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Procès Cahuzac: l'heure des réquisitions contre l'ancien ministre

Paris (AFP) – Des comptes en Suisse, à Singapour ou sur l’île de Man. Des montages toujours plus sophistiqués. Le parquet va demander mercredi des sanctions contre Jérôme Cahuzac, l’ex-ministre du Budget poursuivi pour avoir menti des années au fisc français.

L’ancien héraut de la lutte contre l’évasion fiscale est jugé depuis le 5 septembre pour fraude fiscale et blanchiment, ainsi que pour avoir minoré sa déclaration de patrimoine en entrant au gouvernement en 2012. Celui qui est à l’origine du plus retentissant scandale politico-financier du quinquennat encourt une peine de sept ans de prison et un million d’euros d’amende.

C’est aussi le procès d’un couple dans la tourmente, « conscient de l’illégalité » de montages toujours plus sophistiqués. Patricia et Jérôme Cahuzac ont reconnu une fraude « familiale », une plongée dans l’opacité offshore comme une fuite en avant, mais nié avoir construit « un système organisé ».

Jusqu’au bout, Jérome Cahuzac a ménagé ses effets. Prenant la parole mardi après-midi, il a affirmé n’avoir « pas menti au président les yeux dans les yeux » car François Hollande ne lui avait « jamais demandé » s’il avait « oui ou non un compte à l’étranger ». L’Elysée a démenti.

Le premier jour du procès, l’ancien ministre avait fixé une nouvelle ligne de défense. A la surprise générale, il avait déclaré avoir ouvert un premier compte à l’Union des banques suisses (UBS) de Genève en 1992 par l’intermédiaire d’un ami pour « financer les activités politiques » de feu Michel Rocard.

Une affirmation inédite et une piste écartée par les juges d’instruction mais qui explique, pour le prévenu Cahuzac, toute son aventure « folle ».

Une stratégie risquée au procès du mensonge, celui d’un homme enferré dans ses secrets et dont la « vérité » sera jugée « sur pièces », comme l’a prévenu le président de la 32e chambre correctionnelle Peimane Ghaleh-Marzban.

– ‘Opacité’ des mers du Sud –

Au fil des jours, l’ex-ministre devenu le fraudeur se faisant livrer du cash à Paris a livré ses secrets bancaires: l’ouverture dès 1993 d’un compte en son nom propre chez UBS, nom de code « Birdie ». Compte très vite géré par la banque genevoise Reyl, qui organise en 2009 le transfert de tous les avoirs — quelque 600.000 euros — à Singapour, via des sociétés offshore enregistrées au Panama et aux Seychelles.

La banque Reyl a nié toute « volonté d’opacité », assurant n’avoir répondu qu’au désir de « confidentialité accrue » de son client.

Patricia Cahuzac a décrit une fraude familiale bien rodée: « De même que je savais qu’il y avait un compte en Suisse – sur lequel j’avais procuration -, le compte à Man était pour nous deux, à nos deux noms », a dit l’ex-épouse. « On était très conscient de l’illégalité de tout cela. »

Le couple de médecins versera aussi, de 2003 à 2010, des chèques de patients de leur clinique d’implants capillaires sur les comptes de la mère du chirurgien gagné par le virus de la politique.

Cet argent a servi à acheter des appartements aux enfants, à Londres et à Paris, des tableaux, à payer de luxueuses vacances à l’île Maurice ou à La Baule. A eux deux, les Cahuzac ont subi un redressement majoré de plus de 2,5 millions d’euros.

Quand l’affaire éclate en décembre 2012, Jérôme Cahuzac, qui a « peur de tout perdre », nie. Il dira à la barre, la voix brisée, avoir « renoncé au suicide » pour « dire la vérité et en payer le prix ».   

Le ministre démissionne le 19 mars 2013, avoue le 2 avril. 

Trois ans et demi plus tard, il assume « une faute impardonnable ». Et constatait mardi: « J’ai 64 ans, ma vie politique est terminée. »

Jérôme Cahuzac à son arrivée au palais de justice le 13 septembre 2016 à Paris. © AFP

© AFP LIONEL BONAVENTURE
Jérôme Cahuzac à son arrivée au palais de justice le 13 septembre 2016 à Paris

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