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Ingrid Betancourt: "il faut que le oui l'emporte" au référendum sur la paix

Bogota (AFP) – Ingrid Betancourt, ex-otage des Farc en Colombie, se dit émue par l’accord conclu avec la guérilla, mais souligne que « tout n’est pas encore gagné », qu' »il faut que le +oui+ l’emporte » au référendum, puis que la paix s’enracine dans « une société traumatisée ».

« C’est véritablement le début de la fin de cette guerre (…) Mais outre l’émotion, il y a un constat: les accords vont au delà de ce que je pensais possible », a déclaré Mme Betancourt jeudi soir à l’AFP, en exprimant une « grande satisfaction » à propos du texte de 297 pages issu de près de quatre ans de négociations entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, Marxistes). 

Toutefois « c’est encore un papier qui reste très abstrait pour les Colombiens. Donc le premier défi c’est de le rendre concret », a-t-elle averti lors de cette interview par téléphone, estimant que le cessez-le-feu est un « premier apport » qui va « permettre aux Colombiens de sentir l’immédiateté et la puissance du silence de la guerre. »

« Tout n’est pas encore gagné. Il faut que le oui l’emporte! », a-t-elle déclaré à propos du référendum du 2 octobre sur l’accord de paix conclu le 24 août. « Mais une fois que le oui l’aura emporté, je dirais que la partie la plus difficile commence: c’est une paix qui va avoir besoin d’une dizaine d’années pour s’enraciner dans la société colombienne, qui est une société traumatisée » par 52 ans de conflit armé avec les Farc.

– ‘Un combat’ –

Pour Mme Betancourt, ex-candidate présidentielle du parti écologiste colombien séquestrée de 2002 à 2008, la consolidation de la paix « va dépendre de beaucoup de facteurs, en particulier de l’engagement des forces armées pour garantir la sécurité des Colombiens dans leur vie quotidienne, mais aussi la sécurité de ceux qui vont se démobiliser ».

« Il y a beaucoup d’intérêts à ce que cette paix signée sur le papier ne devienne pas effective: des intérêts liés au business de la guerre, les intérêts politiques de beaucoup de leaders, et puis il y a tous ceux qui (…) ont fait de la corruption leur modus operandi et leur modus vivendi. Cela va être un combat! » a estimé cette franco-colombienne, qui prépare un doctorat en théologie à Oxford. 

La consolidation de la paix dépend aussi de « l’unité des Farc », qui comptent environ 7.500 combattants armés. Selon elle, les guérilleros vont devoir « faire preuve de beaucoup de maturité pour ne pas se laisser dévoyés par des négoces sans scrupules comme cela s’est passé avec les BaCrim (gangs issus des milices paramilitaires d’extrême-droite démobilisées entre 2003 et 2006, ndlr), ni qu’ils finissent par se désintégrer en tant que force politique, au gré des ambitions de chacun ».

Il va falloir « répondre aux aspirations de la troupe des Farc qui n’est pas nécessairement appâtée par une fonction publique ou un rôle politique (…), des commandants de rang moyen qui ont pris l’habitude de vivre à leur aise avec l’argent du trafic de drogue et des séquestrations ». 

Pour Mme Betancourt, 54 ans, les futurs ex-guérilleros vont vouloir « créer des entreprises, des moyens de vivre dignes. Ils ne vont pas retourner à la misère, à un état de paysan dans l’indigence ». « C’est à nous Colombiens de créer les conditions pour qu’ils puissent accéder à un niveau de vie correct, dans la légalité (…) Mais cela implique de revoir des structures économiques et sociales pour que plus de gens accèdent à la prospérité », a-t-elle avancé.

Interrogée quant à une éventuelle réinstallation en Colombie, l’ex-otage, qui vit entre la France, l’Angleterre et les Etats-Unis où se trouve son fils, a répondu qu’elle se sent « évidemment soulagée et cela me permet de penser à un retour avec l’âme plus légère ». « Je ne dis pas non, mais je ne dis pas oui. Il y a trop de variables politiques, personnelles, familiales. Mais c’est vrai que le fait qu’il y ait la paix en Colombie, ça ouvre la voie », a-t-elle conclu.

Ingrid Betancourt, ex-otage des Farc, lors d'un forum sur la réconciliation, le 5 mai 2016 à Bogota, en Colombie. © AFP

© AFP/Archives LUIS ACOSTA
Ingrid Betancourt, ex-otage des Farc, lors d’un forum sur la réconciliation, le 5 mai 2016 à Bogota, en Colombie

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