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Paraplégique après un accident du travail : le Pays condamné à 1,5 million d’amende

Le 17 mars 2016, Pascal, salarié polyvalent au SDR de Moorea, faisait une chute de trois mètres alors qu’il travaillait sur le toit d’un bâtiment. Une chute qui a causé une paralysie totale de ses membres inférieurs. Ce mardi le Pays a été reconnu coupable de ce délit non intentionnel et a été condamné à une amende de 1 500 000 Fcfp. Une décision qui ouvre la porte à une indemnisation plus conséquente dans la procédure engagée devant le tribunal du travail.

 Pascal, âgé de 51 ans, travaille depuis 1983 au Service du développement rural de Moorea, où il est en charge de l’entretien des bâtiments, des véhicules et des jardins. Le 17 mars 2016, il œuvre sur le toit d’un bâtiment, posant des patchs de goudron pour colmater des fuites d’eau. Pris de malaise, il s’interrompt quelques instants et s’assoit sur une ombrière, dont une partie était en dur. Le malaise passe, il se relève fait quelque pas et de nouveau est pris d’un étourdissement. Il fait trois pas en arrière puis se rassoit sur l’ombrière qui cède sous son poids. Il fait une chute de trois mètres et tombe sur le dos. Il ne sent plus ses jambes. Évacué sur l’hôpital de Afareaitu, le diagnostic tombe. La moelle épinière est sectionnée. Pascal est paraplégique et porte plainte contre son chef de service. Une enquête est ouverte.

Lors des auditions, Pascal précisera que le bâtiment présente des fuites d’eau depuis 2009 et qu’il montait sur le toit pour réparer les fuites tous les deux ans, sans équipement adéquat. Juste son bleu de travail et des chaussures de sécurité. « On avait l’habitude de travailler sans équipement » assure-t-il aux enquêteurs, précisant, « mon chef de service me mettait la pression pour que je finisse les travaux. »

Un chef de service entendu lui aussi, qui de son coté indiquera ne jamais avoir ordonné à Pascal de monter sur le toit en son absence. Ce que niera Pascal en maintenant sa déposition, alors que des témoins expliqueront avoir bien entendu le chef de service lui préciser de ne pas travailler seul sur le toit.

Le juge d’instruction pointe la responsabilité de la Polynésie française

L’inspection du travail indiquera que l’employeur n’avait pas donné de consignes particulières ni d’équipement de sécurité. Pour l’inspecteur, « il n’y avait pas d’évaluation des risques et donc, pas de fiches de conditions d’intervention. »

Une affirmation renforcée par le témoignage du chef de service qui précisera qu’à chaque fois qu’il réclamait du matériel de sécurité à ses supérieurs, « en général on nous le refuse. »

Pour le juge d’instruction qui a remonté l’échelle des responsabilités, la Polynésie française est responsable.

Pour le procureur de la République, il n’était pas dans les fonctions de Pascal « de s’occuper d’un toit, cela devrait être donné à un prestataire extérieur. » Estimant qu’il « y a beaucoup de flou dans le management des agents », il relève cependant qu’après cet accident, « il y a eu enfin des réunions sur la prévention des risques, les agents ont eu l’interdiction de travailler en hauteur et les bûcherons du SDR ont recu des équipements adéquats. » Insistant sur le fait que le délit non intentionnel imputé à la Polynésie Française est bien constitué, il sollicite une amende de 1 500 000 Fcfp.

Du coté de l’avocat du Pays, on affirme que la Polynésie n’a jamais été informée des dysfonctionnements de ce service. Pour lui, « celui qui a failli, c’est le chef de service. »

Après en avoir délibéré le tribunal a condamné la Polynésie française à 1 500 000 Fcfp d’amende. Pour l’heure l’affaire se poursuit devant le tribunal du travail pour estimer le montant des dédommagements que Pascal devrait toucher suite à cet accident qui l’a laissé en fauteuil roulant.

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