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« Chez Nous »: le film engagé de Lucas Belvaux qui énerve le FN

Paris (AFP) – Une dirigeante d’extrême-droite blonde, une petite ville du Pas-de-Calais: dans « Chez nous », en salles le 22 février, Lucas Belvaux raconte la campagne pour les municipales d’un parti clairement inspiré du Front national, un film dont les premières images ont fortement déplu au FN.

Au vu de la seule bande annonce, Florian Philippot, vice-président du FN, s’est indigné dimanche: « Je trouve ça proprement scandaleux qu’en pleine campagne présidentielle, (…) on sorte dans les salles françaises un film qui est clairement anti-Front national », a-t-il dénoncé. 

Si le public, et les membres du FN, ne peuvent pas encore voir le film, la presse a pu commencer à découvrir ce long métrage qui se déroule dans une ville imaginaire du Pas-de-Calais baptisée Hénard, évocation limpide d’Hénin-Beaumont, fief du FN. 

Dans « Chez Nous », Emilie Dequenne est Pauline Duhez, une infirmière à domicile qui vit seule avec ses deux enfants et doit s’occuper de son père, ancien métallurgiste communiste.

Connue dans la ville et appréciée par ses patients, elle est approchée par des dirigeants d’un parti d’extrême droite, le « Bloc patriotique ». Elle se voit alors proposer d’être leur candidate, tête de liste aux municipales, aux côtés de la dirigeante du parti Agnès Dorgelle (Catherine Jacob). Au départ hésitante, Pauline va se laisser séduire par ce parti populiste dont elle pense qu’il peut aider les ouvriers.

Dixième long métrage au cinéma du réalisateur belge Lucas Belvaux, installé en France depuis plusieurs décennies, ce film co-écrit avec l’écrivain Jérôme Leroy, auteur du polar politique « Le Bloc » (2011) , suit le personnage de Pauline.

Il décrit avec finesse sa fulgurante ascension et les sentiments successifs qu’elle éprouve, du doute à la fascination face au discours flatteur et séduisant du Bloc patriotique, puis à la colère. Ce film, à la croisée du cinéma social et de la politique, s’intéresse en même temps aux rouages et à la rhétorique de ce parti, qui veut montrer une image respectable mais est rattrapé par son passé et ses composantes les moins acceptables.

– « Participer au débat » –

Aux côtés d’Emilie Dequenne, Guillaume Gouix incarne Stéphane, ancien amour de jeunesse de Pauline devenu un militant violent d’extrême droite, qui n’hésite pas à passer à tabac des immigrés. André Dussolier incarne un médecin, notable de la ville, à l’allure empathique et rassurante, qui entraîne Pauline vers le Bloc patriotique. « La France a besoin de gens comme toi », lui dit-il.

La dirigeante du parti, blonde, à la forte carrure et au discours musclé, reste un personnage secondaire: elle est montrée lors d’un meeting, d’une conférence de presse ou de réunions avec son équipe.

« Marine Le Pen est l’une des sources d’inspiration, mais ce n’est pas la seule », assure à l’AFP Lucas Belvaux.

« Pauvre Marine Le Pen, qui est caricaturée par ce pot à tabac de Catherine Jacob. Un sacré navet en perspective », s’est insurgé le maire d’Hénin-Beaumont Steeve Briois, vice-président du FN, sur Twitter.

Lucas Belvaux dit avoir été « surpris » par la « brutalité » des réactions du FN. « On est désigné tout de suite comme l’ennemi, et la parole n’est plus légitime », estime le réalisateur d' »Un couple épatant », qui regrette qu’il n’y ait « pas beaucoup » de films sur le sujet.

Il entend vouloir « participer au débat » avant la présidentielle, estimant avoir fait un film « engagé » mais pas « militant ».

« Ce n’est pas un film à charge contre le FN dans le sens où je n’invente rien », dit-il. « Je ne suis encarté nulle part, et le film n’appelle à voter pour personne. Donc dans ce sens, il n’est pas militant. Il est engagé dans le sens où il dit haut et fort ce que je pense ». 

Pour lui, ce film est « une sorte d’état des lieux de ce qu’est ce parti aujourd’hui, et 90% de ce qui est dit est vrai ». « C’est scénarisé (…). Mais sur les situations, sur le fond du discours, c’est très proche de la réalité. »

Le cinéaste belge Lucas Belvaux, le 7 février 2015 à Paris. © AFP

© AFP/Archives ALAIN JOCARD
Le cinéaste belge Lucas Belvaux, le 7 février 2015 à Paris

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