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Procès Neyret: deux ans et demi de prison ferme requis contre l'ancien super flic

PARIS (AFP) – Une peine de quatre ans de prison, dont deux et demi ferme, a été requise lundi à l’encontre de l’ancien numéro 2 de la police judiciaire lyonnaise Michel Neyret, qui comparaît depuis début mai pour « corruption » devant le tribunal correctionnel de Paris.

La justice le soupçonne d’avoir fourni des informations confidentielles à des membres du milieu lyonnais, présentés comme des « indics », en échange d’avantages, de cadeaux et d’argent liquide, et d’avoir prélevé sa dîme sur des saisies de stupéfiants pour rétribuer des informateurs.

« Ce procès n’est pas celui de la PJ, mais d’une philosophie, d’un système qui est celui de Michel Neyret », a estimé dans ses réquisitions la procureure Aude Duret. « Et ce système peut se résumer ainsi: la fin justifie les moyens », a ajouté sa consoeur, la procureure Annabelle Philippe.

Poursuivi pour huit délits, Michel Neyret encourt dix ans de prison. Il a déjà effectué huit mois de détention, ce qui pourrait lui permettre de ne pas retourner derrière les barreaux, sa hantise, en bénéficiant d’un aménagement de peine, si le tribunal suit le parquet.

Durant les débats, l’ex-patron de la prestigieuse brigade antigang a reconnu s’être perdu dans la gestion de ses indics. Selon lui, les cadeaux reçus auraient été le fait d’informateurs devenus des amis qui voulaient lui « faire plaisir ». Sur les prélèvements de stupéfiants, il a assumé cette pratique pour fidéliser des indics tout en affirmant, sans convaincre, n’y avoir eu recours qu’à une seule reprise pour 300 grammes de résine de cannabis.

« Ce sont des pratiques occultes, un système pervers et délétère », a dénoncé Aude Duret. « Bien évidemment qu’un informateur est indispensable mais la question est de savoir s’il est admissible de le fidéliser par le biais d’infractions pénales. La réponse est non », a-t-elle tranché. « Il est tout à fait possible d’agir efficacement dans le cadre de la loi », a insisté la magistrate pour qui le prévenu a surtout agi pour « une satisfaction égocentrique ».

– « La réalité de la légende Neyret » –

Dans le volet corruption du dossier, Neyret s’est transformé, pour Annabelle Philippe, en « informateur policier » de ses indics. « Qu’a-t-il obtenu en retour? Rien… à l’exception d’avantages en nature, de nombreuses rétributions. »

« Dix voyages, des séjours dans la villa d’un escroc avec prêts de voitures de luxe et masseuses (…) deux montres de luxe (…) des remises d’espèces (…) et, ultime étape de la corruption, la création d’une société offshore en rétribution des services rendus », a-t-elle énuméré. 

« Est-on un grand flic quand on demande à ses subordonnés de commettre des infractions, quand on met le monde judiciaire à l’écart, quand on est le seul à définir les règles? Si c’est ça l’image d’un grand flic, il est peut-être temps de dire haut et fort la réalité de la légende Neyret », a-t-elle lancé.

Les représentantes du ministère public ont également réclamé des peines de cinq ans de prison ferme avec mandat d’arrêt à l’encontre des corrupteurs présumés de Neyret actuellement en fuite, Stéphane Alzraa et Gilles Benichou, avec 250.000 euros d’amende pour le premier et 100.000 pour le second.

Sur des écoutes lues par une procureure, les deux hommes s’amusaient d’avoir ferré l’ex-commissaire: « Il fait le beau au bord de la piscine, il se fait masser et roule en Ferrari. On l’a pour dix ans avec nous et en plus il va prendre du grade ».

Une peine de deux mois avec sursis a en outre été requise contre un autre escroc présumé, Cyril Astruc.

Contre les trois subordonnés de M. Neyret soupçonnés de l’avoir aidé en détournant des scellés de drogue, le parquet a requis du sursis: dix mois contre le commandant Gilles Guillotin, huit mois contre le commissaire Christophe Gavat et six mois contre le capitaine Jean-Paul Marty. 

Les procureures ont demandé 12 mois avec sursis contre l’épouse de M. Neyret, Nicole, pour avoir profité des largesses des « amigos » de son mari. Enfin, 10.000 euros d’amende ont été réclamés contre l’avocat lyonnais David Metaxas pour trois violations du secret de l’enquête et de l’instruction.

Le procès se termine mardi avec les plaidoiries de la défense.

L'ex-numéro deux de la PJ de Lyon, Michel Neyret, le 9 mai 2016 au tribunal correctionnel de Paris. © AFP

© AFP/Archives THOMAS SAMSON
L’ex-numéro deux de la PJ de Lyon, Michel Neyret, le 9 mai 2016 au tribunal correctionnel de Paris

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