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Burkini: malgré la décision du Conseil d'Etat, des maires résistent

Marseille (AFP) – Malgré la suspension par le Conseil d’Etat de l’arrêté anti-burkini de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), plusieurs communes, Nice en tête, font de la résistance, s’exposant à de nouveaux recours devant les tribunaux s’ils continuent à appliquer leurs propres arrêtés.

Le Conseil d’Etat a mis vendredi un coup d’arrêt aux interdictions des tenues « ne respectant pas la laïcité » sur les plages publiques prises par une trentaine de communes du littoral, en appelant au « respect des libertés garanties par les lois ».

Le premier concerné, Lionnel Luca, député-maire LR de Villeneuve-Loubet, a annoncé qu’il se conformerait à la décision de la juridiction administrative suprême, n’étant « pas un rebelle ». « J’appliquerai bien sûr, la décision du Conseil d’Etat, quoi qu’on en pense », a réagi M. Luca, tout en se disant favorable à une loi sur cette question, à l’instar de nombreux élus de droite et d’extrême droite.

Toutefois, de nombreux maires – notamment ceux sur la Côte d’Azur de Nice, Menton, Fréjus, Mandelieu-la-Napoule, ou encore de Sisco en Haute-Corse, de Leucate (Aude) ou du Touquet (Pas-de-Calais) – ont fait savoir que  leurs arrêtés demeuraient en vigueur.

Une prise de position symbolique puisque ceux-ci ont une durée d’application limitée à fin août, mi-septembre, selon les cas, et que les verbalisations ont été rares.

« Tous ces arrêtés, s’ils sont maintenus, vont être attaqués », a averti samedi Me Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l’Homme qui avait saisi le Conseil d’Etat. « La LDH a d’ores et déjà prévu de demander le retrait de ces différents arrêtés », a-t-il souligné sur France Inter, rappelant qu’ils « ne sont pas conformes aux libertés fondamentales ».

-« Polémique qui n’a plus lieu d’être »-

Me Spinosi a dit encore avoir « du mal à comprendre comment des hommes politiques continuent à argumenter sur une polémique qui n’a plus lieu d’être ».

Le Premier ministre Manuel Valls estime pour sa part  que la décision du Conseil d’Etat « n’épuise pas le débat qui s’est ouvert dans notre société » sur cette question. « Rester silencieux, comme par le passé, c’est un petit renoncement. Une démission de plus », a-t-il dit sur sa page Facebook, au moment où le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve prônait « l’apaisement ».

A Nice, la mairie a toutefois fait savoir que les femmes portant un burkini « continueront d’être verbalisées », tant que l’arrêté n’est pas invalidé. Le maire FN de Fréjus David Rachline a affirmé  que l’arrêté qu’il a pris reste « toujours valable », jusqu’au 12 septembre, n’étant sous le coup d' »aucune procédure ».

Le député-maire LR du Touquet Daniel Fasquelle juge que son arrêté visant à « assurer la sécurité sur la plage » n’a été que « partiellement invalidé » par la décision du Conseil d’Etat et « continuera de s’appliquer ».

Le maire d’Eze, une petite commune des Alpes-Maritimes, Stéphane Cherki (DVD) a, lui, décidé d’annuler l’arrêté « par respect du Conseil d’Etat », précisant qu’aucune femme en burkini n’avait été verbalisée dans sa commune.

 « J’avais peut-être été un peu vite car, personnellement, j’ai fait cet arrêté pour défendre la liberté des femmes, mais on constate que beaucoup de gens demandent à pouvoir le porter, a-t-il dit à l’AFP. Je ne vais pas restreindre les libertés individuelles, sinon on va finir par prendre un arrêté anti-seins nus ou autres. Et enfin, ça ne gêne pas grand monde » a-t-il affirmé.

Sur le littoral azuréen, Antibes est la seule grande commune à ne pas avoir pris de mesure d’interdiction. Le député-maire LR, Jean Leonetti, proche d’Alain Juppé, avait affirmé que ces arrêtés étaient « faciles à prendre mais très difficiles à mettre en oeuvre ».

Dans ce débat, les deux principaux candidats à la primaire de la droite ont défendu des lignes divergentes, l’ancien président Nicolas Sarkozy appelant à une interdiction du burkini tandis que l’ex-Premier ministre Alain Juppé se dit opposé à « une loi de circonstance ».

Tout juste élu, le nouveau Grand maître du Grand Orient de France, Christophe Habas, a dit  vendredi à Marselle « craindre que ce burkini ne soit instrumentalisé par le politique et ajoute à la confusion dans l’esprit des Français sur ce qu’est ou ce que n’est pas la laïcité ».

Un arrêté municipal interdisant le port du burkini sur une plage de Nice, le 19 août 2016. © AFP

© AFP/Archives JEAN CHRISTOPHE MAGNENET
Un arrêté municipal interdisant le port du burkini sur une plage de Nice, le 19 août 2016

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