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« Guérison » et levée de l’isolement des malades : pourquoi la Polynésie avance avec prudence


Combien de guéris du coronavirus en Polynésie ? Plus les jours passent, plus la question intrigue. Si les autorités paraissent réticentes à y répondre c’est avant tout par prudence, a rappelé le ministre de la Santé Jacques Raynal ce vendredi, les connaissances scientifiques étant encore limitées sur la question. Plusieurs « cas confirmés », qui n’ont montré aucun symptôme depuis plus de 14 jours, devraient tout de même voire leur assignation à résidence être levée dans le courant de la semaine prochaine. 

Près de 40 jours après la détection du premier cas au fenua, trois semaines après l’arrivée des derniers vols réguliers – principaux vecteurs de la maladie dans le pays – où sont les guéris du coronavirus ? À part un touriste suisse déclaré « non-contagieux » pour pouvoir être évasané le 7 avril, aucun des 55 cas confirmés au fenua n’est sorti d’isolement. Vendredi midi, le président Édouard Fritch a rappelé que « c’est la médecine qui décide ». Seul un « certificat de guérison » délivré par les autorités sanitaires peut déclencher, côté Haussariat, la levée de l’arrêté d’assignation à résidence dont chaque malade fait l’objet.

D’après le ministre de la Santé, qui s’est exprimé quelques heures plus tard depuis la cellule de crise sanitaire, ce travail serait en cours.« Nous sommes en train de procéder aux premières sorties d’isolement des personnes qui ne présentent pas depuis au moins 14 jours de signes particuliers pouvant évoquer une évolution de la maladie, a expliqué Jacques Raynal. Il faut savoir que dans le semaine, il y en aura bien 5 ou 6″.

Pourtant le ministre et l’ensemble des autorités sanitaires se disent encore « très interrogatifs » sur la notion de « guérison ». Il est vrai que dans plusieurs pays du monde, la Chine notamment, des patients considérés comme guéris auraient vu leur état se dégrader de nouveau. Sans que l’on sache avec certitude s’il s’agit d’une « réinfection » ou d’une résurgence du virus qui n’aurait pas complètement disparu de l’organisme.

Une nouvelle doctrine pour les fins d’isolement

D’autres part, les tests de dépistage ne sont pas un juge de paix infaillible en matière de guérison. Ceux qui sont pratiqués en Polynésie, comme partout dans le monde, ont pour but de repérer des traces génétiques du coronavirus au fond de la gorge des patients. Or, comme l’explique Jacques Raynal, un test peut repérer des traces de « particules virales » inertes. Certains patients, au fenua, pourraient donc avoir été testés « positif », lors des tests de vérification, alors qu’ils ne sont plus malades ou contagieux. « C’est un nouveau virus, et on ne sait pas exactement quel est son comportement et celui des défenses immunitaires », rappelle le ministre de la Santé.

Alors que le Pays expliquait jusqu’à maintenant qu’un ancien malade devait subir deux dépistage négatifs pour être « libéré » de son isolement, la décision des autorités se baserait désormais sur un critère plus arithmétique : « aucun signe de maladie depuis 14 jours », répète le ministre. Une solution retenue par plusieurs pays, comme la France, qui ne teste pas systématiquement les malades à leur sortie de l’hôpital. Preuve que la doctrine est en pleine évolution en Polynésie, Jacques Raynal assure tout de même que « si quelqu’un a des analyses positives on le laissera pas sortir ».

« Prudence », donc, répète le ministre. Mais il faudra bien que les anciens malades de Polynésie reprennent une vie normale, sans être indéfiniment suspectés par leur entourage d’être vecteurs de maladie. Si elle est difficile à affirmer scientifiquement, la guérison du coronavirus existe bel et bien dans les faits. En France, en Italie ou en Chine, des milliers de personnes ont repris le cours normal de leur activité, sans mettre en danger les autres. « Il est très probable qu’on ne soit plus contagieux après un certain délai », insiste Jacques Raynal.

Des interrogations au niveau international

La Polynésie n’est pas la seule, loin s’en faut, à être mal à l’aise avec la notion de guérison. La plupart des pays touchés par l’épidémie décomptent seulement le nombre de malades pour lesquels le risque vital a été levé. Ainsi, ils étaient prêt de 35 000 Français, à la date du 16 avril, à être « retournés à domicile après une hospitalisation » (et pour la plupart, sans être testés), selon le ministère national de la Santé, qui ne communique plus depuis la fin février sur le nombre de « guéris ». Souvent cité dans les discussions sur le sujet, le tableau de bord de l’université Johns Hopkins, qui fait autorité en matière de données sur le coronavirus aux États-Unis, et qui est fréquemment affiché dans la salle de presse de la cellule de crise du Pays, comptabilise lui les cas « rétablis » (« recovered cases ») et non guéris. En Calédonie, 14 des 18 malades, tous isolés à l’hôpital, en sont déjà sortis après plusieurs tests. « Considérés comme guéris », ils font toutefois l’objet d’un suivi.

La question de la « guérison » se recoupe avec une autre, encore plus importante pour mettre en place les stratégies de santé publique : celle de l’immunité. Les anciens malades sont-ils systématiquement protégés d’une nouvelle infection par leur production d’anticorps ? Si c’est le cas, combien de temps dure cette protection ? Comme l’a précisé hier le président du conseil scientifique national aux parlementaires, ces questions ne sont pas tranchées. Des milliers de personnes contaminées sont actuellement suivies, pour étude, dans différents pays. Des études qui devront s’étaler sur plusieurs mois.

 

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1 Commentaire

  1. huguet
    22 avril 2020 à 14h51 — Répondre

    mais pour les gens venus de l’etranger ???? les 50 résidents polynésiens qui ont déjà subi une quarantaine de 15 jours , et qui onbt été testyé négatifs comme moi , pourquoi nous empeche t’on de rentrer dans nos iles ??? nous ne sommes pas des malades ou des anciens malades !!! nous sommes des pestiferes ???

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