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Plan climat : la Polynésie victime, mais aussi actrice du réchauffement


Le Pays a lancé ce lundi le chantier du Plan climat de la Polynésie Française. Énergie, transport, consommation, alimentation… Cette nouvelle feuille de route en matière de réduction des gaz à effet de serre et d’adaptation aux changements climatiques doit « toucher tous les secteurs » et impliquer « toute la société ». Car malgré les discours et objectifs passés, l’empreinte carbone du fenua s’est dégradée ces dernières années : un Polynésien produit autant de carbone qu’un métropolitain.

Trois jours de forum pour lancer un grand chantier, celui du Plan climat de la Polynésie Française (PCPF). La préparation de cette nouvelle feuille de route doit prendre un an, et le top départ a été donné aujourd’hui. Aux commandes, les ministres de l’Environnement et de l’Énergie, qui assurent que « tous les secteurs » seront concernés. Et pas seulement : que ce soit dans la phase de diagnostic, jusqu’à octobre, puis dans la mise au point de la stratégie climat et la définition des actions concrètes à mettre en place, c’est « toute la société polynésienne », des administrations aux entreprises en passant par le grand public, invité à s’exprimer sur une plateforme web dédiée,  qui doit être impliquée.

La Polynésie, « climatosensible »…

Pour poser le cadre de ce travail, le Pays a fait venir deux spécialistes des questions climatiques et insulaires : Virginie Duvat et Alexandre Magnan participent en ce début de semaine à plusieurs tables rondes du forum de lancement du PCPF. Et animeront une conférence grand public à la CCISM mercredi soir. Au menu, les prévisions alarmantes du Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, avec lequel les deux chercheurs ont collaboré. Les conséquences du changement climatique, « il y a des gens qui le voient déjà, des scientifiques qui le mesure, et ça s’accélère d’année en année », rappelle Alexandre Magnan. Une accélération qui inquiète tout particulièrement les archipels comme la Polynésie. Disparition rapide des coraux, érosion renforcée et risque de submersion sur les atolls, dégradation d’écosystème vitaux, réduction des capacités de pêche, salinisation des sols… Le fenua est un des territoires les plus « climatosensibles » du globe. Et se doter d’un plan stratégique ambitieux en matière de réduction des émissions, mais aussi d’adaptation aux conséquences déjà inévitables, revêt une importance évidente pour Virginie Duvat. À condition que le plan soit correctement suivi et appliqué :

 

… mais aussi contributrice au réchauffement

Le PCPF ne part pas d’une page blanche : il doit prendre le relais du Plan Climat-Énergie, votée pour la période 2015-2020, et dont le bilan est pour le moins mitigé. « On visait 7% de baisse des émissions de gaz à effet de serre, on a eu 7% de hausse », résume Yvonnick Raffin. Trop politique, trop centré, pas assez participatif, pas assez mis en avant après son adoption… La première feuille de route aura tout de même eu comme bénéfice de fixer, pour la première fois, des objectifs clairs, de cartographier voire mobiliser certains acteurs du climat, et d’initier des actions concrètes. Reste donc à changer de braquet… et dans le même temps de discours.

©Bilan énergie PF

Car du côté du ministère de l’Environnement, plus question de présenter la Polynésie uniquement comme une victime des changements climatiques, discours très répandu dans les petits territoires insulaires. « On peut dire qu’on est que 280 000 personnes qui occupons un espace aussi grand que l’Europe et donc que nous contribuons peu aux changements climatiques (…) mais ça n’est pas tout à fait vrai », explique Heremoana Maamaatuaiahutapu, de retour d’un sommet sur l’océan au Portugal. Car les « apports exogènes » – en clair, le poids de l’import et des transports internationaux – pèse très lourd sur l’empreinte carbone du fenua quand on le ramène à ses habitants. Chaque Polynésien produit aujourd’hui 11 tonnes d’équivalent CO2 par an… Bien au delà de la moyenne mondiale, et dans les mêmes proportions que la métropole. « Il faut que nous aussi nous prenions notre part de responsabilité et que nous trouvions aussi des solutions qui pourraient ensuite être répercutées par certains pays de la région, mais aussi pourquoi pas par des grands pays, comme la Nouvelle-Zélande ou l’Australie », pointe le ministre de l’Environnement.

Ce plan climat doit donc avoir une résonance internationale, mais devra avant tout se faire une place au fenua. Car si l’objectif de 50% de baisse des émissions de gaz à effet de serre est maintenu dans le document final, les Polynésiens devront changer beaucoup de choses à leur mode de vie. Mode de transport, mode d’habitat, déchets, consommation et alimentation… La crise Covid a, de ce point de vue, aidé à la prise de conscience des fragilités du pays, et la crise de l’inflation y participe aussi. Reste à passer au concre : « Révolutionnons nos modes de vie pour garder un futur qui soit vivable », résume Alexandre Magnin.

Les experts du Giec Virginie Duvat et Alexandre Magnan, accompagnés du référent du plan climat Baptiste Sureau, seront les invités de Radio1 pour une émission spéciale le mercredi 6 mai à 11h30.

 

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