernier souffle ».

L’AfD a désormais les yeux tournés vers les élections législatives dans un an, où le parti pourrait faire son entrée à la chambre des députés, une première dans l’histoire de l’après-guerre pour une formation de ce type. 

Selon un sondage publié cette semaine, le mouvement est crédité de 14% des intentions de vote en Allemagne, en nette progression, et peut espérer en l’état devenir la troisième force politique du pays, derrière la CDU, qui s’effrite, et le parti social-démocrate.

Des partisans de l'AfD célèbrent leurs résultats électoraux à Berlin le 18 septembre 2016. © AFP

© dpa/AFP Wolfgang Kumm
Des partisans de l’AfD célèbrent leurs résultats électoraux à Berlin le 18 septembre 2016

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