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Corse: un mois après, la justice se penche sur la rixe de Sisco

Bastia (AFP) – Le procès de la rixe de Sisco s’est ouvert jeudi à Bastia dans le calme, malgré le rassemblement devant le tribunal de quelques centaines de personnes venues soutenir deux habitants du village, poursuivis pour leur implication dans les échauffourées aux côtés de trois frères marocains.

A l’ouverture du procès, seul un des trois frères marocains prévenus – qui comparaît détenu – était présent. Les deux autres, absents, ont fait savoir à leurs avocats qu’ils craignaient pour leur sécurité. Les deux villageois poursuivis pour leur implication présumée dans les échauffourées étaient présents. Ils comparaissent libres.

L’audience a débuté en retard jeudi après-midi, le temps pour la cour, les avocats, la presse et le public de déménager dans la salle plus grande de la cour d’assises.

Devant le palais de justice, plusieurs centaines de personnes étaient également réunies pour soutenir les deux villageois siscais qui comparaissaient libres. Beaucoup portaient un tee-shirt blanc barré d’une tête de Maure, emblème de la Corse et de l’inscription « Siscu – Simu tutti a fianc’ a vo » (« Sisco – Nous sommes tous à vos côtés »), a constaté un journaliste de l’AFP. 

Le parti indépendantiste Corsica Libera, dont le président de l’Assemblée de Corse Jean-Guy Talamoni est un des dirigeants, avait appelé à ce rassemblement, dénonçant « la prétention grandissante des petits caïds de quartiers » – des termes visant directement les trois frères marocains que le procureur de Bastia, Nicolas Bessone, avait désigné comme étant à l’origine des échauffourées, en voulant « privatiser » une petite crique de Sisco et en multipliant les incidents.

Invoquant justement la « sérénité des débats », la « sûreté des prévenus » et dénonçant « l’immixtion du politique » dans cette affaire, les avocats d’un des prévenus marocains avaient demandé le dépaysement du procès, une demande qu’a rejetée jeudi matin le procureur général de Bastia et dont ils ont pris acte sans déposer de recours.

Dans la foulée de cette décision, les dirigeants nationalistes du Conseil exécutif et de l’Assemblée de Corse, Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni, et le maire PS de Sisco, Ange-Pierre Vivoni, avaient lancé un appel commun au calme.

– « Aux armes! » –

La violente bagarre du 13 août, qui avaient opposé des familles marocaines de Corse à des villageois de Sisco, avait échauffé les esprits et entraîné notamment une manifestation tendue dans un quartier populaire de Bastia, le lendemain.

Le 13 août au soir, une centaine de gendarmes et policiers avaient été nécessaires pour ramener le calme. Des jets de pierre et des coups de couteau avaient fait quatre blessés, plusieurs véhicules avaient également été renversés et incendiés.

Mustafa Benhaddou, 33 ans, un ouvrier du bâtiment au chômage, déjà condamné pour outrage, transport d’armes et des délits liés aux stupéfiants, sera jugé détenu. Ses deux frères, Abdelillah et Jamal, 38 et 29 ans, tous deux plaquistes, doivent comparaître libres. 

Face à eux, deux villageois soutenus par la population locale, dont le procureur avait aussi dénoncé la riposte « scandaleuse ». Lucien Straboni, 50 ans, boulanger, et Pierre Baldi, 22 ans, employé de la mairie de Sisco, comparaîtront libres.

Quelques mois après l’agression de pompiers dans un quartier populaire d’Ajaccio le soir de Noël, qui avait été suivie d’une manifestation émaillée de slogans racistes et du saccage d’une salle de prière musulmane, la rixe de Sisco avait ravivé les tensions sur l’île.

Le flou initial autour des circonstances des échauffourées, certains témoins affirmant dans un premier temps que la dispute avait éclaté quand des touristes avaient pris en photo des femmes se baignant en burkini, y avait contribué.

Dès le 14 août, au lendemain des incidents, aux cris de « Aux armes! » et « On est chez nous! », quelque 500 personnes avaient défilé à Bastia dans le quartier populaire de Lupino, où certains pensaient que les familles marocaines impliquées vivaient. 

Le 16 août, le maire de Sisco avait quant à lui interdit le burkini dans sa commune – une décision validée ensuite par le tribunal administratif de Bastia, qui a pris le contre-pied du Conseil d’Etat et mis en avant la rixe pour justifier sa décision.

La crique de Sisco, en Corse, le 14 août 2016, où des affrontements ont eu lieu entre des familles marocaines et des villageois. © AFP

© AFP/Archives PASCAL POCHARD-CASABIANCA
La crique de Sisco, en Corse, le 14 août 2016, où des affrontements ont eu lieu entre des familles marocaines et des villageois

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