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Bartolone plaide pour l'"électrochoc" d'une primaire Hollande-Valls

Bondy (AFP) – Claude Bartolone a plaidé samedi pour la participation de François Hollande et de Manuel Valls à la primaire initiée par le PS, apportant de l’eau au moulin du Premier ministre dans la guerre sourde qui l’oppose au président de la République en vue de 2017.

« Je souhaite qu'(Emmanuel) Macron participe à la primaire, je souhaite que (Manuel) Valls participe à la primaire, je souhaite que (François) Hollande participe à la primaire, je souhaite que (Jean-Luc) Mélenchon vienne exprimer au sein de la primaire sa différence », a déclaré à la presse le président de l’Assemblée nationale, en arrivant au « Carrefour des gauches et de l’écologie » organisé par Martine Aubry, samedi, à Bondy (Seine-Saint-Denis).

« Je préférerais qu’ils participent tous les deux à la primaire plutôt que l’un puisse se dire: +Voilà, je suis éliminé sur le tapis vert, donc je m’éloigne de la campagne, je m’éloigne des socialistes, je m’éloigne de l’action gouvernementale.+ S’ils se sentent et l’un et l’autre porteurs d’un projet pour la France, s’ils sentent qu’ils ont des choses à dire aux Français, autant qu’ils aillent à la primaire et que l’on puisse les voir se rassembler au second tour de cette primaire », a poursuivi M. Bartolone.

En petit comité, jeudi, M. Valls avait indiqué qu’il se « poserai(t) la question de ce qu'(il) devrai(t) faire » si M. Hollande était candidat, laissant planer la menace d’une démission.

Devant les quelque 600 participants à la réunion destinée à ressusciter la gauche « rouge-rose-verte », M. Bartolone n’a pas prononcé le nom des deux têtes de l’exécutif. Mais il a semblé appuyer les ambitions de M. Valls en affirmant: « Je ne dirai jamais +tout sauf quelqu’un+. »

Proche du président de la République, le député Kader Arif, présent à Bondy, a vivement réagi à la proposition de M Bartolone: « Ça me paraît irresponsable, pas crédible (…) Imaginons une primaire entre le président et le Premier ministre, c’est en fait un pays qui est en crise institutionnelle », a-t-il dit à l’AFP.

Emmanuel Grégoire, patron de la fédération PS de Paris, a indiqué ne pas « partage(r) » cette idée, y voyant de la part de M. Bartolone, « un coup de pied de plus au président de la République ».

– La primaire en sursis? –

Mais pour Jean-Marc Germain, un des deux lieutenants de Mme Aubry, la sortie de M. Bartolone ne pose pas de problème particulier. « Je suis pour que tous ceux qui ont des idées à dire le fassent. À gauche les idées d’abord », a-t-il réagi auprès de l’AFP.

« Original mais c’est bien là la preuve que la seule évidence, c’est qu’il n’y a plus d’évidence institutionnelle », a tweeté un proche de M. Valls, le maire d’Évry Francis Chouat. Le Premier ministre lui-même n’a pas souhaité commenter.

Dans la confusion ambiante, les proches du président de la République n’étaient pas en reste samedi.

« J’avais fini par m’habituer à l’idée que le président, s’il se présente, passe par la case primaire », a déclaré dans Le Parisien Bernard Poignant, conseiller du chef de l’État. « Mais ce que vient de faire Arnaud Montebourg (appeler les électeurs de droite à voter, NDLR) est insupportable. Du coup, je ne souhaite plus que François Hollande soit confronté à quelqu’un qui demande à la droite de venir voter à notre primaire pour le battre. »

« Le président a voulu (la primaire), elle est annoncée, elle va être organisée », a répondu sèchement M. Bartolone. « Les primaires, c’est une chose qui a été inscrite, je crois qu’il faut rester dans le jeu des primaires », a de son côté jugé M. Arif.

Mme Aubry s’est bien gardée de réagir directement aux propos de M. Bartolone. Mais en arrivant à Bondy en début de matinée, elle avait semblé vouloir garder toutes les portes ouvertes.

