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PSA-Opel: opportunités et défis d'une opération complexe

Paris (AFP) – L’acquisition annoncée d’Opel par PSA représente pour le constructeur français redressé une rare opportunité de croissance externe mais recèle aussi des défis industriels, sociaux et donc politiques dans un secteur automobile exposé aux cycles économiques.

Le conseil de surveillance de PSA (marques Peugeot, Citroën et DS) a donné vendredi son feu vert à cette opération qui sera officialisée lundi matin lors d’une conférence de presse à Paris, donnant naissance au deuxième constructeur de véhicules en Europe, derrière Volkswagen.

Mais une fois les voeux prononcés, il faudra faire fonctionner ce mariage avec un partenaire à la culture différente et dans le rouge depuis 16 ans, sous le regard de l’Allemagne et du Royaume-Uni, beaux-parents sourcilleux.

Les termes de la transaction n’ont pas été divulgués, en particulier son montant, les engagements en termes de retraites ou encore le devenir des brevets.

Pour le patron de PSA, Carlos Tavares, l’acquisition de la division européenne de General Motors représente l’occasion de créer un « champion européen de l’automobile ».

S’il avait déjà existé en 2016, un groupe PSA-Opel aurait produit 4,3 millions de véhicules et détenu 16% du marché européen, derrière les 24% de Volkswagen.

« Cette entreprise a besoin d’aide. Nous pensons qu’étant donné notre bilan, nous pouvons aider » à la redresser, a affirmé M. Tavares, qui a présidé depuis trois ans au spectaculaire rétablissement de PSA.

Le but, selon M. Tavares, est de faire profiter Opel des mêmes méthodes et de tirer parti d’économies d’échelle nées d’un périmètre plus large.

Le rival français de PSA, Renault, a ainsi économisé 4,3 milliards d’euros en 2015, partageant avec son partenaire Nissan les fonctions ingénierie, fabrication et logistique, achats et ressources humaines.

« L’étendue des synergies et la vitesse à laquelle nous pourrons les appliquer sont assez importantes », a assuré M. Tavares, alors que PSA et Opel coopèrent déjà en matière industrielle.

– Suppressions d’emplois? –

« Pour réduire les coûts, il faut plus de volume. Quand on n’est pas sur le segment +premium+ (haut de gamme, NDLR), tout se joue sur les coûts, d’achat notamment, qui sont un levier énorme », confirme Marc Staudenmayer, associé du cabinet de conseil en entreprises Advancy, présent en France et en Allemagne.

« Tavares est un bon rénovateur, avec les synergies réalisées, PSA et Opel pourraient avoir du succès ensemble », juge Stefan Bratzel, expert automobile allemand de l’institut CAM.

M. Tavares assure qu’Opel, qui gardera son identité allemande, sera « complémentaire » des marques actuelles de PSA, de nombreux acheteurs refusant par principe d’envisager des voitures françaises selon lui.

Les maux d’Opel sont connus: sous-utilisation des usines, ventes privilégiant des canaux peu rentables comme les loueurs, et gamme inadaptée sur fond d’image ternie et de concurrence féroce de Volkswagen.

La « cure Tavares » passera par l’emploi, prévient M. Bratzel: « il va être nécessaire de réduire les surcapacités de production ». De son côté, M. Staudenmayer estime que 5% des emplois totaux de PSA et Opel seront supprimés.

Le bilan de M. Tavares chez PSA est en effet aussi celui d’un amaigrissement des effectifs, encadré par des accords de compétitivité avec les syndicats: de 111.228 personnes en 2013 à 95.669 en 2015, selon le dernier document de référence de l’entreprise. 

Londres – en plein « Brexit » – , Berlin et Paris ont dit leur vigilance quant aux conséquences sociales de l’accord. M. Tavares leur a donné des assurances sur l’emploi à court terme, mais « ça ne (lui) coûte rien » étant donné les délais nécessaires au bouclage de l’opération, relève M. Staudenmayer.  

Une fois les législatives allemandes de septembre passées, « il est évident que Carlos Tavares aura comme premier objectif de s’attaquer à l’emploi », a mis en garde la CGT.

Le rapprochement avec PSA a également suscité l’inquiétude en Pologne où Opel possède deux usines et emploie 4.000 personnes.

L’équation PSA-Opel compte en outre une inconnue de taille: la tenue du marché automobile européen, très disputé et saturé, dont le groupe sera encore plus dépendant après l’acquisition malgré ses efforts d’internationalisation.

Après avoir presque compensé depuis 2013 ses 25% de chute dans la foulée de la crise de 2008, grâce à des vents porteurs dont PSA a reconnu avoir profité, le marché européen devrait connaître 1% de croissance en 2017, selon l’Association des constructeurs automobiles européens qui pointe de nombreux facteurs d' »incertitude ».

© AFP/Archives PHILIPPE HUGUEN
Une voiture Opel devant un modèle de PSA, le 15 février 2017

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