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Grande-Bretagne: Boris Johnson renonce à la succession de David Cameron

Londres (AFP) – A peine lancée, la course à la succession de David Cameron a viré au drame shakespearien jeudi avec la décision de Boris Johnson, le leader du camp du Brexit, de ne pas briguer le poste de Premier ministre.

Ce coup de théâtre, qui s’apparente à un refus d’obstacle, redistribue complètement les cartes au sein du parti conservateur et laisse entier le suspense sur la façon dont les négociations de sortie de l’Union européenne vont être menées.

La ministre de l’Intérieur Theresa May, et le ministre de la Justice Michael Gove, dont la candidature surprise jeudi matin a été perçue comme une trahison par « BoJo », sont désormais les favoris pour s’installer au 10, Downing Street le 9 septembre.

« Je dois vous dire mes amis, vous qui attendez la +phrase choc+ de ce discours, que je ne peux pas être cette personne », a lancé l’imprévisible Johnson à une assistance médusée, après avoir exposé son bilan d’ancien maire de Londres.

La stupeur était totale. Car même si Boris Johnson suscitait une grogne croissante depuis la victoire des pro-Brexit, personne ne s’attendait à ce qu’il abandonne en rase campagne.

Theresa May avance donc en favorite, même si elle pâtit du fait qu’elle s’était ralliée à David Cameron pour défendre un maintien dans l’UE. Mais cette eurosceptique notoire a montré tellement peu d’empressement pendant la campagne qu’elle a le profil pour ressouder le parti, dont près de 60% des députés auraient préféré un statu quo.

– Cinq candidats –

« Notre pays a besoin d’un dirigeant qui soit fort et reconnu pour traverser cette période d’incertitude économique et politique », a-t-elle déclaré. Si elle est élue, elle ne va pas activer l’article 50, qui fixe les modalités du divorce avec l’UE « avant la fin de l’année », a-t-elle précisé.

Michael Gove jouit, lui, d’une excellente réputation auprès du parti. Reste à savoir comment sera perçue sa volte-face, alors que le député écossais Alex Salmond l’a comparé jeudi à Lord Macbeth, le général qui, dans la tragédie de Shakespeare, commet un régicide pour s’emparer du pouvoir.

Boris Johnson hors course, cinq candidats au total postulent pour mener les négociations de sortie de l’UE qui s’annoncent difficiles.

Les dirigeants européens, réunis mercredi à Bruxelles pour la première fois en plus de 40 ans sans le Royaume-Uni, ont édicté leurs lignes rouges pour le divorce, assurant qu’il n’y aurait « pas de marché unique à la carte », selon les termes du président du Conseil européen, Donald Tusk.

Les députés conservateurs doivent désormais se mettre d’accord pendant l’été pour désigner deux finalistes, et les 150.000 membres du parti choisiront l’élu(e), qui sera intronisé(e) le 9 septembre.

Le ministre du Travail Stephen Crabb, l’ancien secrétaire d’État à la Défense Liam Fox et la secrétaire d’Etat à l’énergie Andrea Leadsom ont également déposé leur candidature.

– Brutus et César –

L’abandon de Boris Johnson est le dernier épisode d’une saga qui l’a vu remporter le pari de Brexit et ouvre des interrogations sur son avenir politique.

Réfugié dans un quasi mutisme depuis le référendum, comme sonné par le choc, il avait certes  commencé à susciter l’inquiétude chez les Tories. Y compris auprès de plusieurs « Brexiters », plus du tout convaincus finalement qu’il soit à la hauteur de l’immense tâche qui attend le futur chef du gouvernement.

Le coup est venu de son plus proche allié pendant la campagne pour le référendum: Michael Gove. « C’est lui qui a porté le coup fatal », constate Nick Turnbull, maître de conférence en sciences politiques à l’Université de Manchester.

A peine actée, la candidature surprise du ministre de la Justice a été interprétée comme un coup de couteau dans le dos de Boris Johnson. Lui-même y a implicitement fait allusion en citant dans son propre discours les mots que Brutus prononça avant de poignarder Jules César.

Personne n’avait vu venir Michael Gove, qui avait déjà rompu avec un autre grand ami, David Cameron, en se prononçant en faveur d’un Brexit au printemps.

Il a enfoncé le couteau dans la plaie en disant être arrivé « à la conclusion que Boris ne peut pas assumer le leadership ou construire une équipe pour la tâche qui nous attend ».

En officialisant sa candidature, Theresa May a, elle aussi, mis en doute la compétence de Boris Johnson. « La dernière fois que Boris a noué un accord avec les Allemands, il est revenu avec trois canons à eau », a-t-elle lancé, moqueuse.

« Seul Shakespeare aurait réussi à retranscrire la magnitude de toutes ces trahisons. On est devant un nid de vipères déguisé en parti politique », tranche Nick Turnbull.

L'ex-maire de Londres Boris Johnson à la sortie de son domicile, le 30 juin 2016 dans la capitale britannique. © AFP

© AFP CHRIS J RATCLIFFE
L’ex-maire de Londres Boris Johnson à la sortie de son domicile, le 30 juin 2016 dans la capitale britannique

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