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Islande: la droite résiste aux Pirates, place aux négociations

Reykjavik (AFP) – L’Islande est entrée dimanche dans une phase d’intenses marchandages politiques au lendemain de législatives anticipées qui n’ont pas dessiné de majorité, malgré la percée des Pirates face à la droite gouvernementale.

Petite île de l’Atlantique nord émergeant du marasme grâce à son tourisme florissant, l’Islande apparaît divisée entre une frange de la population aspirant à tourner la page de la crise financière de 2008 et des « affaires », et une autre avant tout soucieuse de stabilité et d’indépendance.

Le scrutin assure 29 sièges sur 63 à la coalition de centre-droit sortante, contre 27 sièges aux Pirates et leurs alliés de centre-gauche, selon des résultats définitifs proclamés dimanche matin.

Avec sept mandats, le parti centriste Résurrection, créé au printemps par des députés pro-européens dissidents du Parti de l’indépendance, pourrait s’imposer comme l’arbitre surprise de cette élection.

« Il se montre ouvert à travailler avec la droite ou la gauche » mais dans l’hypothèse d’une négociation avec le Parti de l’indépendance, « il posera ses conditions », pronostique Gretar Eytorsson, professeur de sciences politiques à l’Université d’Akureyri.

Le président de Résurrection (ou parti de la réforme), Benedikt Johannesson, devrait de fait chèrement monnayer son soutien. Il s’est bien gardé samedi soir de faire connaître sa préférence.

« Nous n’avons pas critiqué les autres partis (pendant la campagne des législatives) et ne nous sommes pas exprimés sur la couleur du futur gouvernement », a-t-il prudemment déclaré.

L’élection à un tour convoquée avant la fin de la mandature du fait de la démission du Premier ministre Sigmundur David Gunnlaugsson (Parti du progrès), seul chef de gouvernement au monde victime des Panama Papers, est un succès en demi-teinte pour le Parti pirate qui avait juré « d’écrire l’Histoire ».

Avec neuf élus à l’Althingi, le Parlement monocaméral, il triple son score de 2013 et devient la deuxième formation politique du pays, à parité avec le mouvement Gauche-Verts. Mais il n’atteint pas les 12 députés prévus par les sondeurs et échoue à sécuriser la majorité absolue avec ses alliés.

« Ce qu’on pouvait supposer s’est produit: les jeunes électeurs ne se sont pas déplacés » alors qu’ils constituent le coeur de cible des Pirates, analyse Gretar Eytorsson.

Birgitta Jonsdottir, la capitaine des Pirates, devait donner une conférence de presse à Reykjavik à 15H00 GMT. « Nous sommes très satisfaits », a-t-elle réagi samedi soir, comparant ses supporters et militants à des « Robin des Bois » déterminés à « prendre le pouvoir aux puissants pour le donner au peuple ».

– Démission du Premier ministre? –

Attelage hétéroclite de hackers, militants écolos et libertaires créé en 2012, les « Piratar » semblaient pourtant avoir fait le plus dur en scellant un accord de coalition avant l’élection avec trois partis de l’opposition de gauche et du centre.

Si le mouvement Gauche-Verts obtient 10 sièges, trois de plus qu’en 2013, les sociaux-démocrate en perdent six pour descendre à trois mandats tandis que les centristes d’Avenir radieux n’en conservent que quatre sur six.

Côté majorité sortante, le Parti de l’indépendance, soutenu par les investisseurs, les gros patrons-pêcheurs, les seniors et les eurosceptiques, sort en tête avec 21 sièges (+2). Un score inattendu et cependant insuffisant pour contrebalancer la déroute de son partenaire, le Parti du progrès qui ne compte plus que 8 députés (-11).

Son président, le Premier ministre Sigurdur Johannsson, pourrait remettre dès dimanche sa démission au président de la République Gudni Johannesson.

Comme le veut la tradition, ce dernier devrait d’abord se tourner vers le chef de file du parti arrivé en tête pour lui demander de trouver une majorité. Ce mandat reviendrait au président du Parti de l’indépendance, Bjarni Benediktsson, par ailleurs ministre des Finances.

Outre Résurrection, rien n’interdit M. Benediktsson de sonder d’autres partis de la gauche et du centre.

Les Pirates, qui n’ont de cesse de dénoncer la corruption et le népotisme des partis de centre-droit qui gouvernent quasiment sans interruption depuis 1944, ont fermé la porte à ce scénario.

M. Benediktsson compte en effet parmi les 600 Islandais dont le nom apparaît sur les listes des Panama Papers, ces documents dévoilés en avril qui recensent des milliers de détenteurs de comptes offshore dans le monde.

Pour Gretar Eytorsson, un ticket Gauche-Verts n’est en revanche pas impossible, les deux formations se retrouvant dans leur opposition à l’Union européenne. Il leur manquerait un seul député pour obtenir la majorité absolue.

Birgitta Jonsdottir du parti Pirate participe à un débat à Reykjavik, en Islande, le 24 octobre 2016. © AFP

© AFP Halldor KOLBEINS
Birgitta Jonsdottir du parti Pirate participe à un débat à Reykjavik, en Islande, le 24 octobre 2016

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