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"Ras-le-bol", "colère": des Niçois qui se recueillent mais se sentent "révoltés"

Nice (AFP) – Nicole Autard, une Niçoise en larmes venue samedi se recueillir sur le mémorial improvisé à la Promenade des Anglais, exprime sa « peur, son ras-le-bol », mais aussi sa « colère », à l’instar de nombreux autres habitants, 36 heures après l’attentat revendiqué par l’organisation Etat islamique.

A la mi-journée sur la Promenade, près des fleurs, des bougies, des messages de condoléances et de soutien, Nicole Autard est venue montrer « sa peine, de toutes les façons possibles ». Accompagnée de son mari – ils partagent leur temps de retraités entre le Var et Nice, leur « ville de coeur » -, cette femme mince aux cheveux courts ne peut retenir ses larmes.

« Pour l’instant, on est juste dans la peur, le ras-le-bol et la colère », explique-t-elle, encore estomaquée du mode opératoire du tueur, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, qui a envoyé un camion de 19 tonnes sur la foule, tuant 84 personnes dont dix enfants et blessant plus de 200 autres. « C’est imparable », souffle-t-elle, disant se sentir « à la merci » de ces actes difficiles à anticiper.

Bien qu’elle n’ait perdu personne dans l’attentat, elle ne peut s’empêcher de ruminer une pensée: « Je suis grand-mère, j’ai un petit-fils de dix ans », explique-t-elle. « S’il avait été avec nous, bien sûr, on l’aurait emmené voir le feu d’artifice », frémit-elle. « On habite Boulevard Grosso, on aurait été juste au mauvais endroit ».

Face à ce nouveau drame, qui suit ceux de janvier et novembre 2015, elle dit ressentir « une colère », sans savoir « contre qui la diriger ».

La colère est également très visible dans les messages déposés au début de la promenade. Parmi les bougies et les condoléances, on peut lire des « Assez de discours ! », « Marre des carnages dans nos rues ! « , « Arrêtons le massacre ! « 

– « révoltée » –

Danièle Rousseille, elle aussi, se dit « révoltée ». « On veut que ça s’arrête », explique cette retraitée, approuvée par ses deux amies ainsi qu’un autre homme, qui se joint à la conversation. Bien sûr, elle « veut rendre hommage aux victimes ». « Ils ont touché notre symbole, notre promenade, où on a appris à marcher, à faire du vélo », s’indigne-t-elle.

Mais elle se pose des questions. L’attaque était-elle évitable ? « Difficile à dire. C’est impensable qu’on puisse circuler sur la promenade » à ce moment-là, juge-t-elle. 

Un questionnement partagée par Christian Estrosi, qui a mis en cause dimanche l’Etat et le dispositif de sécurité lors du feu d’artifice. « Comment, dans une zone piétonisée, a-t-on pu laisser entrer un camion à 90 km/h ? », s’est-il interrogé dimanche. La préfecture a expliqué que le camion était monté sur le trottoir en bordure de mer, très large à cet endroit, pour éviter le barrage.

Pour Danièle Rousseille, en tout cas, la situation a un air de déjà-vu, même si « c’était bien pire à l’époque » : cette native d’Algérie avait dû tout quitter à 16 ans au moment de la guerre.

Elle craint qu' »on arrive à une guerre civile » et attribue clairement la responsabilité « aux fanatiques », à « toutes ces religions » qui « nous disent comment on doit s’habiller » sans nommer clairement l’islam.

Elle s’indigne ensuite pèle-mêle de l’ouverture récente d’une mosquée – contestée par la municipalité (LR) de Christian Estrosi, mais ouverte après une décision de justice -, des « assassins qu’on protège, alors que la victime, elle, est condamnée », ou des autorités de l’Etat – qui « viennent vous consoler » mais « ne font rien ».

« On accueille tout le monde ! », renchérit Pierrette, l’une de ses amies, visant elle clairement l’immigration, dans une ville où la candidate du Front national Marion Maréchal-le Pen a obtenu 36,09% des voix au second tour des régionales en décembre 2015.

« On a dépassé le stade où qui que ce soit peut arrêter ce qui se passe », se désespère de son côté Nicole Autard, se refusant à mettre en cause qui que ce soit.

Fleurs, bougies et messages de condoléances s'amoncellent près de la Promenade des Anglais, le 16 juillet 2016 à Nice. © AFP

© AFP GIUSEPPE CACACE
Fleurs, bougies et messages de condoléances s’amoncellent près de la Promenade des Anglais, le 16 juillet 2016 à Nice

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