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Les bonbonnes polluées, du service phyto au Kura Ora

La présidence a annoncé mercredi l’ouverture d’une enquête administrative sur les « négligences certaines » d’agents du Pays dans l’immersion des bonbonnes de bromure de méthyle avec le navire Kura Ora II. Si l’on sait aujourd’hui que les bonbonnes provenaient d’un stock dont souhaitait se débarrasser la direction de la biosécurité à Motu Uta, la direction de l’environnement -qui a piloté l’opération- affirme qu’elle a « autorisé uniquement l’immersion du bateau et non des bonbonnes ».

Comment des bonbonnes vides ayant contenu du bromure de méthyle ont-elles pu ressortir du Kura Ora II après son immersion vendredi ? La question est sur toutes les lèvres depuis les révélations de Polynésie la 1ère lundi sur le sujet. Mardi, l’Etat et le Pays ont publié un communiqué commun pour appeler à la « vigilance » des usagers de la mer, sans jamais évoquer l’origine de ces bonbonnes.

Mercredi, la présidence a diffusé un communiqué annonçant la décision d’Edouard Fritch de demander une « enquête administrative » pour rechercher les « responsabilités » dans cette affaire. « Les premiers constats font apparaître des négligences certaines dans le traitement de ces déchets que l’enquête devra confirmer », indique le communiqué qui conclut : « Le président est déterminé à ce que des sanctions administratives soient prises à l’égard des agents qui auraient fauté dans leur mission ».

Des bonbonnes vides de la cellule phytosanitaire de la direction de la biosécurité

Les communiqués successifs n’ont pourtant pas répondu à toutes les questions. La première concerne la provenance de ces bonbonnes de bromure de méthyle. Ce gaz est utilisé par le « département de la protection des végétaux » de la cellule phytosanitaire de la direction de la biosécurité, dans un entrepôt de Motu Uta où les colis sont « passés au four ». Expression familière qui désigne l’opération de fumigation au bromure de méthyle des fruits et légumes expédiés dans les archipels.

Radio 1 a eu confirmation mercredi que les bonbonnes immergées avec le Kura Ora II proviennent bien de cet entrepôt. Un cadre de la cellule phytosanitaire -qui ne veut pas donner son identité parce que nous n’avons pas demandé à la présidence du Pays l’autorisation de lui poser des questions- explique : « Ce sont des bouteilles vides qu’on avait depuis 15 ou 20 ans. On ne savait pas comment s’en débarrasser ».

La direction de l’Environnement n’a pas autorisé l’immersion de ces bonbonnes

La deuxième question concerne la procédure qui a conduit au placement des bonbonnes de gaz polluées sur le navire à immerger. L’opération d’immersion du Kura Ora 2, le 11 janvier, a été pilotée par la direction de l’Environnement. Le journal officiel de la Polynésie française du 15 janvier publie l’arrêté du 8 janvier « autorisant le port autonome de Papeete, représenté par la SAS Palacz, à immerger le navire Kura Ora 2 dans les eaux territoriales de la Polynésie française ».

Cet arrêté mentionne un « certificat de dépollution délivré par le cabinet d’expertise CEM-MS ». Interrogé par téléphone pour savoir s’il a vu les bonbonnes de gaz à bord du Kura Ora II lors de son inspection, le cabinet d’expertise refuse de répondre : « Toute l’opération est pilotée par la Diren (Direction de l’environnement). Adressez-vous à la Diren. L’exercice de notre profession est couvert par le secret professionnel. »

A la suite de nos sollicitations, une seule réaction officielle est parvenue à Radio 1 de la Diren : « la direction de l’environnement a autorisé uniquement l’immersion du bateau et non des bonbonnes ». La Diren ne souhaitant pas en dire davantage pendant le déroulement de l’enquête administrative. Enquête qui devra maintenant déterminer « qui » a pris l’initiative de tenter de faire disparaître ces bonbonnes polluées dans le Kura Ora II, en dehors de toute préoccupation environnementale.

Un produit toxique interdit en Europe

Dernière question, concernant la dangerosité du produit en question et le risque de pollution. Comme l’avait raconté en 2017 Tahiti Infos, le bromure de méthyle est un fongicide toxique, interdit en France et en Europe, mais toujours utilisé en Polynésie française. Il représente un danger pour ceux qui y sont exposés directement.

Mercredi, dans l’entrepôt de fumigation de Motu Uta, un employé du service, voyant passer un journaliste, murmurait un appel à l’aide : « On a peur pour notre santé. Le produit est interdit en Europe et ici on l’utilise. On est des esclaves ici ! » Le communiqué du Pays et de l’État estime lui que les bonbonnes à la dérive dans l’océan ne représentent « aucun risque pour la population dès lors qu’il n’y a pas de manipulation », même si « le gaz peut provoquer des irritations ».

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2 Commentaires

  1. Iritahua
    17 janvier 2019 à 6h19 — Répondre

    Il n’y à qu’en Polynésie que l’on voit toutes sortes de bêtises.

  2. Tata
    7 février 2019 à 13h57 — Répondre

    l’état et le territoire n’avoueront jamais que ces bonbonnes représentent un danger réel, puisqu’ils sont responsables de cette situation !!!!

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