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Salah Abdeslam, homme-clé des attentats de Paris, refuse de s'exprimer devant les juges

Paris (AFP) – Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos jihadistes du 13 novembre, a refusé de s’exprimer vendredi lors de son premier interrogatoire devant les juges d’instruction à Paris, une étape qui était très attendue, six mois après les attentats de Paris.

L’audition devant les magistrats qui l’avaient mis en examen pour assassinats terroristes le 27 avril, lors de sa remise par la Belgique à la France, a tourné court: Salah Abdeslam « n’a pas souhaité s’exprimer aujourd’hui », a déclaré en fin de matinée à l’AFP un de ses avocats, Frank Berton.

Il a « d’entrée de jeu fait valoir son droit au silence », a confirmé le parquet de Paris. « Il a également refusé de préciser les raisons le conduisant à faire un tel usage de son droit au silence » et même « de confirmer les déclarations qu’il avait précédemment faites devant les policiers et devant le juge d’instruction belges ».

Le petit caïd radicalisé de 26 ans devenu le fugitif le plus recherché d’Europe, jusqu’à son arrestation le 18 mars à Bruxelles, avait été extrait au petit matin de sa cellule de Fleury-Mérogis, au sud de Paris, où il est incarcéré à l’isolement, pour être conduit au palais de justice dans un convoi escorté par le GIGN, l’unité d’élite de la gendarmerie, et par un hélicoptère.

« Salah Abdeslam est maître du moment qu’il choisira pour parler, l’important c’est qu’il parle et qu’il parle avant son procès », a poursuivi son avocat devant les journalistes. 

Mais selon le parquet, le suspect-clé n’a pas pris l’engagement de s’exprimer dans l’avenir.

Pourtant, lors de sa mise en examen, Me Berton avait affirmé qu’il s’expliquerait « ultérieurement », de quoi susciter un espoir de vérité chez les parties civiles qui doivent être reçues pour la première fois par les juges d’instruction du 24 au 26 mai à Paris. 

« Qu’il refuse de coopérer, c’est une chose, mais qu’il rentre dans un mur de silence, c’est une insulte à la mémoire des victimes », a réagi Me Samia Maktouf, qui défend plusieurs parties civiles.

Olivier Morice, autre avocat de victimes, a dénoncé « une forme de manipulation de l’opinion publique ».

« Il s’inquiète de son petit confort (…) mais il ne lui viendrait jamais à l’idée de se demander pourquoi les victimes ont, elles perdu le sommeil à cause d’une vie abimée par sa faute », a déploré pour sa part Me Mehana Mouhou.

– Silencieux depuis le 22 mars –

Frank Berton a estimé que la vidéosurveillance 24h sur 24 dans la cellule de Salah Abdeslam posait « un énorme problème »: « on peut penser que ça ne le conduit pas à collaborer avec l’institution judiciaire ». Fustigeant un dispositif « illégal », l’avocat compte écrire au ministre de la Justice.

Arrêté à Molenbeek, son quartier, après plus de quatre mois de cavale, Abdeslam apparaît comme un acteur central de l’expédition meurtrière du 13 novembre qui a fait 130 morts et des centaines de blessés et le seul protagoniste direct des attentats entre les mains de la justice française.

Ami d’Abdelhamid Abaaoud, organisateur présumé des attaques, Abdeslam a déposé les trois kamikazes du Stade de France avant d’être exfiltré vers la Belgique. Avant, c’est lui qui a loué des véhicules et des planques en région parisienne. Durant les mois précédents, il avait multiplié les voyages pour convoyer des membres du réseau à travers l’Europe, notamment Najim Laachraoui, possible artificier du 13 novembre mort en kamikaze lors des attentats qui ont fait 32 morts le 22 mars à Bruxelles.

Abdeslam en sait probablement beaucoup sur la conception du projet jihadiste, ses commanditaires et d’éventuels complices encore dans la nature. Il peut aussi aider à démêler les liens entre les attentats de Paris et Bruxelles, fomentés par la même cellule du groupe Etat islamique (EI). Interrogé en Belgique, il avait d’abord minimisé son rôle, avant de se murer dans le silence.

Dans cette enquête tentaculaire, plus d’une vingtaine de personnes ont été mises en examen ou inculpées, principalement en Belgique. Les juges français ont délivré récemment quatre autres mandats d’arrêt visant des suspects détenus en Belgique, dont trois soupçonnés d’avoir aidé Abdeslam dans sa fuite.

Le convoi transportant Salah Abdeslam à son arrivée le 20 mai 2016 au palais de justice à Paris. © AFP

© AFP MATTHIEU ALEXANDRE
Le convoi transportant Salah Abdeslam à son arrivée le 20 mai 2016 au palais de justice à Paris

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