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Fuite d'un document "confidentiel défense": la justice enquête

Paris (AFP) – La justice a lancé une enquête après la publication d’un document « confidentiel défense » sur un projet de frappes françaises en Syrie en 2013, obtenu par des journalistes du Monde dans le cadre de leurs nombreux entretiens à l’Elysée avec François Hollande.

Le parquet de Paris, saisi par le député Les Républicains Eric Ciotti par un courrier du 4 novembre, a ouvert une enquête préliminaire pour compromission de la défense nationale, a appris lundi l’AFP de source judiciaire.

Sorti mi-octobre, le livre « Un Président ne devrait pas dire ça », de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, a déjà suscité son lot de polémiques. De la révélation par le chef de l’Etat en personne qu’il a autorisé des assassinats ciblés visant des auteurs d’attentats (opérations dites Homo), à ses critiques contre la magistrature, qualifiée d' »institution de lâcheté », François Hollande s’est vu reprocher ses confidences, retranscrites à travers les 700 pages qui balayent son quinquennat. Les multiples rencontres du président avec des journalistes ont d’ailleurs donné lieu à un foisonnement éditorial depuis septembre.

Fin août, une première série d’articles était parue dans Le Monde, sous la plume de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, qui ont pu s’entretenir pendant une soixantaine d’heures avec le chef de l’Etat, à l’Elysée, ou parfois au domicile de l’un d’eux.

L’un des articles, titré « Le jour où… Obama a laissé tomber Hollande », racontait comment la France avait renoncé, à l’été 2013, du fait des tergiversations américaines, à mener des frappes contre le régime syrien de Bachar al-Assad, alors fortement soupçonné d’utiliser des armes chimiques contre son peuple.

– « Timeline du raid » –

Les deux journalistes y relataient un entretien avec le président Hollande à l’Elysée le 30 août et évoquaient un document estampillé « confidentiel défense », dont ils disaient avoir eu copie, et que le quotidien reproduisait.

« Rédigé la veille, le 29 août, par son état-major particulier, il détaille la +timeline du raid+ à venir. C’est le véritable vade-mecum de l’intervention française », écrivaient-ils, avec force détails.

Eric Ciotti s’était immédiatement saisi du sujet, dénonçant « une compromission flagrante et dangereuse du secret nécessaire à notre sécurité et à notre souveraineté ». Dans son courrier au parquet, le député des Alpes-Maritimes affirme avoir écrit deux fois au ministère de la Défense sans obtenir de réponse.

À ce stade, le parquet n’a pas saisi de service d’enquête, a précisé la source judiciaire. Il a transmis un courrier au ministère de la Défense pour obtenir des réponses sur la classification du document et sur le degré éventuel d’atteinte portée à la défense nationale, a-t-elle ajouté.

Réagissant au courrier d’Éric Ciotti au parquet, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, proche de François Hollande, avait relativisé la gravité des faits. « De quoi s’agit-il? De la publication dans un journal du soir d’éléments (…) sur des événements qui remontent à trois ans et en plus sur une opération qui n’a pas eu lieu? », avait-il lancé le 6 novembre.

Le délit de compromission de la défense nationale peut être puni d’une peine allant jusqu’à sept ans de prison et 100.000 euros d’amende.

Interrogé par l’AFP, l’Elysée n’a souhaité faire aucun commentaire.

Si l’enquête n’en est qu’à ses prémices, elle pourrait, à terme, poser la question de l’immunité présidentielle du chef de l’Etat.

En parallèle, les députés LR ont engagé une procédure de destitution du chef de l’Etat, une initiative qui n’a probablement aucune chance d’aboutir.

Dans leur précédent livre, « Sarko s’est tuer », Gérard Davet et Fabrice Lhomme racontaient déjà une anecdote qui avait fait polémique et impliquait l’Elysée. Ils affirmaient que le désormais favori de la primaire à droite, François Fillon, avait demandé au secrétaire général de l’Elysée de François Hollande, Jean-Pierre Jouyet, que l’exécutif fasse pression sur la justice pour accélérer les enquêtes visant Nicolas Sarkozy.

 Une demande démentie par François Fillon, mais confirmée par François Hollande dans « Un Président ne devrait pas dire ça ».

Fabrice Lhomme et Gérard Davet le 10 novembre 20174 à Paris. © AFP

© AFP/Archives LIONEL BONAVENTURE
Fabrice Lhomme et Gérard Davet le 10 novembre 20174 à Paris

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