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Retours de résidents, arrivées de fonctionnaires… La quatorzaine fixe le tempo

 

©Charlie Réné

Six semaines après la suspension des vols commerciaux, la Polynésie peut « raisonnablement envisager » le retour de ses résidents bloqués à l’extérieur. Des retours qui devront être étalés dans le temps, faute de capacités de quatorzaine suffisantes. C’est ce qu’a annoncé le président Édouard Fritch, qui s’est déplacé à la cellule de crise sanitaire, ce jeudi soir, pour s’exprimer sur ce sujet « sensible ». 

Pas de « faux espoirs » : dans une allocution diffusée le 7 avril, Édouard Fritch annonçait aux Polynésiens bloqués en métropole ou à l’étranger qu’ils devraient probablement attendre la fin du confinement pour rentrer chez eux. Un mois plus tard, pendant lequel le président ne s’est que peu exprimé sur ce sujet « difficile et sensible », certaines barrières semblent s’être levées. Présent pour la première fois au point presse de la cellule Covid-19, le responsable a estimé ce que le Pays pouvait « raisonnablement envisager de rapatrier ses résidents et étudiants en attente en métropole ».

Seules quelques dizaines de personnes, principalement des évacués sanitaires ont pu revenir de métropole ou de Nouvelle-Zélande depuis le 28 mars et l’arrêt du trafic commercial. Mais si le Pays à l’air décidé à passer à la vitesse supérieure, les rapatriements vont encore prendre plusieurs semaines, comme les rotations de fonctionnaires d’État. Car l’important est de « continuer à maîtriser la propagation du Covid-19 ». « Une seconde vague de contamination serait insupportable aux yeux de l’opinion et placerait, en plus, le pays et son économie en situation de faillite, insiste Édouard Fritch. C’est pour cela que nous devons être rigoureux dans le protocole sanitaire et dans le confinement ».

Un protocole sanitaire appliqué « à la lettre »

Ce « protocole sanitaire », déjà connu, a été « défini d’un commun accord avec l’État ». « Chaque passager entrant en Polynésie, qu’il soit résident, fonctionnaire, militaire sera obligatoirement testé du Covid-19 et devra présenter nécessairement un résultat négatif avant l’embarquement à Paris, répète le président. Une fois arrivé à Faa’a, il sera pris en charge dès sa descente d’avion, embarqué dans des bus, et confiné dans des centres définis, durant 14 jours ». Édouard Fritch insiste : ce protocole « sera appliqué à la lettre ».

1 000 résidents et 1 500 fonctionnaires à acheminer
Combien de personnes devront passer dans ce « sas » de sécurité sanitaire ? Les chiffres ont beaucoup varié. À ce jour, la délégation de la Polynésie française aurait recensé « 351 étudiants et 647 résidents, soit un total de 998 résidents de Polynésie en attente de retour ». Un chiffre qui ne prend pas en compte les arrivées de fonctionnaires « près de 1 500 personnes à acheminer vers Tahiti, entre fin mai et fin juillet, pour nécessité professionnelle » estime Édouard Fritch.

Les capacités de quatorzaine ralentissent la marche

Entre les appels à l’aide des résidents bloqués, les sorties de certains élus, dont la député Nicole Sanquer, et la comparaison défavorable avec la Nouvelle-Calédonie, qui continue son programme de rapatriement, la pression s’accentue de jour en jour sur ce dossier. Qu’est-ce qui freine le gouvernement ? Édouard Fritch a clairement indiqué ce soir que le rythme d’accueil dépendait des lieux d’hébergements disponibles pour effectuer les quatorzaines. « À ce jour, nous avons réservé une capacité de 346 chambres pour 770 lits répartis dans différents lieux », détaille-t-il. Chambres universitaires à Outumaoro, logements loués au diocèse dans la zone urbaine de Papeete ou à Mitirapa… « Cette capacité est déjà, en partie, occupée », pointe le président. Au 7 mai, et alors que certains rapatriés sanitaires vont pouvoir retourner à leur domicile, la disponibilité serait de 183 chambres.

« Nous sommes aujourd’hui et nous serons toujours contraints et limités, à chaque vol de continuité, par cette capacité d’accueil », insiste le président. Des négociations seraient tout de même en cours « avec des hôtels de la place pour une capacité supplémentaire d’environ 300 chambres ». L’État pourrait développer ses propres moyens de quatorzaine pour les enseignants – avec des hôtels par exemple, ou pour les gendarmes – « sous contrôle » insiste Édouard Fritch.

Un vol supplémentaire, principalement pour le fret

Un nouveau Paris – Tahiti doit se poser à Faa’a dimanche. D’après la cellule de crise sanitaire, 80 places seraient disponibles à bord, dont, encore quelques évacués sanitaires. Plusieurs dizaines de résidents bloqués devraient tout de même, si leur test Covid-19 leur permet, pouvoir embarquer. Les autres devront attendre 10 jours pour la prochaine rotation de continuité territoriale. Il n’est pas question pour le Pays, à l’heure actuelle, d’affréter des vols supplémentaires, pointe Édouard Fritch, qui renvoie encore vers le manque d’hébergement. Le président reconnait tout de même que les capacités de transit de passagers étaient elles aussi « problématiques ».

« C’est un vol qui est avant tout mis en place pour le fret. J’ai dû insister auprès du Haut-commissaire pour qu’on mette un peu plus de malades dedans lors du dernier vol, mais ça a coûté la vie à plus de fret », notamment postal, explique-t-il. Raison pour laquelle le Pays envisage la possibilité d’affréter un vol d’ATN pour aller chercher ce fret. « Bien sûr que nous embarquerons dans la mesure du possible certains de nos compatriotes, reprend le président du Pays. Dans la mesure des capacités d’accueil en Polynésie ».

