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Chroniques londoniennes d’un maître-cambrioleur

Londres (AFP) – Vous avez aimé les aventures d’Arsène Lupin? Vous adorerez le « rôdeur de Wimbledon », l’histoire vraie d’un voleur virtuose et insaisissable qui, en plus de 200 cambriolages perpétrés à Londres ces dix dernières années, a fait main basse sur une douzaine de millions d’euros.

Wimbledon Village est un quartier tranquille et cossu du sud-ouest de la capitale britannique, bien loin du tourbillon de la vie citadine.

Connu pour son célèbre tournoi de tennis, l’endroit est un délicieux coin de verdure peuplé de luxueuses demeures victoriennes dont les propriétaires couleraient sans doute des jours on ne peut plus tranquilles s’il n’y avait… le « rôdeur de Wimbledon », comme l’a surnommé la presse britannique.

A ce nom un brin anxiogène, la police locale préfère une référence sportive, eu égard à ses performances criminelles de haute volée, en l’appelant « Coppi », du nom de l’Italien Fausto Coppi, légende du cyclisme qui réalisa le doublé Giro-Tour de France à deux reprises en 1949 et 1952.

A l’image du « campionissimo », les états de service du cambrioleur ont de quoi rendre béat d’admiration. Ou d’effroi.

En l’espace de dix ans, ce passe-muraille a commis plus de 200 cambriolages, déjouant serrures, alarmes et caméras de sécurité, dérobant montres de luxe, bijoux et argent liquide, pour un total avoisinant les 10 millions de livres (12,7 millions d’euros), explique à l’AFP l’inspecteur Dan O’Sullivan.

Avec, entre autres faits d’armes, un passage chez Boris Becker ou Nicolas Anelka, ou le vol d’une Rolex Submariner de 1955 évaluée à plus d’un demi-million de livres.

– Le « meilleur des meilleurs » –

C’est le « meilleur des meilleurs », résume l’enquêteur. « Il n’y a pas au Royaume-Uni d’équivalent d’un malfaiteur opérant seul, sur une telle période de temps, en étant capable d’amasser une telle fortune ».

« En général, les cambrioleurs finissent toujours par faire une erreur. Mais lui, on n’a jamais réussi à l’approcher », constate-t-il.

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé, et la police aurait même fait grimper des agents dans les arbres pour tenter de le prendre la main dans le sac.

En l’absence de pistes concluantes, Scotland Yard a lancé courant mars un appel à témoins, après avoir constaté ces derniers mois un regain d’activité de l’énigmatique malfaiteur, avec entre trois et quatre cambriolages par semaine de septembre à début 2016.

« C’est le rythme qu’il a suivi ces dix dernières années: taper une trentaine de maisons, avant de partir se mettre au vert », note Dan O’Sullivan.

Selon les informations glanées par la police, le coquin serait un homme d’environ 35 ans, de taille moyenne, athlétique, agile, organisé, discipliné et probablement très au fait des techniques d’enquête policière.

« Coppi » ne laisse ni trace ni empreinte, sait où se placer lorsqu’il entre dans le champ d’une caméra de surveillance, cache son visage avec sa main et un chapeau bob.

L’inspecteur O’Sullivan n’exclut pas qu’il puisse s’agir d’un « ancien militaire », rompu aux techniques de déplacements furtifs.

– Une histoire de « frisson » –

« Cet individu semble faire partie des 10% de cambrioleurs qui préparent leurs forfaits », souligne de son côté l’expert Calvin Beckford, du site spécialisé thecrimepreventionwebsite.com.

« C’est quelqu’un de particulièrement avisé qui passe du temps à observer pour minimiser les chances d’être repéré », dit-il à l’AFP, en recommandant chaudement aux résidents de Wimbledon de vérifier leurs systèmes de sécurité.

Habile, vraisemblablement animé par une forme de fascination pour ce qu’il fait — il aime le « frisson » du crime, dixit l’inspecteur O’Sullivan –, « Coppi » ne semble en revanche pas constituer une menace physique pour les habitants du Wimbledon Village.

« Il va et vient (dans le quartier) mais jusqu’ici, il n’y a jamais eu de violence. Pas de quoi perdre le sommeil », dit à l’AFP une de ses victimes, sous couvert de l’anonymat. « On espère juste qu’il sera bientôt coffré ».

Il peut compter sur la détermination de l’inspecteur Dan O’Sullivan, qui ne compte plus les heures passées sur ce dossier, épais de plusieurs milliers de pages et documents.

« On attend qu’il recommence », dit le policier. « Et à ce moment-là, on sera prêts à le cueillir. Nous aussi, on a le frisson, mais de la chasse. Et un jour, c’est nous qui aurons de la chance ».

© AFP/Archives JUSTIN TALLISL’inspecteur Dan O’Sullivan devant le commissariat du quartier de Wimbledon à Londres, le 22 mars 2016

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