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Économie : ce qu’il faut attendre de la visite présidentielle

Emmanuel Macron a reçu au Haut-commissariat, lundi soir, les acteurs économiques polynésiens. En réponse à leurs nombreuses interrogations, il leur a donné la primeur de quelques annonces qui seront officialisées mardi soir. Souplesse sur les remboursements des prêts de l’État aux entreprises, nouvel instrument financier pour la transition énergétique, défiscalisation prolongée… et aussi une opposition résolue au projet aquacole de Hao, et un appel aux patrons pour encourager l’effort vaccinal.

Il fallait au moins un Président de la République pour réunir une telle assemblée. Une quarantaine de personnes, les patrons les plus puissants du territoire, les dirigeants des syndicats patronaux, de la Fedom, de la CCISM, plusieurs ministres et plusieurs chefs de service de l’État, ainsi que quelques hommes d’affaires venus dans le sillage présidentiel, étaient réunis sous le fare potee du Haut-commissariat ce lundi soir pour entendre de la bouche même du chef de l’État, tout juste revenu de Manihi, la réponse à leurs nombreuses interrogations. Qu’entend faire la France pour l’économie polynésienne, mise à terre par la crise sanitaire ? Toujours entouré de Sébastien Lecornu, de Dominique Sorain et d’Édouard Fritch, Emmanuel Macron a, en moins d’une heure et demie, fait des annonces fortes qui ont conquis l’assistance.

PGE et Fonds de solidarité : pas de couperet, mais pas non plus d’argent magique

Sur la question du remboursement des PGE et des prêts du Fonds de solidarité aux entreprises (600 millions d’euros, soit 71,6 milliards de Fcfp), certaines sont fragilisées par leur endettement et la durée de remboursement, qu’elles voudraient voir portées de 6 à 10 ans, voire transformées en subventions. Emmanuel Macron, qui promet une approche « granulaire » (au cas par cas selon les entreprises et les secteurs), assure ne pas vouloir fragiliser les entreprises :  « S’il y a des filières ou des acteurs qui ont besoin d’un peu plus de temps,  évidemment, on saura être pragmatique. » Mais il prévient : « L’idée n’est pas non plus de dire que les prêts deviennent du capital par magie, parce que ça, c’est déresponsabilisant. Il faut que la vie économique ne sorte pas complètement de sa grammaire fondamentale. » Le Fonds de solidarité sera prorogé, avec « une clause de revoyure fin août pour l’adapter en fonction des éléments de reprise économique. » Quant à Air Tahiti Nui, le chef de l’État a confirmé que les travaux autour de  l’accompagnement à la recapitalisation doivent être finalisés ce mardi matin.

Transition énergétique : de nouveaux financements annoncés aujourd’hui

Frédérick Dock, du Medef, a exprimé le souhait d’un instrument financier spécifique pour aider la transition énergétique, « qui doit aussi être assurée par le privé ». Emmanuel Macron a indiqué qu’outre les dispositions du plan de relance sur la transition énergétique, un fonds de soutien d’une durée de 4 ans allait être proposé. Mais il a mis le doigt sur une lacune, la capacité à «  structurer les filières. Ce que j’attends de vous, c’est une stratégie de formation et d’investissement privé qui accompagne cet investissement public. Je pense qu’il faut qu’on sorte du cas par cas et qu’on atteigne une taille critique. » Les montants prévus seront annoncés mardi.

Soutien à la poursuite de la défiscalisation, et une nouvelle compétence transférée au Pays

La défiscalisation nationale, dont les modalités actuelles sont valables jusqu’en 2025, est jugée « efficace » par Emmanuel Macron pour « consolider des filières et créer des emplois. On veillera avec la majorité à ce qu’elle soit totalement maintenue. J’y suis favorable, mais il faut qu’on construise le chemin politique pour le faire , en tout cas moi je le défendrai. » Une déclaration accueillie par une salve d’applaudissements des entrepreneurs, pour qui cette visibilité à plus long terme est essentielle. Autre source de satisfaction pour les entreprises : le registre du commerce et des sociétés (RCS), gérée par un service du greffe en sous-effectifs, devient compétence du Pays : la lettre a été signée lundi matin par le ministre des Outre-mer et par le Garde des Sceaux.

Le projet aquacole de Hao : « pas une bonne idée »

Le Président de la République été très clair : la stratégie indo-Pacifique de la France est une chance pour la Polynésie, pour lui éviter d’être « un terrain de prédation », en premier lieu de la Chine. « Quand je vois des projets étranges, financés par des investisseurs chinois improbables, avec des potentiels de création d’emplois incertains… je ne peux y voir que des perspectives de ‘mettre une patte’. Dans la vie, il faut savoir où on met ses fesses, et ce n’est jamais bon d’être entre deux chaises. Les grandes fermes (aquacoles, ndlr), je pense que ce n’est pas une bonne idée et je pense que ça sent l’éléphant blanc, comme on dit en Afrique, à plein nez. » Sans exclure de travailler avec la Chine, il a rappelé que « quand on ne comprend pas où ça va économiquement, ce n’est jamais bon signe. »De Beijing à Papeete, tous ceux qui s’étaient lancés dans cette chasse à l’éléphant blanc sont donc prévenus. Et une « task force » pour la coopération régionale et la mise en œuvre de la stratégie indo-Pacifique, qu’Emmanuel Macron admet bien déclinée sur le plan militaire mais beaucoup moins sur le plan diplomatique, devrait voir le jour à Papeete.

En conclusion, la région est « pleine de potentialités, elle est en même temps pleine de risques, mais je la regarde avec beaucoup de confiance mais surtout avec une volonté de nous réinvestir politiquement. »

La vaccination, indispensable à la reprise

Le Président de la République a demandé aux chefs d’entreprise de s’impliquer dans l’effort de vaccination : « J’ai besoin de vous pour faire vacciner l’ensemble de vos salariés », non seulement parce que c’est la condition de la reprise, et parce que « je vous le dis très franchement, je ne peux pas expliquer à l’ensemble de nos compatriotes… Les acteurs économiques polynésiens ne contribuent pas, c’est une réalité. On a mis en place des dispositifs de solidarité parce qu’on pense que c’est le devoir de la nation, et on est dans une situation de sous-vaccination. Là, j’ai besoin que vous montiez tous sur le pont, parce que la reprise ne se fera qu’au rythme de la vaccination. Si on veut rouvrir, il n’y a que le vaccin. »

Le Medef a d’ailleurs diffusé au même moment un communiqué de presse indiquant que les entreprises allaient « faciliter la vaccination durant les heures de travail » en organisant avec la Direction de la santé des dates et créneaux de vaccination dans des centres proches du lieu de travail.

Et Emmanuel Macron a été très clair sur ce qu’il pense des  « super stratégies Covid zéro » : « Tous ceux qui ont fait du ‘Covid zéro’ dans la région se sont complètement plantés, le Japon étant le meilleur exemple, c’est très cruel pour eux. » Et ça urge : il a rappelé que la Polynésie a beaucoup de doses de vaccins qui seront périmées si elles ne sont pas utilisées en juillet-août.

 

 

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1 Commentaire

  1. Teriivaea
    27 juillet 2021 à 8h05 — Répondre

    Sur les « étranges » projets aquacoles de Hao, j’espère que maintenant que le Président de la République a résumé abruptement mais très pertinemment ce qu’il fallait en penser, on va arrêter d’en parler et se focaliser sur de réels projets de développement. N’importe quel personne impartiale avec un niveau scolaire de bac économique aurait dit stop depuis longtemps car les projets présentés ne contenaient pas d’avantages comparatifs tangibles.

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