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Le Carnaval de Rio sur les starting blocks pour oublier la crise

Rio de Janeiro (AFP) – Six mois après les Jeux Olympiques, Rio de Janeiro s’apprête à revivre des jours de fête avec le carnaval, l’occasion d’oublier un peu la crise économique, la violence et la corruption au rythme endiablé de la samba.

Le coup d’envoi officiel sera donné vendredi en fin d’après-midi, avec la remise symbolique des clés de la ville au Roi Momo, monarque obèse et jovial qui symbolise la folie d’une des plus grandes fêtes populaires de la planète.

Premier couac: le nouveau maire, Marcello Crivella, est aux abonnés absents. Élu en octobre, ce pasteur évangélique qui goûte fort peu l’exubérance charnelle du carnaval sera remplacé lors de cette cérémonie haute en couleur par son premier adjoint.

La remise des clés aura lieu au Sambodrome, grand stade en forme d’avenue entourée de gradins, où 70.000 personnes se presseront quatre jours durant pour assister aux défilés des écoles de Samba.

« Le carnaval est bien plus qu’une fête. Il nous aide à sublimer pendant quelques jours les problèmes de la vie. C’est d’autant plus important en temps de crise, ça permet de réunir dans la rue un pays déchiré par des égalités de toutes sortes », explique à l’AFP l’humoriste Gregorio Duvivier.

– Roi Soleil et austérité –

Cette volonté de laisser de côté les soucis du quotidien n’empêche pas une certaine dose d’engagement politique.

L’école de samba Imperatriz Leopoldinense a choisi pour thème de son défilé la défense les tribus indiennes du Xingu, menacées par l’appétit vorace des grands pontes de l’agro-business.

« Je veux que tout le monde nous écoute! Nous sommes contre la déforestation et la pollution de l’eau », a scandé le légendaire cacique Raoni Metuktire présent vendredi matin dans le complexe de hangars géants où les écoles de samba préparent les chars et les costumes du carnaval.

Le chef indien de 86 ans, connu dans le monde entier pour arborer un grand plateau labial, s’est aussi insurgé contre la construction d’une grande centrale hydraulique en Amazonie, critiquée de façon poétique dans les paroles de la chanson officielle d’Imperatriz.

Une autre école, Sao Clemente, qui a choisi pour sa parte pour thème la vie de Nicolas Fouquet, ancien surintendant des finances de Louis XIV accusé de détournement du trésor public.

Une référence subtile au méga-scandale de corruption Petrobras qui secoue le Brésil depuis bientôt trois ans, avec des dizaines d’hommes politiques de tous bords et de dirigeants d’entreprises sous les verrous.

L’évocation du Roi Soleil donne l’occasion de briller de mille feux, avec des chars plein de dorures représentant le château de Versailles et les jardins de Le Nôtre, mais la crise économique a obligé certaines écoles à se serrer la ceinture.

« Le maître mot, c’est l’austérité », martèle Luiz Carlos Magalhaes, président de Portela, formation la plus titrée de l’histoire. Beaucoup misent sur la débrouille, en recyclant des matériaux utilisés les années précédentes.

– Préservatifs gratuits –

La crise atteint aussi de plein fouet le carnaval de rue, dont les premiers défilés ont déjà commencé il y a plusieurs semaines.

Selon Riotur, l’agence de tourisme municipale qui coordonne la fête populaire, 451 « blocos » – cortèges musicaux qui peuvent attirer des milliers de fêtards – vont défiler, contre 505 l’an dernier.

Cela n’empêchera certainement pas la bière de couler à flots et les spécialistes de la drague de faire fureur. Le ministère de la santé a d’ores et déjà annoncé la distribution gratuite de 77 millions de préservatifs dans tout le pays.

Hors de Rio, pas moins de 37 villes ont annulé les festivités pour des raisons financières ou de sécurité, selon des chiffres recensés par le quotidien Folha de Sao Paulo.

Dans l’État voisin d’Espirito Santo, une dizaine de localités sont privés de carnaval à cause d’une grève des policiers qui a semé le chaos depuis le début du mois, avec plus de 140 morts violentes en une semaine.

Un mouvement similaire, bien que moins suivi, a eu lieu à Rio. Plus de 9.000 militaires ont tout de même été mobilisés pour renforcer la sécurité, mais ils ont été rappelés jeudi, à la veille du carnaval, les autorités assurant que la situation était « totalement sous contrôle ».

© AFP Yasuyoshi Chiba
Le légendaire chef indien Raoni Metuktire invité de l’école de samba Imperatriz Leopoldinense qui a choisi pour thème de son défilé la défense les tribus indiennes du Xingu, le 24 février 2017 à Rio de Janeiro

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