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Nucléaire : l’Assemblée nationale adopte le « cavalier législatif » sur le seuil de 1 millisievert

L’Assemblée nationale a adopté, vendredi, la loi portant « diverses dispositions liées à la crise sanitaire ». Un texte dans lequel a été insérée une « clarification » sur les conditions d’indemnisation des victimes du nucléaires en Polynésie. L’article en question, dénoncé sans succès par plusieurs députés dont Moetai Brotherson, vise à rendre applicable la condition d’exposition d’un millisievert à toutes les demandes, y compris celles qui avaient été formulées avant 2018.

« Les vies des Polynésiens valent mieux que cela ». Ces mots, répétés en commission spéciale de l’Assemblée nationale, puis en séance publique ce vendredi, sont prononcés par le député communiste Pierre Dharréville. Mais sont ils sont signés Moetai Brotherson. Le député polynésien, comme ses deux collègues, n’a pas pu être présent lors des travaux sur cette loi portant « diverses dispositions liées à la crise sanitaire ». Une loi « fourre-tout » qui a notamment pour but de donner au gouvernement national les moyens de prendre des décisions par ordonnance dans la gestion de la crise. Mais qui comportait un article qui intéresse au plus haut point le fenua : l’article 2 ter de la loi rend la condition d’exposition aux rayonnements d’un millisievert applicable aux demandes d’indemnisation déposées avant la fin 2018 par les victimes du nucléaire.

Cette condition avait été réintroduite dans la loi Morin le 28 décembre 2018 après la suppression de la notion de « risque négligeable » un an auparavant. Mais le Conseil d’État avait jugé, en janvier 2020 que, faute de « dispositions transitoires » dans la loi, tous les dossiers déposés devant le Civen (Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires) avant le vote de 2018 n’étaient pas concernés. Une décision célébrée comme une victoire par les associations de défense des victimes, qui dénoncent depuis de longues années toutes tentatives de restriction des indemnisations par l’État.

Un « vrai débat démocratique », la « moindre des choses »

Pour le groupe communiste, rejoint par des élus socialistes ainsi que le groupe centriste Libertés et territoires, ce petit article est donc un « stratagème qui vise à mettre fin aux maigres progrès obtenus par les associations des victimes des essais nucléaires ». Tous demandaient sa suppression. « J’ai rarement vu mon collègue Moetai Brotherson aussi en colère » a pointé Pierre Dharréville, parlant d’une disposition « qui affaiblit le droit de certaines victimes, et met du sel sur les plaies ». « La moindre des choses » aurait été un « vrai débat démocratique » en présence « des élus des territoires concernés », assène le député.

« On ne peut pas dire que les dispositions de cet article n’aient pas fait l’objet d’un débat », a répondu le député La République en marche Guillaume Kasbarian. Le rapporteur du texte a pointé, en séance, que cette réforme avait déjà été mise sur la table au Sénat il y a quelques semaines. « Le texte reprend les dispositions adoptées à l’unanimité par les sénateurs sur la proposition du Gouvernement du 3 mars 2020 », pointe-t-il, précisant « que Mme Lana Tetuanui, sénatrice de Polynésie, était présente ». Pour le gouvernement, il s’agit simplement de « préciser la pensée du législateur ». « Le Conseil d’État demande une clarification », pointe le rapporteur, jugeant cette demande « urgente ». La crise sanitaire ne permettant pas de poursuivre la navette sur le texte déjà discuté au Sénat, il a fallu trouver un autre véhicule législatif, précise, en substance, le ministre chargé des relations avec le Parlement, Marc Fesneau.

Les réserves du centriste François-Michel Lambert sur le caractère urgent du texte, ou celle du socialiste Jérôme Lambert sur sa « sécurité juridique » n’y feront rien. L’article est adopté, tout comme la loi, en première lecture. Elle devra toutefois être de nouveau débattue au Sénat dans les jours à venir.

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