Édouard Fritch a au passage annoncé qu’un nouveau vol vers la Chine aurait lieu le 25 mai, pour approvisionner le pays en équipements de protection, et notamment en masques.

« Pas de favoritisme », mais des critères de priorité encore flous

Qui embarquera en premier ? La question est posée depuis plusieurs semaines parmi les résidents bloqués mais la cellule de crise sanitaire doit encore terminer son travail sur les critères de priorités. Âge, moyens financiers, disponibilité de bourses… « Ce que j’ai demandé au PC de crise, c’est qu’il n’y ait pas de favoritisme, insiste Édouard Fritch. Il faut que les critères soient réalistes et qui nous permettent de décider sans même regarder le nom qui pourra embarquer ou non ».

D’après la cellule de crise, une liste de critère est déjà établie, mettant en avant après les évacués sanitaires et équipes médicales, le handicap, la maladie, les grossesses et familles nombreuses, puis les situations de précarité. Restent tous ceux qui ne rentre pas dans ces cases, soit la majorité des candidats au Paris-Papeete. Jacques Raynal avait déjà indiqué, lundi, que la date d’inscription sur les listes de la délégation polynésienne à Paris serait prise en compte. Quant aux fonctionnaires d’État, Édouard Fritch a suggéré que la réouverture probable d’une partie du trafic aérien en juillet permettrait d’éviter de devoir choisir entre des métropolitains ou des résidents.

Difficultés financières 

Interrogé sur les difficultés dont témoignent de nombreux résidents, le président ne s’est pas montré très inquiet. « Lorsque vous décidez de partir hors du Pays, vous prenez vos précautions », lâche Édouard Fritch, estimant peu probable le cas de figure d’un résident qui n’aurait « plus rien en poche ». Le responsable concède tout de même que cette très longue attente pouvait poser des difficultés financières à certains. « La déléguée de la Polynésie à Paris a à sa disposition de l’argent pour venir en aide de ces personnes », indique le responsable. Un « fond pour gérer les urgences », dont le montant n’a pas été précisé, est évoqué. Il serait prioritairement destiné à assurer des besoins alimentaires et d’hébergement. « Mais la très grande majorité des personnes sont logées », assure le président.

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3 Commentaires

  1. l'Abeille
    8 mai 2020 à 8h05 — Répondre

    La soudaineté des mesures prises le 20 mars laissait deviner déjà le désir d’endiguer les « délinquants » des weekends. Hier soir on l’a entendu de la bouche-même du Pdt.
    Le couvre-feu a été le meilleur moyen de confiner les fauteurs de trouble, les fêtards et autres boit-sans-soif. La suppression de la vente d’alcool a été, pensait-on à tort, un autre moyen de limiter les rassemblements festifs. La fabrication d’alcool frelaté a pallié ce manque…En raison de ces restrictions, c’est toute la population qui a été cloîtrée, au pain sec et à l’eau. Il a fallu qu’une certaine société crie famine pour que le HC lâche un peu la bride. De même sans le dépôt d’un référé au tribunal administratif fait par cet avocat, nous serions encore dans une situation où nos libertés seraient encore plus bafouées qu’elles ne le sont aujourd’hui. Quand je lis ou que j’entends des propos sur le risque d’une propagation du C19, cela me fait sourire. Si propagation il y a, elle découlera plus de la venue prochaine des fonctionnaires ou du rapatriement tardif de polynésiens. Sauf si bien sûr toutes les mises en quarantaine sont rigoureuses, étanches et respectées. Sans aucune dérogation…. vraiment aucune ! L’avenir nous le dira…
    Quant à la remise en place des restrictions demandées par E. Fritch et par les maires, elles ne sont pas là que pour freiner la délinquance de cette partie de la population sans éducation mais pas pour empêcher une hypothétique propagation du virus.
    Est-ce que E. Fritch et ces maires se soucient du bien-être du reste de la population qui depuis plus d’un mois s’est conformée sans rechigner aux exigences du confinement pour le bien du pays ! On peut se le demander… Seule la peur de débordements festifs semble les inciter à demander à nouveau ces mesures. Dommage !

    NB – Nous allons revoter bientôt pour les municipales, si certains maires ne pensent plus pouvoir faire assurer la sécurité publique dans leur commune sans l’aide de l’Etat, ils peuvent toujours se retirer avant le 2éme tour…

    • Huguet
      8 mai 2020 à 18h50 — Répondre

      Bravo pour cet article l’abeille ! C’est une honte cette proposition ! Couvre feu ! Terme de guerre , pour un pays en paix !! Tout ca clairement exprime uniquement pour les problemes de petite delinquance et sans aucun rapport avec le virus !!!! Mais ou allons nous? Dans Dans quelle societe voulons nous vivre ? Surveilles , autorises a sortir pour le travail ? Puis enfermes ?? L’avenir est vraiment souriant !!!!!

  2. louis bresson
    9 mai 2020 à 14h34 — Répondre

    Question au gouvernement: Y a-t-il eu un seul cas de Polynésiens rapatriés et confinés à leur domicile qui n’aient pas respect cette consigne? A partir du moment où ces personnes disposent d’habitations isolées ou peuvent s’en faire prêter, éventuellement les louer (nombreux logements RBNB disponibles), pourquoi ne pas leur permettre ce qui a été autorisé à notre députée Maïna Sage? D’autant que cette solution permettrait des économies importantes en évitant des hébergements qui coûtent plus de 300.000 Fcfp par personne au Pays.

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