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L'Irak lance la bataille de Mossoul, "décisive" pour vaincre l'EI

Al-Choura (Irak) (AFP) – Les forces irakiennes ont lancé lundi une offensive cruciale pour reconquérir la ville de Mossoul, dernier grand fief du groupe Etat islamique (EI) en Irak, un tournant « décisif » dans la guerre contre les jihadistes.

Dès les premières heures de la matinée, des colonnes de véhicules blindés de l’armée irakienne chargés de soldats sont parties vers les lignes de front, a constaté un photographe de l’AFP présent au sud de Mossoul, dans la localité d’Al-Choura.

Cette bataille qui s’annonce âpre et de longue haleine fait craindre un désastre humanitaire pour les quelque 1,5 million d’habitants vivant encore dans la deuxième ville d’Irak.

« Les familles sont exposées à un risque extrême d’être prises entre deux feux » ou d’être utilisées comme boucliers humains par les jihadistes, a mis en garde l’ONU.

C’est par une allocution officielle prononcée en pleine nuit à la télévision que le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a annoncé le lancement de cette bataille qui se prépare depuis des mois, avec le soutien d’une coalition internationale antijihadistes composée de 60 pays selon les Etats-Unis, qui la dirigent.

– Longue et complexe –

Quelque 30.000 forces fédérales irakiennes –armée, police, contre-terrorisme– sont impliquées. Les combats pourraient durer « des semaines voire plus », selon la coalition internationale.

Située dans le nord de l’Irak sur les bords du fleuve Tigre et peuplée majoritairement de musulmans sunnites, Mossoul était tombée aux mains de l’EI en juin 2014.

C’est là que le leader de l’EI, Abou Bakr al-Baghdadi, avait publiquement proclamé en 2014 un « califat » sur des territoires conquis de manière éclair par les jihadistes en Irak et en Syrie. 

Fort de ses succès, le groupe extrémiste avait alors inspiré ou préparé des attaques meurtrières notamment au Moyen-Orient, en Europe et en Afrique.

Il a depuis perdu une large partie de ces territoires –16% rien que cette année selon le groupe d’analyse de défense américain IHS.

Le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a estimé que la bataille de Mossoul était « un moment décisif dans (la) campagne pour infliger à l’EI une défaite durable ».

L’opération militaire devrait dans un premier temps consister à traverser les lignes jihadistes pour gagner les abords de la ville avant un encerclement puis de violents combats de rues.

– Craintes d’attentats suicide –

Lourdement armés, les jihadistes qui seraient entre 3.000 et 4.500 (bien 3.000 à 4.500) dans la ville, selon des estimations américaines, pourraient avoir recours à des attentats à la bombe, des mines et des incendies voire des boucliers humains pour ralentir leurs ennemis.

Bagdad et plusieurs localités d’Irak ont été secouées ces derniers jours par des attentats à la bombe, certains revendiqués par l’EI, qui ont fait près de 60 morts. Le dernier en date, qui a eu lieu lundi au sud de Bagdad, a tué dix personnes.

Le Premier ministre irakien a précisé que seules l’armée et la police entreraient dans Mossoul, alors que de nombreuses forces sont impliquées dans l’offensive.

Les sunnites, minoritaires dans un Irak majoritairement chiite, craignent l’entrée dans la ville des puissantes milices paramilitaires chiites du Hachd al-Chaabi, soutenues par l’Iran, et accusées d’exactions contre les civils sunnites dans le passé.

De leur côté, environ 4.000 combattants kurdes irakiens progressaient lundi en direction de villages tenus par des jihadistes à l’est de Mossoul. Les peshmergas ont réussi à reprendre plusieurs localités et se trouvaient à proximité de Qaraqosh, une ville dont les chrétiens avaient été chassés par l’EI en 2014.

Les Kurdes procèdent à des tirs d’artillerie et de roquettes et sont appuyés par des raids aériens de la coalition internationale pour préparer leur avancée, a constaté un correspondant de l’AFP qui les suit dans cette région, près du village de Khazir.

La coalition internationale soutient la bataille de Mossoul principalement par des frappes aériennes. 

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé lundi qu’il était « hors de question » que la Turquie reste en dehors de l’opération », même si M. Abadi a exigé à plusieurs reprises le retrait des troupes turques d’Irak et rejeté leur participation à la reprise de Mossoul.

– « Couloirs sécurisés » –

L’armée irakienne a largué par les airs des milliers de tracts sur Mossoul pour donner des consignes de sécurité aux habitants.

Mais les ONG Save the Children et le Conseil norvégien pour les réfugiés ont appelé à la mise en place de « couloirs sécurisés » pour que les populations ne restent pas coincées sous les bombes, sans nourriture ni soins. Environ 500.000 enfants sont menacés par les combats, selon Save the Children.

Avant le début de l’opération, le président russe Vladimir Poutine a invité la coalition internationale à faire le maximum pour éviter des victimes civiles.

Ces déclarations interviennent alors que les Occidentaux accusent la Russie de commettre des « crimes de guerre » en bombardant les civils d’Alep-est, la partie de la grande ville du nord de la Syrie contrôlée par les rebelles.

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, dont le pays frappé par de sanglants attentats de l’EI est membre de la coalition internationale, a appelé à préparer les suites politiques d’une éventuelle reconquête de Mossoul.

« Il faut qu’avec l’Irak soit discutés les termes d’une gestion politique inclusive » afin de non seulement « gagner la guerre mais aussi gagner la paix », a-t-il souligné.

Les forces irakiennes déployées au sud de Mossoul, le 17 octobre 2016. © AFP

© AFP AHMAD AL-RUBAYE
Les forces irakiennes déployées au sud de Mossoul, le 17 octobre 2016

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