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Décès de Michel Rocard, ex-Premier ministre et théoricien de la "deuxième gauche"

Paris (AFP) – L’ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, théoricien de la « deuxième gauche » et figure marquante de la politique française, est décédé samedi après-midi à l’âge de 85 ans, a annoncé à l’AFP son fils, l’astrophysicien Francis Rocard.

Quantité de politiques à gauche, au gouvernement et au-delà, mais aussi plusieurs figures de la droite, ont salué l’apport de ce socialiste « au parler vrai », devenu « une grande figure de la République et de la gauche ».

Selon l’un de ses proches, il avait été hospitalisé dimanche dernier. Il est décédé à 18h30 à la Pitié-Salpêtrière.

Lundi soir, une minute de silence est prévue à la mairie de Conflans-Sainte-Honorine, dont il fut l’édile. Et un hommage national est probable.

Né à Courbevoie, près de Paris, le 23 août 1930 dans une famille de la bourgeoisie, catholique par son père – un des scientifiques à l’origine de la bombe atomique française -, protestant par sa mère.

Socialiste réformiste, Michel Rocard a été Premier ministre de 1988 à 1991 de François Mitterrand, avec lequel il a toujours eu des relations conflictuelles, avant de diriger le PS en 1993 et 1994.

Père de la « deuxième gauche », il voulait incarner une vision rénovée de la gauche, prenant en compte « les contraintes de l’économie mondialisée » sans « renoncer aux ambitions sociales ».

Le président François Hollande a d’ailleurs aussitôt salué l’incarnation d' »un socialisme conciliant utopie et modernité » par un « rêveur réaliste ».

Le Premier ministre Manuel Valls, issu lui-même du rocardisme et ayant travaillé à Matignon auprès de Michel Rocard, a jugé que l’homme à l’origine de son engagement en politique incarnait « la modernisation de la gauche et l’exigence de dire la vérité ». 

Et de se dire « un peu orphelin ».

A l’unisson d’autres voix à gauche, Martine Aubry a salué un Michel Rocard qui n’a cessé toute sa vie « de vouloir transformer la société, de réconcilier l’économique et le social ».

A droite, Nicolas Sarkozy, qui lui avait confié une mission quand il était à l’Elysée, a salué son refus du sectarisme et son « sens de l’Etat », là où Alain Juppé a retenu « esprit agile, culture historique, goût du débat sans concessions mais sans sectarisme ». 

En 2007, Michel Rocard avait été victime d’une grave hémorragie cérébrale lors d’un voyage en Inde. En visite à Stockholm en mars 2012, il avait été hospitalisé cinq jours à la suite d’un malaise et les médecins avaient dû résorber un caillot sur la partie droite du cerveau.

En début de semaine, Michel Rocard, qui travaillait à la rédaction d’un livre-testament, avait reporté sa participation à l’émission « Questions d’info » LCP-Le Monde-France Info-AFP, programmée mercredi prochain. Il devait participer à celle du 13 juillet.

Dans un entretien la semaine dernière au Point, il fustigeait la gauche française, « la plus rétrograde d’Europe » à ses yeux, et jugeait que « les droits des citoyens ne se résument pas aux +acquis sociaux+ » et que « le véritable socialisme, c’est l’accès pour tous aux activités de l’esprit ».

De son passage chez les scouts, il reçoit un surnom qui le suivra toute sa vie: « Hamster érudit ». Licencié ès lettres, diplômé de Sciences-Po et du Centre d’études des programmes économiques (CEPE), il sort en 1958 de l’ENA, où il côtoie Jacques Chirac, et rejoint l’Inspection des finances.

– Des relations difficiles avec Mitterrand –

Hostile à la guerre d’Algérie, il devient en 1967 patron du PSU (Parti socialiste unifié) qu’il dirige jusqu’en 1973 et qui sera un « laboratoire d’idées » pour la gauche. En mai 68, il s’oppose à la tendance « dure » du PSU et parvient à faire condamner le recours à la violence.

Il obtient 3,6% des suffrages à l’élection présidentielle de 1969 et devient député des Yvelines, puis maire (1977-94) de Conflans-Sainte-Honorine. Il sera réélu député plusieurs fois.

En 1980, il annonce sa candidature à la candidature du PS pour la présidentielle de 1981 mais doit s’effacer devant François Mitterrand. Une fois la gauche au pouvoir, il est nommé ministre, notamment de l’Agriculture dont il démissionne en avril 1985, en pleine nuit, pour marquer son hostilité à la proportionnelle aux législatives de 1986.

A Matignon en 1988, il pratique l’ouverture, ramène la paix en Nouvelle-Calédonie et instaure le RMI. En mai 1991, M. Mitterrand lui demande de démissionner. En 1993, il devient premier secrétaire du PS (jusqu’en 94). Mais, à nouveau, il ne parvient pas à se mettre en position favorable pour représenter le parti à la présidentielle de 1995.

Michel Rocard a eu quatre enfants de trois mariages.

Interrogé par Le Point sur ce qu’il aimerait que Dieu lui dise le jour où il le rencontrerait, il avait répondu: « Oh, j’aimerais l’entendre dire : +Petit tu n’as pas trop mal travaillé. Tu as essayé de ne pas oublier les principes immuables de la société des humains+ ».

L'ancien Premier ministre Michel Rocard dans son bureau à Paris, le 22 décembre 2010 . © AFP

© AFP/Archives JOEL SAGET
L’ancien Premier ministre Michel Rocard dans son bureau à Paris, le 22 décembre 2010

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