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Côte d'Ivoire: tirs à l'arme lourde à Bouaké

Bouaké (Côte d’Ivoire) (AFP) – La situation restait tendue samedi à Bouaké, contrôlée depuis la veille par des militaires mutins qui tiraient toujours à l’arme lourde dans cette deuxième ville de Côte d’Ivoire, où le ministre de la Défense devait tenter dans la journée de désamorcer la crise.

Le mouvement de contestation des militaires qui avait éclaté vendredi dans plusieurs villes de Côte d’Ivoire a gagné samedi Man, la grande ville de l’ouest du pays. Selon une source militaire jointe au téléphone par l’AFP: « depuis 08h00 (locales et GMT), Man est entrée dans la danse ».

« Je suis sorti de chez moi à 07h00 lorsque j’ai entendu les premiers tirs. A 08h00, les tirs se sont intensifiés. A l’heure actuelle, les militaires paradent en ville dans des véhicules. Les rues de Man ont commencé à se vider », a témoigné de son côté Jean, un habitant.

Les militaires mutins réclament le paiement de primes, des augmentations de salaires, une promotion plus rapide entre les grades et des logements.

« Ce matin encore, on entend les tirs de rafales et à l’arme lourde. Ils ont tiré toute la nuit également », a rapporté de son côté un journaliste de l’AFP joint à Bouaké, ancienne capitale de l’ex-rébellion armée et passée depuis vendredi sous le contrôle de ces mutins.

« On a entendu des tirs toute la nuit », a renchéri une habitante jointe au téléphone.

Les mutins ont établi des barrages interdisant l’entrée de la ville et de longues files de véhicules étaient visibles à l’extérieur.

Lancé vendredi matin à Bouaké, au centre d’une rébellion achevée en 2011, le mouvement s’était étendu dans la journée aux villes de Daloa et Daoukro (centre), Korhogo et Odienné (nord). Selon des témoins, les militaires s’étaient ensuite retirés vendredi soir des rues de ces villes.

Samedi matin, le calme y régnait toujours, sauf à Daloa où des militaires ont tiré en l’air pendant un quart d’heure, bloquant la sortie de la ville, selon un correspondant de l’AFP.

– Commerçants chassés des rues –

« Nous allons discuter avec nos hommes, recueillir leurs préoccupations, et trouver des solutions à cette situation qui est compréhensible mais déplorable », avait affirmé vendredi soir le ministre de la Défense, Alain-Richard Donwahi, à la télévision nationale. 

« Nous sortons d'(une) crise et notre armée est en reconstruction; les choses n’avancent pas aussi vite qu’on pourrait l’espérer mais elles avancent quand même », a-t-il ajouté. 

Samedi matin, le ministre est parti pour Bouaké, selon un membre de son cabinet, mais on ignorait à la mi-journée s’il avait pu atteindre cette ville.

Le président ivoirien Alassane Ouattara s’est de son côté rendu au Ghana pour l’investiture du nouveau chef de l’Etat. Il devait cependant regagner Abidjan, capitale économique du pays, pour un conseil des ministres en fin de journée.

Ecoles et commerces étaient toujours fermés samedi à Bouaké, dans l’ex-capitale de la rébellion qui contrôlait le nord du pays lorsqu’il était coupé en deux entre 2002 et 2011. Cette rébellion était favorable à l’actuel président Ouattara, alors que le sud du pays était tenu par les forces loyales à l’ex-président Laurent Gbagbo.

Fin 2010, M. Gbagbo avait refusé de reconnaître sa défaite à la présidentielle et le pays avait plongé dans cinq mois de violences qui ont fait 3.000 morts.

Samedi matin, les militaires ont chassé les commerçants installés au bord des routes de Bouaké.

« Depuis que nous avons écouté le ministre à la télévision, nous avons compris qu’il se prépare quelque chose contre nous. S’il veut venir pour négocier, il n’y a pas de problème. Mais s’ils veulent venir pour nous attaquer, nous sommes aussi prêts pour ça. C’est pourquoi nous ne voulons pas voir de commerçants dehors », a expliqué un soldat.

Vendredi, un officier avait expliqué qu’il s’agissait d' »une mutinerie des ex-combattants intégrés dans l’armée qui réclament des primes de 5 millions  de francs CFA (7.600 euros), plus une maison chacun ».

En novembre 2014 déjà, une vague de protestation de soldats était partie de Bouaké pour s’étendre à Abidjan et d’autres villes.

Le non-paiement des arriérés de soldes de 2009-2011 et de 2011-2014 des ex-combattants de la rébellion intégrés dans l’armée avait été présenté comme le principal motif de mécontentement.

Le gouvernement a présenté récemment une ambitieuse loi de programmation militaire jusqu’en 2020 prévoyant des achats d’équipements et une refonte des effectifs de cette armée de 22.000 hommes aux très nombreux officiers.

Sous leurs masques, des militaires impliqués dans la mutinerie de Bouaké, le 6 janvier 2017 à l'entrée de la ville ivoirienne. © AFP

© AFP SIA KAMBOU
Sous leurs masques, des militaires impliqués dans la mutinerie de Bouaké, le 6 janvier 2017 à l’entrée de la ville ivoirienne

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