« Chacun me connaît, j’ai toujours pris des positions en fonction de mes convictions. Aujourd’hui, je ne sais rien, j’attends les programmes, les projets. Pour certains, je sais que je ne pourrai jamais être avec eux. M. Macron par exemple, lui, c’est le seul que je citerai aujourd’hui car il n’est pas à gauche. »

La gauche a affiché samedi le visage de la désunion pour la présidentielle, Claude Bartolone appelant François Hollande et Manuel Valls à s’affronter à la primaire du PS, le PRG s’en détachant avec sa propre candidate, le PCF se ralliant pour sa part à Jean-Luc Mélenchon.

– BARTOLONE, UN PAVE DANS LA MARE

Visiblement toujours aussi en colère contre le chef de l’État -auquel il reproche des propos peu amènes à son égard dans le récent livre « Un président ne devrait pas dire ça »- le président PS de l’Assemblée a troublé un rare moment d’union à gauche.

Lors du « Carrefour des gauches et de l’écologie » à Bondy (Seine-Saint-Denis), une initiative signée Martine Aubry pour tenter de ressusciter la gauche « rouge-rose-verte », il a plaidé pour la participation à la fois de François Hollande et Manuel Valls à la primaire organisée en janvier par le PS. Ce serait un « électrochoc » salutaire, a-t-il ajouté en prenant soin d’évoquer aussi la participation d’Emmanuel Macron et de Jean-Luc Mélenchon…

Un président et son Premier ministre dans une même compétition? Une hérésie institutionnelle aux yeux de beaucoup, à commencer par les hollandais. « Irresponsable, pas crédible », a dénoncé sur place Kader Arif. L’initiative a en revanche ravi les vallsistes, Francis Chouat y voyant « la preuve que la seule évidence, c’est qu’il n’y a plus d’évidence institutionnelle ».

La sortie de Bartolone n’a pas été du goût de tous les participants. « Il a gâché la fête », a déploré la députée Marie-Arlette Carlotti, qui y voit « la réaction d’un homme blessé ».

– LE PCF CHOISIT MELENCHON, SANS ENTHOUSIASME

Comme en 2012, mais dans des conditions beaucoup moins avantageuses, les communistes ont décidé de se ranger derrière la candidature de Jean-Luc Mélenchon, désormais leader de la France insoumise. Après moult péripéties et sans véritable enthousiasme.

Les militants communistes se sont prononcés à 53,6% en faveur d’un soutien à Mélenchon contre 46,4% qui préféraient une candidature indépendante. Un vote à rebours de la décision des cadres du parti, le 5 novembre (55% en faveur d’un candidat communiste), qui avaient eux-mêmes désavoué le patron du PCF, Pierre Laurent, rallié à Mélenchon.

« Le cadre commun n’existe plus comme en 2012 avec le Front de Gauche et le PCF mènera une campagne autonome », a assuré à l’AFP le porte-parole du parti, Olivier Dartigolles, en saluant un vote majoritaire favorable à « ne pas ajouter un bulletin de vote dans un paysage, à gauche, déjà très marqué par la désunion et la division ».

« Les communistes ont compris que c’est la seule candidature pour éviter un second tour droite-extrême droite », s’est félicité Alexis Corbière, porte-parole de la campagne de M. Mélenchon. 

Partisan de l’indépendance, le chef de file du groupe Front de Gauche à l’Assemblée, André Chassaigne, avait mis en garde mercredi contre un ralliement à M. Mélenchon, y voyant « un coup fatal porté au PCF ».

– LE CAVALIER SEUL DU PRG

Une candidature de plus à gauche. Le Parti radical de gauche, partenaire loyal de Hollande depuis le début du quinquennat, a décidé samedi, à une large majorité (344 voix contre 46), d’investir sa présidente, l’ex-ministre Sylvia Pinel, 39 ans, candidate à la présidentielle de 2017… sans passer par la case primaire de la gauche.

En 2011, le PRG avait pourtant participé à la primaire organisée par le Parti socialiste. « Le PS fait le choix de préserver ses équilibres internes, ce choix peut conduire la gauche de gouvernement à sa perte, ce choix ne peut pas être le nôtre », a justifié Mme Pinel.

Le petit parti est traversé par des vents contraires, avec en son sein des partisans d’un soutien à Macron et d’autres à Valls.

« Ils font monter les enchères, comme ils l’avaient fait l’année dernière pour les investitures aux élections régionales », soupire une source gouvernementale.

La maire de Lille Martine Aubry et le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone à Bondy, le 26 novembre 2016
. © AFP

© AFP PATRICK KOVARIK
La maire de Lille Martine Aubry et le président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone à Bondy, le 26 novembre 2016

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