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Dassault condamné à 5 ans d'inéligibilité et 2 millions d'euros d'amende

Paris (AFP) – Une fraude d' »ampleur » et une « claire intention de dissimuler des fonds familiaux »: le sénateur Serge Dassault a été condamné jeudi à Paris à cinq ans d’inéligibilité et deux millions d’euros d’amende pour avoir caché au fisc français, pendant quinze ans, des comptes à l’étranger.

Le milliardaire de 91 ans, doyen du Sénat et patron du journal Le Figaro, a immédiatement annoncé, par la voix de ses avocats, qu’il allait faire appel de cette condamnation. L’industriel ne devrait donc pas perdre son fauteuil de sénateur LR (Les Républicains) d’ici à la fin de son mandat à l’automne 2017, puisque sa condamnation ne sera définitive qu’après épuisement de toutes les voies de recours.

« L’ampleur de la fraude, sa durée et les fonctions politiques exercées durant une partie de la période, justifierait le prononcé d’une peine d’emprisonnement ferme », a considéré le tribunal, tout en estimant qu’une peine de prison ne serait « pas raisonnable » du fait du « grand âge » de Serge Dassault.

En revanche, pour « sanctionner » son comportement et « prévenir la récidive », le tribunal condamne le sénateur à la fois à une peine d’inéligibilité de cinq ans et à une interdiction d’exercer une fonction publique, également pour cinq ans.

Le parquet national financier avait requis cinq ans d’inéligibilité, deux ans de prison avec sursis et neuf millions d’amende contre un élu qui « a piétiné toutes les lois qu’il a votées sur le thème de la fiscalité ».

Dans ses motivations, le tribunal n’est pas moins dur, relevant une « forme de duplicité » chez Serge Dassault, coupable de faits de blanchiment alors qu’il dirigeait « un groupe bénéficiant de la commande publique » et « exerçait parallèlement un mandat parlementaire qui le conduisait à se prononcer sur le budget de l’État mais également sur les différentes législations fiscales et pénales portant sur la fraude fiscale et le blanchiment ». 

Le PDG du groupe Dassault, un des fleurons de l’industrie aéronautique française, a été condamné pour avoir dissimulé au fisc des dizaines de millions d’euros pendant 15 ans. En cause, les comptes de quatre fondations et sociétés, basées au Luxembourg et au Liechtenstein, qui abritaient près de 12 millions en 2014.

Il a également été reconnu coupable d’avoir omis dans ses déclarations de patrimoine ces millions dissimulés.

– « Régularisation tardive » –

Le sénateur avait depuis régularisé sa situation, tant auprès de l’administration fiscale – il a réglé près de 19 millions d’euros pour huit ans de redressement fiscal – que de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui avait saisi la justice.

« Il y a un dévoiement de la procédure dans le fait de poursuivre pour blanchiment quelqu’un qui a régularisé sa situation fiscale de façon spontanée », « dès qu’il a été informé de l’existence de ces placements », a déploré Jacqueline Lafont, un des avocats de Serge Dassault. 

Le tribunal a au contraire relevé une régularisation « tardive », alors que la justice avait déjà découvert les fonds litigieux.

C’est la première fois que Serge Dassault est condamné mais la deuxième fois qu’il est susceptible de perdre un mandat électoral sur décision de justice.

En 2009, le Conseil d’État avait annulé sa réélection à la mairie de Corbeil-Essonnes (Essonne) l’année précédente en raison de « dons d’argent » et avait déclaré M. Dassault, qui avait ravi cette ville aux communistes en 1995, inéligible pendant un an.

L’existence de « cagnottes » au Luxembourg et au Liechtenstein avait déjà été évoquée dans le cadre de l’enquête sur un système présumé d’achats de voix lors des campagnes municipales de Corbeil-Essonnes en 2009 et 2010. Affaire dans laquelle Serge Dassault est mis en examen et qui est toujours en cours d’instruction.

Pour le parquet, ce procès était le « deuxième plus symbolique » en la matière « après l’affaire Cahuzac », l’ex-ministre du Budget condamné en décembre à trois ans de prison pour fraude fiscale.

Mais contrairement à l’ex-ministre socialiste, Serge Dassault, soutien de l’ancien président Nicolas Sarkozy, ne s’est jamais présenté à son procès.

Dans des courriers, il avait affirmé avoir hérité de fonds qui appartenaient à son père, le pionnier de l’aéronautique français mort en 1986, puis à sa mère, décédée en 1992. « Une dissimulation qui a perduré depuis les années 50 », a résumé le tribunal.

Le sénateur et industriel Serge Dassault à Saint-Cloud le 10 mars 2016. © AFP

© AFP/Archives ERIC PIERMONT
Le sénateur et industriel Serge Dassault à Saint-Cloud le 10 mars 2016

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