INTERNATIONAL

Le Pakistan enterre Edhi, figure de la lutte antipauvreté

Karachi (AFP) – Les Pakistanais ont rendu samedi un vibrant hommage à Abdul Sattar Edhi, figure immensément populaire de la lutte contre la pauvreté décédée la veille, lors de funérailles d’Etat à Karachi.

Edhi, fondateur d’un vaste empire caritatif comprenant des centaines d’ambulances, des orphelinats et des dispensaires, est décédé vendredi à l’âge de 92 ans des suites d’une insuffisance rénale, selon son fils Faisal Edhi.

Le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif avait aussitôt annoncé une journée de deuil national et des funérailles d’Etat en l’honneur de cet ascète peu éduqué, plusieurs fois proposé pour le prix Nobel de la paix.

Une foule immense s’est rassemblée samedi en début d’après-midi dans un stade de cricket de Karachi pour assister à la cérémonie funèbre.

Le président pakistanais Mamnoon Hussain, le puissant chef de l’état-major, le général Raheel Sharif, ainsi que de nombreuses autres personnalités y ont participé. Le Premier ministre Nawaz Sharif était pour sa part absent pour des raisons de santé.

Quelque 3.000 agents de la circulation et policiers avaient été mobilisés pour assurer la sécurité de cet événement auquel étaient attendues des dizaines de milliers de personnes.

Une jeep militaire a amené dans le stade le cercueil d’Edhi, enveloppé dans le drapeau vert et blanc du Pakistan et couvert de pétales de rose, où il a reçu les hommages d’une garde d’honneur en uniforme.

La dépouille a ensuite été transportée dans son village à l’extérieur de la ville pour y être enterrée. Edhi lui-même avait déjà choisi l’emplacement et creusé sa tombe il y a quelque 25 ans, a indiqué son fils à l’AFP.

Le patriarche barbu était unanimement vénéré au Pakistan pour son dévouement au service des plus pauvres, en l’absence de filet social efficace dans ce pays en développement de quelque 200 millions d’habitants.

Il avait ouvert dans tout le pays des maternités, morgues, orphelinats, asiles, maisons de retraite, et surtout une flotte de 1.500 ambulances réputée pour son efficacité sur les lieux d’attentats, fréquents au Pakistan.

« Notre nation toute entière est en deuil aujourd’hui en raison du départ d’une telle personnalité. Nous avons les mêmes sentiments que lorsque (le fondateur du Pakistan) Muhammad Ali Jinnah est mort et que toute la nation est devenue orpheline », a déclaré à l’AFP un homme dans l’assistance, Rashid Awan.

« Il travaillait sans (faire de) discriminations. Je pense que ce vide ne pourra pas être comblé », a renchéri un autre participant, Shaikh Habib.

Edhi lui-même avait récemment raconté à l’AFP comment des bandits avaient tenté de le dévaliser sur une autoroute, avant de le reconnaître et de tout lui restituer en se confondant en excuses.

« Leur chef m’a dit +Je sais que seul toi me donneras un linceul et une sépulture si je suis tué par la police+ », a-t-il rapporté.

– « Cœur gigantesque » –

Enfants ou personnes âgées abandonnés, femmes battues, handicapés, drogués, 5.700 personnes vivent actuellement dans les 17 foyers de la Fondation Edhi.

Son fils Faisal en a été nommé administrateur début 2016, son père étant devenu incapable de la gérer.

« J’ai beaucoup travaillé. Je suis satisfait de ma vie », déclarait le patriarche à l’AFP en avril dernier, apparaissant très affaibli.

Malgré sa notoriété, Edhi continuait de vivre très simplement. Il avait refusé d’être soigné à l’étranger, préférant se rendre dans un hôpital gouvernemental du pays.

Désireux de donner tous ses organes à sa mort, il n’aura finalement pu offrir que ses cornées en raison de son âge avancé, a indiqué son fils. 

« Malgré tous ses succès, il est toujours demeuré humble, vivant une vie simple dans une petite maison à peine assez grande pour contenir son gigantesque cœur », a souligné le Premier ministre Nawaz Sharif dans un communiqué d’hommage.

Le Pakistan n’avait plus connu de funérailles d’Etat depuis la mort du dictateur militaire Mohammad Zia-ul Haq en 1988.

Le cercueil d'Abdul Sattar Edhi est transporté pour ses funérailles, le 9 juillet 2016 à Karachi. © AFP

© AFP RIZWAN TABASSUM
Le cercueil d’Abdul Sattar Edhi est transporté pour ses funérailles, le 9 juillet 2016 à Karachi

Article précedent

Bilan de l'Euro-2016: une fête réussie, sur le terrain et en dehors

Article suivant

L'Otan affiche son unité et sa détermination face à la Russie

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Le Pakistan enterre Edhi, figure de la lutte antipauvreté