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En Allemagne, le chef de la diplomatie turque accuse Berlin d'ingérence

Hambourg (AFP) – Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a sommé mardi soir l’Allemagne de « ne pas donner de leçons de démocratie » à la Turquie et accusé Berlin d’ingérence avant le référendum sur le renforcement des pouvoirs du président.

« S’il vous plaît, ne nous donnez pas de leçons en matière de droits de l’homme et de démocratie ! », a lancé le chef de la diplomatie, du balcon de la résidence du consul général de Turquie à Hambourg, dans le nord de l’Allemagne.

« L’Allemagne ne devrait pas intervenir dans nos élections et notre référendum », a-t-il encore souligné, Ankara accusant Berlin d’empêcher le déroulement de meetings électoraux en Allemagne en faveur du chef de l’Etat turc, Recep Tayyip Erdogan.

M. Cavusoglu s’exprimait devant quelque 200 sympathisants militant pour le « oui » au référendum du 16 avril.

« Nous voulons dire à nos amis allemands : s’il vous plaît, cessez ces mauvaises pratiques ! », a-t-il ajouté, tandis que la foule brandissait des drapeaux turcs dans cette ville portuaire qui compte une importante communauté turque.

– Bloqués

« Ceux qui vont répondre ‘oui’ au référendum sont bloqués, ce n’est pas correct », a critiqué M. Cavusoglu.  

Il a précisé qu’il s’entretiendrait pour la troisième fois en quelques jours avec son homologue allemand, Sigmar Gabriel, à l’occasion d’un petit-déjeuner mercredi matin.

Selon la police, quelque 250 opposants à l’homme fort de la Turquie, principalement des représentants de la minorité alévie, se sont également massés près du consulat, certains brandissant des pancartes telles que « Dictateur Erdogan – Hayir (‘Non’ en turc, ndlr) ».

Les autorités allemandes avaient annoncé lundi soir avoir retiré l’autorisation délivrée pour le meeting de M. Cavusoglu dans un lieu jugé trop vétuste de Hambourg, sans pour autant annuler le rassemblement en lui-même.

Les relations entre la Turquie et l’Allemagne, deux piliers de l’Otan, ont connu un accès de tension ces derniers jours après l’annulation de rassemblements électoraux auxquels devaient prendre part des ministres turcs en Allemagne.

Ces passes d’armes inquiètent en Allemagne qui compte la plus grande diaspora turque du monde, avec quelque trois millions de personnes, dont la moitié sont des électeurs turcs qui entretiennent souvent un lien fort avec leur pays d’origine.

L’inquiétude est d’autant plus vive qu’il y a aussi en Allemagne une importante communauté kurde, en lutte avec le régime de M. Erdogan.

Le gouvernement d’Angela Merkel a déjà appelé ces derniers mois la communauté turque à ne pas importer les conflits qui agitent la Turquie. 

– « Pratiques nazies »

Comme plusieurs autres responsables turcs, M. Cavusoglu a été missionné pour mobiliser le plus de voix possible au sein de la communauté turque d’Allemagne en faveur du « oui » au référendum sur l’accroissement des pouvoirs du président Erdogan.

Ce dernier a provoqué la fureur des dirigeants allemands en assimilant les annulations de meetings à des « pratiques nazies ».

M. Erdogan s’est dit prêt à faire campagne en Allemagne, assurant que si les autorités l’en empêchaient, il mettrait « le monde sens dessus dessous ».

La chancellerie a qualifié d' »absurdes et déplacées » les accusations du chef de l’Etat turc et appelé à « garder la tête froide » dans cette affaire.

Et le gouvernement allemand s’est défendu de toute implication dans les annulations de meetings, affirmant que la décision d’accorder ou non les autorisations en la matière relevait de la compétence des autorités locales.

Le ministre turc de l’Economie, Nihat Zeybekçi, qui s’était malgré tout rendu en Allemagne dimanche, a décidé de poursuivre en justice le quotidien allemand Bild, accusant ce journal d’avoir insulté le président et un ministre turcs, selon un communiqué de ses services.

Avant même ces derniers événements, les relations germano-turques s’étaient déjà dégradées : la Turquie a en effet très mal pris les critiques allemandes sur le respect de la liberté d’expression et des droits de l’opposition après les purges déclenchées à la suite du putsch avorté de juillet.

© dpa/AFP Daniel Reinhardt
Le ministre des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu lors d’un meeting à la résidence du consul général de Turquie à Hambourg, le 7 mars 2017

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