INTERNATIONAL

L'Islande, toujours méfiante envers l'UE, élit son président

Reykjavik (AFP) – Les Islandais devraient porter samedi un universitaire sans étiquette à la présidence de la République, dont la modération semble séduire ce pays secoué par le scandale des « Panama Papers », toujours méfiant vis-à-vis de l’Union européenne et davantage passionné par l’Euro-2016.

Pour ce vote à un tour dans ce petit pays de 330.000 habitants, les sondeurs donnaient, depuis l’officialisation de sa candidature, une avance très confortable à Gudni Johannesson. Cet universitaire un peu terne de 47 ans briguait son premier mandat électif

Il a voté samedi matin dans une école de la capitale Reykjavik, accompagné de son épouse, l’historienne canadienne Eliza Reid, et leurs quatre jeunes enfants.

Il n’a décidé de se présenter qu’après le scandale des « Panama Papers » qui a révélé en avril qu’un nombre impressionnant d’Islandais détenaient un coffre dans des paradis fiscaux. Parmi eux, le Premier ministre Sigmundur David Gunnlaugsson, poussé à la démission par la rue.

Interrogé par un correspondant de l’AFP sur ses intentions s’il est élu, M. Johannesson a répondu: « La première chose, le plus important, c’est de me rendre en France lundi pour voir l’Islande jouer contre l’Angleterre » en huitième finale de l’Euro-2016.

Pour ce scrutin qui n’a que peu d’enjeu, du fait du caractère largement protocolaire de la fonction présidentielle, M. Johannesson l’emporterait avec 44,6% des suffrages devant une femme d’affaires, Mme Halla Tomasdottir, créditée de 18,6% des intentions de vote, selon une enquête Gallup publiée vendredi pour la chaîne de télévision RUV.
 

– Excès de la finance –

Mme Tomasdottir devancerait l’ancien Premier ministre et ex-gouverneur de la Banque centrale, David Oddsson. À 68 ans, ce dernier reste associé aux excès de la finance qui ont conduit à la spectaculaire crise de 2008.

« Je me raccroche à l’idée que j’ai des électeurs cachés », a déclaré à l’AFP un David Oddsson d’humeur malgré tout badine en passant dans l’isoloir.

Comme Elin Jonsdottir, une commerçante de 62 ans, ses partisans protestent qu’il est « le seul candidat bénéficiant du savoir et de l’expérience » indispensables à l’exercice de la fonction présidentielle.

Pour ses détracteurs au contraire, il incarne un chapitre refermé de leur histoire alors que « Gudni représente les temps nouveaux », résumait Jon Gudmundsson, un employé de 43 ans.

Le programme de M. Johannesson: moderniser les institutions, entre autres en permettant des référendums d’initiative populaire.

« Je m’efforcerai d’être non politique dans le champ politique », avance-t-il. Une neutralité apparente qui séduit les Islandais, de plus en plus défiants vis-à-vis de la classe politique traditionnelle.

La presse s’est parfois agacée des réponses sibyllines du candidat. « M. Johannesson n’est pas parvenu à orienter le débat vers le présent et l’avenir, peut-être en raison de sa formation d’historien », ironisait samedi le journal Frettabladid, proche du centre-gauche.

Après des tergiversations, le président sortant Olafur Ragnar Grimsson a renoncé, à 73 ans, à briguer un sixième mandat.

– Le Brexit, chance pour l’Islande? –

Le Brexit a éclipsé la fin de la campagne. Comme la majorité des électeurs, le probable futur président est hostile à une adhésion de l’Islande à l’Union européenne.

Le divorce entre Royaume-Uni et UE « change beaucoup de choses dans le bon sens pour les Islandais » en bouleversant la géopolitique de l’Atlantique-Nord, a réagi vendredi soir M. Johannesson.

En 2015, l’Islande avait retiré sa candidature, déposée en 2009, après des négociations peu fructueuses et le retour aux affaires du centre-droit, eurosceptique.

Et pour le ministre des Finances et patron du parti de l’Indépendance, Bjarni Benediktsson, la sortie du Royaume-Uni de l’UE éloigne un peu plus la perspective d’un rapprochement entre Reykjavik et Bruxelles. Le Brexit « oblige l’Europe à repenser les termes de sa coopération », a-t-il relevé, cité par le quotidien Morgunbladid.

La présidentielle se tient dans une atmosphère d’euphorie nationale. Avec un tourisme florissant, l’économie se porte à merveille, offrant plein emploi et hausse du pouvoir d’achat.

Les Islandais se passionnent plus pour l’Euro-2016, à trois jours du huitième de finale de l’Islande contre l’Angleterre à Nice.

La petite île de l’Atlantique nord s’est prise de fièvre pour ce tournoi où ses « Vikings » effectuent un parcours historique. Entre 10.000 et 20.000 Islandais ont fait le déplacement en France, un chiffre spectaculaire pour un pays si peu peuplé.

La participation a été pourtant meilleure que lors de la dernière élection en 2012. Les footballeurs ont pu voter, avec un bureau installé à Annecy, en France, où ils résident.

Les médias locaux racontaient aussi l’histoire d’autres citoyens consciencieux, Heiddis Haukdal Reynisdottir et Sigurdur Mar Hannesson, qui se sont rendus à l’isoloir en robe et costume de mariés.

Plus de 245.000 Islandais étaient appelés aux urnes. Les premières estimations sont attendues juste après la fermeture des derniers bureaux à 22h00 GMT.

Gudni Johannesson, candidat à l'élection présidentielle en Islande, vote  à Reykjavik le 25 juin 2016. © AFP

© AFP HALLDOR KOLBEINS
Gudni Johannesson, candidat à l’élection présidentielle en Islande, vote à Reykjavik le 25 juin 2016

Article précedent

Rugby: la France s'offre une victoire prometteuse en Argentine

Article suivant

Somalie: 11 civils tués dans une attaque shebab contre un hôtel de Mogadiscio

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

L'Islande, toujours méfiante envers l'UE, élit son président