ACTUS LOCALES

Lavilliers à To’ata : la master class d’un indémodable

Bernard Lavilliers a offert à son public polynésien un concert mémorable, jeudi soir à To’ata. En vingt titres, entouré de six musiciens aussi talentueux que lui, il a fait la preuve qu’il reste un auteur percutant, un compositeur accompli, un artiste qui aime son public, un « bonhomme », comme on dit. Indémodable.

Bernard Lavilliers, c’est ce que la chanson française a de meilleur à offrir : un artiste engagé, ciseleur de textes qui capturent les grands sujets de société, un musicien ouvert aux sonorités du monde, tout particulièrement celles de l’Amérique du Sud et de la Jamaïque, sans jamais perdre son estampille « rock », un chef de bande qui sait s’entourer, et qui compose depuis plus de 50 ans des tubes inoxydables dont l’écho porte bien au-delà de sa propre génération.

Jeudi soir, convié par SA Productions, le public polynésien, déjà fan ou en découverte d’un homme façonné par son amour des poètes, son goût pour les voyages et les gens, son indignation face aux maux de la société, a eu droit à une master class. Un concert d’une grande qualité technique, minutieusement réglé – les techniciens de To’ata s’en souviendront -, offert par des musiciens en maîtrise totale qui ne boudent pas leur plaisir.  Lavilliers, lui, conserve sa chaleureuse voix de baryton.  À force de voyager, cet homme-là est partout chez lui et partage cet amour du lointain ; il l’a d’ailleurs dit : « Je suis venu ici parce que c’est loin, et vous aurez l’impression de voyager avec moi. »

©©Maëva Laux Photograφ

Et le personnage – éternel jean en cuir, anneau style Corto Maltese à l’oreille, gestuelle du boxeur qu’il a été – n’a guère tardé à faire lever les spectateurs sagement assis qui se sont rapproché de la scène pour pour partager un voyage musical du Brésil à Beyrouth, de l’Afrique du Sud à New York. Les plus grands succès de Lavilliers, On The Road Again, Noir et blanc,  Idées noires, Stand The Ghetto ont résonné sur la place To’ata, bien sûr. Mais aussi plusieurs titres de son dernier album, Sous un soleil énorme, et notamment Beautiful Days, critique de la politique récente : « Il y en a plein qui ont voté Macron chez vous, je sais. Tant pis pour vous, » a-t-il asséné en intro.

©Maëva Laux Photograφ

Il n’a pas non plus dérogé à son habitude de descendre dans le public : accompagné de son trompettiste et de son saxophoniste, Lavilliers a tracé droit dans la fosse avant de monter dans la grande tribune, pour le plus grand plaisir des fans les plus éloignés de la scène.

©Maëva Laux Photograφ

Après le concert, le public était conquis : « ça fait chaud au coeur », disait un spectateur en sortant. Et ceux d’entre eux qui sont eux-mêmes musiciens étaient les plus impressionnés. « Je l’avais vu en 1979, il n’a pas beaucoup changé. C’est vrai que ses paroles évoquent un contexte très différent du nôtre, mais ça n’empêche qu’on fredonne toutes ses chansons avec lui, disait Jean-Christophe Bouissou qui est allé saluer l’artiste. Les musiciens sont extraordinaires ! C’est que du bonheur, surtout quand on en a été privé durant deux ans. » Tapu, lui, était émerveillé : « Le niveau des musiciens ! oh làlàlà ! La syncro, la symbiose, le level, c’était incroyable ! » Frédéric Rossoni, professeur et chef d’orchestre au Conservatoire artistique, qualifiait le concert de « magnifique. ça fait très longtemps que je n’ai pas entendu un concert de cette qualité – son, arrangements, musiciens, spectacle…- et je connais la musique ! »

Bernard Lavilliers sait que le public tahitien ne le connait pas forcément bien : « Je joue avec le public. s’il ne veut pas jouer, il ne joue pas. Le boulot que je fais, je chante des choses un peu bizarres, non ? Le public, il faut que je le mette en condition d’écouter, qu’il soit en confiance, même si je peux le provoquer comme ça, juste pour rigoler. Mais si tu joues avec le public, même si tu lui dis des horreurs, c’est pas grave ! « 

©Maëva Laux Photograφ

 

 

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