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Musulmans de France: une majorité de laïcs, plus d'un quart de rigoristes, selon un sondage

Paris (AFP) – Qui sont les musulmans de France? Une majorité partage les valeurs laïques françaises mais plus d’un quart d’entre eux, surreprésentés chez les jeunes, ont une pratique rigoriste de l’islam, selon un sondage publié dimanche.

Réalisée alors que la vague d’attentats jihadistes depuis 2015 et l’approche de la présidentielle enflamment les débats sur la place de l’islam, cette enquête « inédite » de l’Ifop sert de base à une étude de l’Institut Montaigne, « think tank » d’obédience libérale, publiée dimanche par le JDD et transmise à l’AFP.

L’Ifop a distingué trois grands groupes, en fonction des pratiques des personnes sondées, de leur attachement à la laïcité, au port du voile ou à la viande halal.

Le premier groupe, largement majoritaire avec 46%, compte des musulmans « soit totalement sécularisés, soit en train d’achever leur intégration » sans renier leur religion. Un deuxième groupe, représentant 25%, est plus pieux et plus identitaire tout en rejetant le voile intégral.

Le dernier groupe, que l’Ifop évalue à 28%, réunit des croyants qui ont « adopté un système de valeurs clairement opposé aux valeurs de la République », s’affirmant « en marge de la société ». Les jeunes, les moins insérés dans l’emploi et les convertis sont les plus disposés à adhérer à ce modèle, jusqu’à 50%.

Ce sondage a été conduit auprès de 1.029 personnes de confession ou de culture musulmane (dont 874 se déclarant musulmanes), extraites d’un échantillon de 15.459 métropolitains âgés de 15 ans et plus.

Le rapport, intitulé « Un islam français est possible », esquisse un portrait inédit des musulmans de France, parfois à rebours de certaines idées reçues, relevant par exemple que 26% des hommes rejettent le port du voile contre 18% des femmes. 

Il avance aussi qu’en France, pays qui compte la plus importante communauté musulmane d’Europe, les musulmans comptent pour 5,6% des habitants de métropole (soit entre 3 et 4 millions), soit un pourcentage « moins important que ne l’avancent bon nombre de chiffres fantaisistes », souligne en avant-propos Hakim El Karoui, ancien conseiller de Jean-Pierre Raffarin à Matignon et ex-président de l’Institut des cultures d’islam.

– Plus « halal » que « mosquée » –

Mais ils sont 10% des moins de 25 ans, « signe de la prégnance croissante de la deuxième religion du pays auprès des jeunes générations ».

Une écrasante majorité des musulmans interrogés – aux trois quarts de nationalité française – ne refusent pas la mixité, acceptant de se faire soigner par un médecin (92,5%) du sexe opposé.

Côté pratiques, deux traits saillants très largement partagés: 70% des personnes interrogées déclarent « toujours » acheter de la viande halal et 65% sont favorables au port du foulard.

La question du voile est toutefois plus clivante: 65% des femmes musulmanes ne le portent pas. Quelque 37% des personnes de culture musulmane considèrent que les jeunes filles devraient pouvoir porter le voile au collège et au lycée et 24% sont favorables au port du niqab.

La fréquentation des 2.500 mosquées est plus faible qu’on ne le pense souvent: 30% des musulmans interrogés ne s’y rendent jamais, et autant ne le font au mieux que lors des grandes célébrations du ramadan.

En résumé, « la question sociale est la priorité des musulmans interrogés, bien avant les questions religieuses ou identitaires ». Il n’y a pas de « communautarisme musulman unique et organisé ». 

Sur la base du sondage, l’Institut Montaigne formule plusieurs recommandations, comme la nomination d’un « grand imam de France » ou encore un enseignement renforcé de l’arabe à l’école publique.

Réagissant sur le Forum Radio J, Bruno Le Roux, président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale et proche de François Hollande, a souhaité « que les musulmans de France puissent vivre tranquillement leur foi en rupture avec toute intervention extérieure », jugeant « inquiétant » ce chiffre de 28% de musulmans présentés comme en marge de la société.

« 28% des musulmans de France contre nos valeurs. Et on veut encore nous faire croire au #VivreEnsemble? », a tweeté Robert Ménard, maire de Béziers proche du Front national. 

Sur son blog, le candidat à la primaire de la droite Alain Juppé a estimé que, face à ce « durcissement de la religion musulmane », il fallait bâtir « un Etat fort », combattre « les amalgames » et inciter « la majorité silencieuse des musulmans » à s’impliquer dans la construction d’un islam de France.

Autre candidat à la primaire, François Fillon a relevé au « Grand rendez-vous » Europe1/iTELE/Les Echos « une sorte de dynamique en faveur de la radicalisation », militant en faveur de « statistiques pour pouvoir avoir les moyens de traiter un sujet qui est celui de l’islam radical ».

Prière à la mosquée de Fréjus le 22 janvier 2016. © AFP

© AFP/Archives BORIS HORVAT
Prière à la mosquée de Fréjus le 22 janvier 2016

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