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L'exécutif met la pression sur Alstom pour éviter un sombre scénario avant la présidentielle

Paris (AFP) – Condamnation du Premier ministre et convocation d’une réunion interministérielle lundi matin à l’Élysée: après l’annonce par Alstom de l’arrêt de la production de trains à Belfort, l’exécutif met la pression sur le groupe industriel, dont l’État est actionnaire minoritaire, alors que l’opposition s’immisce dans le débat.

« La méthode employée par Alstom est inacceptable. Nous l’avons dit cette semaine aux dirigeants d’Alstom », a déclaré le Premier ministre Manuel Valls dimanche.

Mais, a-t-il souligné, « nous avons déjà sauvé Alstom et nous pouvons encore sauver Alstom, à condition que les dirigeants jouent pleinement leur rôle ».

Une réunion interministérielle se tiendra lundi matin à l’Élysée avec, autour de François Hollande et de M. Valls, le ministre de l’Économie Michel Sapin, le secrétaire d’État à l’Industrie Christophe Sirugue et le secrétaire d’État aux Transports Alain Vidalies.

Interrogé par l’AFP, Alstom n’a pas souhaité faire de commentaire.

Le constructeur ferroviaire, confronté à une pénurie de commandes, a annoncé mercredi l’arrêt de sa production de locomotives sur son site historique de Belfort, qui sera « transféré » à Reichshoffen (Bas-Rhin) d’ici à 2018. Cette décision, qui a provoqué un choc dans la région, menace plus de 400 emplois. Alstom s’est tout de même engagé à soumettre aux salariés concernés « une proposition de transfert, s’ils le souhaitent », vers d’autres sites.

Pour l’exécutif, il est hors de question d’entériner un tel scénario à quelques mois de la présidentielle de mai 2017.

La fermeture des hauts fourneaux d’ArcelorMittal à Florange (Moselle) en 2013, vécu par les salariés comme une « trahison » de François Hollande, a marqué les esprits. 

M. Valls connaît par ailleurs les dégâts que peut faire ce genre d’annonces en pleine campagne. Il était chargé de la communication au cabinet de Lionel Jospin, Premier ministre de 1997 à 2002, lorsque ce dernier avait déclaré qu’il ne fallait « pas attendre tout de l’État ou du gouvernement », à propos de milliers de suppressions d’emplois chez Michelin. 

Peu avant la présidentielle de 2002, où il avait été éliminé au premier tour, M. Jospin affirmait, devant l’usine LU d’Évry (Essonne), qu' »on ne peut pas imposer sa loi à chaque entreprise ».

– ‘Renoncement national’ –

L’opposition s’est déjà emparée de l’affaire.

« Comment l’État peut-il accepter que son coactionnaire annonce la fermeture du site sans qu’il soit au courant? », s’est ainsi étonné l’ex-chef de l’État Nicolas Sarkozy dans Le JDD. « Hollande restera comme le président du renoncement national », a-t-il ajouté.

Et pour Nathalie Kosciusko-Morizet (Les Républicains), candidate à la primaire de la droite, « l’État se réveille bien tardivement ».

Mais que peut faire l’État, qui, avec 20% des droits de vote au conseil d’administration d’Alstom, n’est qu’actionnaire minoritaire?

Pas grand-chose, selon l’ex-ministre de l’Économie Emmanuel Macron qui a déclaré à l’AFP que l’État ne peut « empêcher » la fermeture du site. Le commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici, interrogé sur France 3 dimanche, estime lui que « l’État ne peut pas à lui seul empêcher cette fermeture, mais qu’il doit avoir une parole, une action ».

La ministre de l’Environnement et de l’Energie, Ségolène Royal, a pour sa part estimé dans la soirée que puisque le groupe devait « monter en puissance sur toutes les technologies du renouvelable », il pourrait « développer » sa filière énergie renouvelable à Belfort.

« Le gouvernement doit taper fort sur la table pour obliger Alstom à revoir sa décision et éviter un désastre humain », a souhaité Olivier Kohler, délégué CFDT sur le site de Belfort. L’État, bien qu’étant actionnaire minoritaire, a selon lui « un moyen de pression important via toutes les commandes que la SNCF passe à Alstom ».

Le syndicaliste a regretté que Bercy ne se soit pas montré « assez virulent » vis-à-vis du PDG d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge, qu’il avait convoqué jeudi. 

À cette occasion, le PDG a été sermonné par MM. Sapin et Sirugue, qui lui ont imposé « une phase de négociation ».

Pour Pascal Novelin, délégué CGT d’Alstom, M. Valls « aurait dû dire +Il ne faut pas fermer le site+ plutôt que +la méthode est inacceptable+ ! Il veut nous licencier tranquillement, sans faire trop de vagues ».

Un rassemblement est prévu lundi à 19H00 devant l’Hôtel de Ville de Belfort, à l’appel de l’Union départementale CGT. « Il y a une mobilisation générale, l’opinion est indignée », selon M. Novelin. 

Une pétition pour le maintien du site, lancée par les élus locaux, avait recueilli dimanche plus de 4.000 signatures.

Le président français François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls à l'Elysée, le 11 août 2016. © AFP

© AFP/Archives PATRICK KOVARIK
Le président français François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls à l’Elysée, le 11 août 2016

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