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Coeur artificiel: Carmat calme le jeu après la polémique

Paris (AFP) – La société Carmat, dont l’essai clinique en France sur son coeur artificiel total est suspendu depuis le décès d’un cinquième patient, a démenti mardi toute intention de quitter le pays, après avoir laissé entendre le contraire.

« Je n’ai jamais dit qu’on allait partir de la France », a affirmé le directeur général de Carmat, Stéphane Piat, lors d’une conférence à Paris devant un parterre de journalistes, d’analystes financiers et d’investisseurs.

Un exercice rarissime pour cette start up, peu à l’aise avec les médias, malgré son statut d’emblème tricolore de l’innovation dans les sciences de la vie.

« Nous n’avons jamais parlé d’autre chose que d’enrôler des patients à l’étranger », en plus de la France, et non de délocaliser la société, a assuré M. Piat.

L’objectif de Carmat, qui dit actuellement collaborer avec l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), est toujours de « reprendre le plus vite possible l’essai clinique » en France, a-t-il insisté.

Dans un entretien au Parisien le 6 février, où M. Piat déplorait notamment des « blocages » d’ordre réglementaire pour l’innovation en France, nombre d’observateurs avaient vu une menace voilée de Carmat de quitter la France, pour les Etats-Unis entre autres.

« Beaucoup de mes propos manquent dans la retranscription de l’article », a expliqué mardi le directeur général.

– « Plus de pragmatisme » –

Alors que dans Le Parisien il avait jugé « dépassé » le principe de précaution observé par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), il a, au contraire, salué mardi le travail de l’agence, estimant qu’elle faisait « des choix difficiles » et qu’il fallait « respecter » les règles de chacun.

Il a toutefois réitéré son appel à « plus de pragmatisme sur l’innovation de rupture ».

Les dirigeants de Carmat espèrent faire passer ce message quand ils seront reçus au ministère de la Santé « d’ici dix jours », a précisé le président de la société, Jean-Claude Cadudal.

Carmat avait lancé l’an dernier son essai clinique dit « pivot » qui, en cas de succès, doit lui ouvrir les portes du marché européen.

Mais cet essai a été suspendu dès mi-octobre après le décès du premier patient implanté dans le cadre de cette nouvelle étude, 47 jours après avoir été greffé d’un coeur artificiel Carmat.

L’ANSM a exigé davantage d’informations et des mesures supplémentaires de la part de la société pour garantir au maximum la sécurité des patients.

Carmat a révélé lundi dernier que ce patient, âgé de 68 ans, était décédé en raison d’une mauvaise manipulation de sa part en remplaçant les batteries de son coeur artificiel, quelques jours à peine avant de quitter l’hôpital pour rentrer chez lui.

– « Minimiser le risque post-opératoire » –

Tous les patients, ainsi que leurs proches et le personnel hospitalier, sont « formés » à changer les quatre batteries externes alimentant la pompe du coeur artificiel, lesquelles ont une autonomie « de 3-4 heures », selon le professeur Christian Latrémouille, chirurgien cardiaque à l’Hôpital européen Georges-Pompidou et principal investigateur de l’essai clinique précédent de Carmat.

« Si vous vous branchez sur secteur, il y a zéro risque. Et une alarme se déclenche au moindre problème avec une batterie », a ajouté M. Piat.

« Nous allons renforcer notre accompagnement pour minimiser le risque post-opératoire, c’est clair », a-t-il précisé.

Carmat développe un coeur artificiel total pour des patients en insuffisance cardiaque terminale, qui n’ont plus que quelques jours ou semaines à vivre, et pour lesquels il n’y a pas de greffe disponible. 

Le but ultime du projet est d’être une alternative de long terme à la greffe.

Au total, depuis fin 2013, Carmat a implanté cinq patients, tous décédés aujourd’hui, après avoir survécu de 20 à 270 jours.

Pour son nouvel essai clinique, dont l’objectif de survie a été fixé à 180 jours, Carmat prévoit de recruter de 10 à 25 patients: jusqu’à 10 en France et les autres en Europe ainsi qu’éventuellement aux Etats-Unis.

Malgré le retard pris en France, la société espère toujours déposer sa demande de marquage CE fin 2018, étape nécessaire pour commercialiser son dispositif dans l’Union européenne.

Dans une analyse interne l’an dernier, Bpifrance avait toutefois jugé « risqué » le projet de Carmat et ne voyait pas la société rentable avant 2023. Par ailleurs, des coeurs artificiels concurrents existent déjà, comme celui de l’américain SynCardia, avait rappelé Bpifrance.

Le directeur général de Carmat, Stéphane Piat lors d'une conférence de presse à Paris, le 14 février 2017. © AFP

© AFP CHRISTOPHE ARCHAMBAULT
Le directeur général de Carmat, Stéphane Piat lors d’une conférence de presse à Paris, le 14 février 2017

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