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Jacques Deane ou la vengeance de l’éconduit

Jacques Deane, premier adjoint de la mairie de Arue comparaissait ce mardi au tribunal pour « propos ou comportements à connotation sexuelles imposés de façon répétée du 1er août 2016 au 31 août 2017. Il a été requis contre lui huit mois de prison avec sursis. Le délibéré sera rendu le 26 novembre.

 Pour tout un chacun, « non », cela veut dire non. Pour certains, investis de fonctions leur conférant une autorité ou ayant une haute d’opinion d’eux-mêmes, « non » veut dire « oui ». C’est ce qui était reproché à Jacques Deane, dit Coco, premier adjoint de la commune de Arue.

L’homme aujourd’hui âgé 58 ans, marié et père de famille, s’était épris de la directrice des ressources humaine de la mairie de Arue, Hinarai Leboucher. Une passion non partagée. Pour preuve, des sms, 68, qu’il lui envoyait à pas d’heure, certains passé minuit. « Bonne nuit ma petite chatte », « J’ai envie de toi », « Tu feras une bonne maîtresse » etc… La destinataire, elle, tentait de le remettre à sa place. « Faut que t’arrêtes ça », « va dormir, ne dis pas n’importe quoi » etc… C’était devenu tellement oppressant qu’elle craignait de rester tard le soir à la mairie de peur qu’il ne devienne plus entreprenant, a témoigné une de ses collègues.

Des mises au point qui tombaient dans l’oreille d’un sourd, puisque l’amoureux éconduit persévérait dans l’envoi de textos, revenant à la charge de manière persistante.

D’hyper compétente, elle passe au statut d’incompétente

Si au début, il n’avait qu’à se louer du travail effectué par la DRH qui menait à bien des dossiers épineux, notamment sur l’intégration dans la fonction publique communale des employés de la mairie, ne tarissant pas d’éloges sur son travail et son efficacité, du jour au lendemain les louanges ont laissé place à des critiques acerbes. « Autoritaire, incompétente, …» il la dénigre publiquement et en coulisse soutient les rares personnes, qui ont à se plaindre d’elle. « Ceux qui voulaient régler leurs comptes avec elle se sont engouffrés dans la brèche » dira un témoin.

Elle se serait fait des ennemis de par sa rigueur au travail. « Elle est pointilleuse, extrêmement travailleuse, consciencieuse et ne regarde pas ses heures, » dira d’elle Phillip Schyle le maire de Arue. De quoi se faire pas mal d’ennemis dans le monde du travail.

Des témoins sans témoignage

Parmi ceux-ci, le président de la Cosac à Arue à l’origine d’une pétition contre elle, pétition qui circulait dans les couloirs de la mairie. Cité à la barre avec d’autres témoins censés être à décharge de Jacques Deane, celui-ci dira, « J’ai rien à voir la-dedans, j’ai pris ma retraite. » Tout au plus dira-t-il avoir été contacté par un employé qui avait à se plaindre de la DRH. « C’est de l’histoire ancienne, j’ai rien à voir avec la Cosac » dira l’employé en question.

Quant aux autres témoins censés intervenir pour Jacques Deane, l’un dira avoir entendu parler « d’une histoire avec la DRH». « Radio cocotier » dit le juge, « oui » répond le témoin.

Témoin à charge : Phillip Schyle

Le seul à s’exprimer véritablement, et pas pour blanchir Jacques Deane, sera Phillip Schyle, le maire de la commune. Il explique avoir été surpris par les paroles peu amènes de son premier adjoint envers la DRH, alors qu’auparavant, « il vantait son travail, me proposant même de lui adjoindre une personne en plus car elle avait une grosse charge de travail. »

Ce sont des mails qu’il recevait de Jacques Deane, la dénigrant, qui ont fini par mettre la puce à l’oreille du premier magistrat de la commune. « Je me suis demandé s’il n’y avait pas quelque chose de personnel derrière ces attaques », d’autant que lui aussi tenait en forte estime le travail de la DRH.

