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Deux ans ferme pour abus de confiance

Un sexagénaire a comparu ce mardi au tribunal correctionnel pour abus de confiance. Il avait détourné des fonds, environ 125 millions, devant servir à la construction d’un lotissement par le biais d’une société civile immobilière, arnaquant de fait une trentaine d’investisseurs qui s’étaient portés acquéreurs de parts dans la SCI. Il a été condamné à deux ans de prison ferme avec mandat de dépôt.

À la barre, il ne paye pas de mine. On est loin de l’escroc flamboyant dont les médias et les séries TV raffolent. C’est un sexagénaire plutôt pépère, « crocs » aux pieds, pantacourt et chemise à carreaux. Et pourtant, ce n’est pas la première fois qu’il comparait pour ce type de fait. Son casier judiciaire aligne un bon nombre de condamnations pour escroquerie ou abus de confiance, tant en Polynésie qu’en Nouvelle-Calédonie. Mais son dernier fait d’armes est sans conteste celui qui lui a rapporté le plus, tant en numéraire qu’en peine de prison. La justice lui reproche d’avoir détourné 125 millions.

En 2012, il crée une SCI pour acheter 182 hectares de terres agricoles à Tahaa dont le coût avoisinait les 130 millions. Il contacte des personnes leur promettant des lots dont le coût reviendrait à environ 500 Fcfp le m2. À ce prix-là, autant dire qu’ils étaient nombreux à vouloir des parts dans la SCI. Une trentaine. Non content de ne pas mettre un franc dans la SCI, il se versait 20% de commission à chaque fois qu’il vendait une part. La SCI totalisait 284 millions en caisse.

Ce qu’il avait omis de préciser aux acquéreurs, c’est que sur des terres agricoles on ne peut pas construire de résidence principale mais uniquement des hangars et éventuellement une résidence secondaire. Et certains des acquéreurs désiraient y construire leur résidence principale pour leurs vieux jours. Autre problème, les terres étaient revendiquées, ce qui a considérablement retardé le début des travaux. Enfin des travaux supposés, car si ceux-ci ont débuté, ils ont vite été arrêtés : les entrepreneurs n’étaient pas payés. Qu’à cela ne tienne, il s’improvise terrassier après une journée de formation à la conduite d’un engin. Facile.

Les assemblées générales, il n’y en avait pas, pas plus que de comptabilité et de factures. Cerise sur le gâteau, il n’apparaissait nulle part dans la SCI étant donné son passif avec la justice qui lui avait interdit d’exercer comme gérant.

« Vous avez une belle carrière dans la délinquance »

Pour sa défense il affirme que les 125 millions ont servi à payer des prestataires, « à Tahaa cela se passe comme ça, on paye en liquide et à la semaine. » Visiblement sans facture aussi car la justice n’a trouvé aucune trace de ces versements. Normal, il n’y avait de comptabilité.

Le juge visiblement agacé l’interroge, « pourquoi vous ne faites pas des affaires honnêtement ? » le prévenu marmonne, « je ne sais pas dire non, je dis oui à tout le monde et je donne tout… » Il n’a pas le temps de finir sa phrase que le juge le foudroie, « ah non, justement vous ne donnez rien ! À vous entendre on dirait une victime (….) Je reconnais toutefois que vous êtes fort. Vous ne faites rien, vous ne dépensez rien et vous touchez 77 millions (NDLR : la somme a minima dont la justice est sûre qu’il l’a détournée). »

Le juge poursuit sur sa lancée, « vous avez une belle carrière dans la délinquance » Le sexagénaire assure, « je compte m’arrêter.» Le juge, à la limite de l’hilarité, abonde dans son sens, « il serait temps, hein, vous avec le droit à la retraite. »

« Mes clients ont mis leurs économies et se retrouvent avec rien »

Pour la partie civile qui représentait les acquéreurs, « cette affaire est la caricature de l’abus de confiance (…) mes clients ont mis leurs économies et se retrouvent avec rien où alors pour certains avec des terrains inaccessibles et d’autres qui ne sont même pas terrassés. »

Pour la procureure, on n’est pas là « en présence d’un très mauvais gestionnaire, mais d’un escroc (…) il n’a jamais pu justifier des 125 millions envolés mais il n’a jamais oublié de se servir à titre personnel. » Elle réclame quatre années de prison dont un an ferme et la saisie de ses biens.

Le tribunal a été au-delà des réquisitions de la procureure en condamnant l’entrepreneur à 2 années de prison ferme avec mandat de dépôt et l’interdiction à vie de gérer toute entreprise. Les parts qu’il détenait dans la SCI ont été confisquées ainsi qu’un immeuble lui appartenant. Il devra aussi rembourser les membres de la SCI à hauteur de 125 millions de francs.

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