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Attentat déjoué en Allemagne: scandale après le suicide en prison du suspect syrien

Dresde (Allemagne) (AFP) – Le Syrien soupçonné de planifier un attentat à Berlin, qui s’est donné la mort mercredi, ne présentait pas de risque de suicide « imminent », se sont défendues jeudi les autorités allemandes, devant la polémique suscitée par cette mort qui paralyse l’enquête.

Bien qu’un juge ait considéré que Jaber al-Bakr présentait un risque suicidaire, les autorités pénitentiaires de Leipzig (est) où l’homme de 22 ans était détenu n’ont, elles, pas détecté de « danger de suicide imminent », a expliqué leur patron, Rolf Jakob, lors d’une conférence de presse. 

Le suspect, qui parlait mal l’allemand, avait été jugé « calme » par une psychologue « chevronnée » mais « sans expérience avec les terroristes », qui s’était entretenue avec lui via un traducteur, a expliqué M. Jakob. 

C’est pourquoi le degré de surveillance du suspect est passé d’un contrôle toutes les 15 minutes lors de son premier jour de détention lundi, à un toutes les 30 minutes au deuxième jour.

« Ca n’aurait pas dû arriver, mais malheureusement cela a eu lieu (…) malheureusement le pronostic des experts (en psychologie) n’a pas été confirmé » par les faits, a relevé le ministre saxon de la Justice, Sebastian Gemkow. 

Al-Bakr a été retrouvé pendu à la fenêtre de sa cellule avec son tee-shirt, mercredi à 19H45 (17H45 GMT). Une autopsie est en cours. 

La question de la surveillance en prison des jihadistes, en particulier ceux ayant planifié des attentats suicides, a par le passé soulevé de nombreuses questions dans d’autres pays. 

En France, Salah Abdeslam, membre présumé du commando des attentats de Paris de novembre 2015, est ainsi détenu à l’isolement depuis avril et placé sous vidéosurveillance 24h/24. Ce dispositif très contraignant a été validé par la justice en raison du « caractère exceptionnel des faits terroristes » qui lui sont reprochés.

Le vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel a déploré « terrible incident » et a appelé à une enquête, de concert avec le ministre de l’Intérieur Thomas de Maizière.

« Je suis incroyablement choqué et absolument stupéfait », avait déclaré mercredi l’avocat commis d’office de Jaber al-Bakr, Alexander Hübner, qualifiant l’affaire de « scandale judiciaire ». Son client était en grève de la faim depuis son incarcération et aurait tenté de s’électrocuter.

Son suicide va aussi priver les autorités d’informations précieuses. « Cela aurait été bien qu’il déballe son sac », a regretté le procureur Klaus Fleischmann. « Nous ne savons pas s’il y avait quelqu’un derrière lui ».

« Les investigations sont bien sûr rendues plus difficiles (par le suicide), et c’est un coup dur pour l’élucidation qu’il s’agisse des complices, des organisateurs, d’un réseau » potentiels, a admis M. de Maizière.   

Les autorités surveillent désormais 24h sur 24h l’un des complices suspectés de Jaber al-Bakr, à savoir l’homme au nom duquel était loué l’appartement de Chemnitz où il logeait.

Selon les autorités, al-Bakr préparait un attentat contre un des aéroports de Berlin: 1,5 kilo de TATP, un explosif prisé de l’EI, avait été retrouvé dans ce logement. Selon les services de renseignement, il aurait pu passer à l’acte « dès cette semaine ».

Les interrogatoires avant sa mort n’ont pas fait la lumière sur la totalité de son projet, selon Bild qui indique que le réfugié syrien a accusé les trois compatriotes qui l’ont neutralisé d’être des complices.

Mais les autorités sont restées prudentes, n’excluant pas une vengeance envers ces trois hommes qui ont hébergé al-Bakr avant de se rendre compte de qui il était et de le livrer pieds et poings liés à la police. 

Son parcours reste entaché de zones d’ombre. Il aurait passé cette année « plusieurs mois » en Turquie, selon des médias allemands et serait revenu « fin août » avec une « grande quantité de dollars ». Les enquêteurs ne savent cependant pas ce qu’il y a fait où s’il s’est rendu en Syrie voisine.

Le danger que représenteraient des « terroristes » infiltrés dans le flot des 890.000 demandeurs d’asile arrivés en Allemagne en 2015 fait débat depuis des mois, et a nourri la popularité croissante des populistes de droite et miné celle d’Angela Merkel.

Ce discours a d’autant plus d’écho que l’Allemagne a été frappée fin juillet pour la première fois par l’EI. A quelques jours d’intervalle, un attentat commis par un Syrien de 27 ans, débouté de sa demande d’asile, a fait 15 blessés, puis une attaque à la hache perpétrée par un réfugié de 17 ans a fait cinq blessés.

Dans ce contexte, le gouvernement a annoncé que les services secrets auraient bientôt accès aux dossiers des demandeurs d’asile.

Photo non datée fournie le 8 octobre 2016 par la police allemande du Syrien Jaber Al-bakr, soupçonné de préparer un attentat islamiste à Berlin. © AFP

© Landeskriminalamt Sachsen/AFP/Archives HO
Photo non datée fournie le 8 octobre 2016 par la police allemande du Syrien Jaber Al-bakr, soupçonné de préparer un attentat islamiste à Berlin

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