C’est fort de cette conviction, qu’il s’est rendu dans le bureau de la DRH pour la questionner. « Quand j’ai débarqué dans son bureau, lui demandant ce qui se passait, elle a tout d’abord dit que tout allait bien. Mais à force d’insister, elle m’a dit que Deane la harcelait. »

Son premier réflexe a été de ne pas croire ce qu’elle disait. « Je connais Jacques depuis 29 ans, et jamais je n’ai entendu quoique ce soit à son sujet. Il est certes un peu obstiné et buté quelquefois, mais c’est quelqu’un de loyal. » Ce n’est qu’à la vue des sms envoyés par son adjoint que Phillip Schyle  s’est aperçu que « les faits étaient avérés. »

Selon le maire, la victime n’a pas voulu que les faits soient révélés car elle craignait l’impulsivité de Jacques Deane. Malgré des tentatives de se faire rencontrer les deux protagonistes, « Deane n’a jamais donné suite. » Idem pour qu’il lui fasse un rapport sur les « éventuels » manquements professionnels de la supposée incompétente. En conséquence et au vu des sms et mails, le maire a pris un arrêté retirant toutes les délégations à son premier adjoint.

Il nie les faits

À la barre, le premier adjoint nie les faits.  Pour lui, il se serait laissé emporter par les sentiments qu’il éprouvait pour elle. Ses sms n’étaient « ni violents, ni agressifs, ni sexuel », ajoutant  « je lui ai déclaré mon amour, mais ce n’était pas réciproque. Au travail, j’ai arrêté de lui faire la bise. (…) Je n’ai jamais essayé d’abuser d’elle. ».

Un témoin dira avoir remarqué, « qu’il était jaloux quand elle parlait à des collègues masculins », et « avoir surpris des regards pervers et entendu des remarques déplacées. » Selon Jacques Deane, si elle a déposé plainte à son encontre en août 2017, « c’est parce que je lui faisais des remontrances sur son travail (…) elle n’arrivait pas à assurer la bonne marche de son service et les dépenses de fonctionnement augmentaient, et elle pratiquait du harcèlement sur ses collègues. »

À la lecture de ces sms enflammés, « Ma chérie je pense à toi tout le temps » et autres « Je viens de jouer au loto et si je gagne, je t’emmène en voyage », le juge Bonifassi lui fait remarquer, «Vous êtes son supérieur hiérarchique  et vous insistez. Elle vous éconduit, et vous continuez. (…) vous avez conscience que vous êtes lourd ? ». « J’ai été dépassé par mes sentiments. » répondra l’amoureux transi.

« On a l’impression d’être face à un ado de 15 ans »

« Dépassé par mes sentiments ». C’est la phrase qu’a retenue le procureur Danielsson. « On a l’impression d’être face à un ado de 15 ans. Mais il avait 55 ans à l’époque des faits ! »À propos des sms : « En lisant ses sms, on se dit il y a pas de mal, ce sont des propos que l’ont peut tenir à sa partenaire… Sauf que ce n’est pas sa partenaire ! Elle a manifesté à plusieurs reprises sa réprobation. » Pour lui, l’accusé ne fait preuve « d’aucune empathie. Son comportement est inacceptable et sa victime est professionnellement détruite et psychologiquement aussi. » Il réclame à son encontre huit mois de prison avec sursis. Le délibéré sera rendu le 26 novembre.

Lire aussi : https://www.radio1.pf/harcelement-sexuel-et-moral-a-la-mairie-de-arue/

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2 Commentaires

  1. COROSOL
    13 novembre 2019 à 11h15 — Répondre

    Si ça pouvait servir d’exemple à d’autres, qui se croient tout permis. Mesdames, si cela vous arrive, dénoncez les faits publiquement, pour leur faire honte à ces gros lourds.

  2. MATA
    13 novembre 2019 à 14h23 — Répondre

    Et il ose crier au complot. Les faits sont là vieux pervers. La réaction normale d’une institution digne de ce nom aurait été la démission d’office de cette personne mais en polynésie tout est relatif…un bel avenir pour les pervers investit d’une autorité. Que les polynésiens retiennent ce nom coco deane qui est assimilé à pervers et honte.

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