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Série noire sur les routes : « Le problème, c’est le comportement, et c’est très dur à changer »


Le motard décédé ce lundi matin à Punaauia marque le onzième accident mortel sur les routes de Polynésie en 2022, dont dix impliquent des deux-roues. Le directeur de la Prévention routière de Polynésie se dit « désemparé » face à cette série noire, et explique que les efforts sont déjà déployés en termes de formation, de sensibilisation et de répression. Mais les « comportements », de la vitesse à l’alcool en passant par l’équipement de sécurité, prennent du temps à faire évoluer. 

Un sexagénaire au volant d’une moto, qui percute un mur de plein fouet, pour des raisons encore difficiles à expliquer. Seuls éléments transmis par la gendarmerie : une vitesse excessive qui a pu jouer, et l’absence de casque qui aurait pu protéger la victime. Le drame est d’autant plus triste qu’il n’est pas isolé, ces derniers mois. Loin de là : depuis le 1er janvier, onze personnes sont décédées dans des accidents routiers, dont 10 alors qu’elles conduisaient un deux-roues. « Je ne me souviens pas qu’on ait eu une telle série en si peu de temps », regrette Nino Bonis. Ancien président et aujourd’hui directeur de l’association de Prévention routière Polynésie française, il se dit, comme d’autres acteurs de la sécurité, « désemparé » face à ce phénomène.

« Le moyen de transport terrestre le plus dangereux du monde »

Les acteurs de la sécurité routière, réunis en comité de prévention mi-avril, s’était déjà dit « atterrés » par le pic de mortalité du début d’année, que tout le monde espérait « ponctuel ». Mais difficile d’identifier des coupables. « On ne peut pas incriminer le réseau routier, la signalisation… Ces accidents, c’est de l’alcool, des excès de vitesse, c’est du comportement, reprend Nino Bonis. On a mis 20 ans pour passer de 450 accidents à 160, de 600 blessés à 170, de 45 ou 50 tués à 20 ou 30. Là il se passe quelque chose. Je me suis demandé si c’était l’après-confinement, un relâchement… On peut se poser des questions mais il ne faut pas oublier que le deux-roues motorisé, c’est le moyen de transport terrestre le plus dangereux du monde ».

Pas de formule magique, mais du travail de fond

Selon le directeur d’association, il n’y pas de « formule magique » pour faire baisser les chiffres. « Tout le monde est au travail sur ce sujet là, et il faut continuer », et « dans le temps long », insiste Nino Bonis, qui rappelle qu’il est impossible, dans les faits, de mesurer les effets précis des actions de prévention. « Ce qu’on sait, c’est que le travail passé a payé, notamment auprès de la jeunesse, et qu’il faut le poursuivre », reprend-il. Avec un triptyque : « culture, formation et répression ».

Côté culture, l’école est de plus en plus ciblée par des actions de prévention. Elles vont d’ailleurs être accentuées dans les collèges et lycées, grâce au renfort d’une nouvelle formatrice de l’association. « La famille a aussi son rôle à jouer », précise le directeur. Côté formation, « les auto-écoles font le boulot », « le code de la route est costaud », et le permis de conduire polynésien « est un bon diplôme », très loin d’un « permis cocotier ». Reste, là aussi, à parfaire le cursus proposé dans le milieu scolaire, avec notamment les attestations scolaires de sécurité routière et le BSR. Quant à la répression, « il y en aura davantage », vu les chiffres et le discours du Haussariat ces dernières semaines. Certains y voient une solution infaillible, mais « les forces de l’ordre font déjà bien leur travail », estime le directeur d’association. « On ne peut pas empêcher quelqu’un de rouler sous alcool, sous paka ou en excès de vitesse… Il faudrait l’interpeller dès qu’il a démarré, comment vous voulez faire ? interroge-t-il. Le problème, c’est le comportement, et malheureusement, c’est très dur à changer ».

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3 Commentaires

  1. Louis Bresson
    3 mai 2022 à 8h24 — Répondre

    Les comportements à risques sont parfois assez facilement décelables… grâce au bruit des deux-roues trafiqués. Lorsque les jeunes (ou moins jeunes) trafiquent leurs engins, ce n’est pas pour le plaisir de faire du bruit, mais pour obtenir des performances supérieures.

  2. 3 mai 2022 à 8h56 — Répondre

    Un constat d’échec sans nul doute. Mais si au lieu d’en faire une fatalité, on commençait par sanctionner toutes les infractions au code de la route, tous les jours toute l’année, les choses changeraient. Stop, feu rouge, wheeling, vitres fumées, largeur de l’empâtement, volume sonore de tous les véhicules etc, histoire de réapprendre aux usagers que la route se partage en bonne intelligence et que le respect du code de la route fait partie de la vie en société.

  3. Courseyre
    3 mai 2022 à 19h21 — Répondre

    Proposez des voitures abordables au niveau des prix ! Les gens roulent en 2 roues ce n’est pas pour le plaisir..mais parce que les voitures sont à des prix inaccessibles et un peu plus de contrôle des prix des réparations car certains garagistes sont des arnaqueurs..
    C’est aussi un facteur à considérer!

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