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Sida: Touraine saisit la justice après la "censure" par des maires

Paris (AFP) – La ministre de la Santé a décidé mardi de saisir la justice administrative après la décision polémique de plusieurs municipalités de droite de faire retirer des affiches d’une campagne de prévention du sida montrant des homosexuels.

La campagne, lancée par le ministère des Affaires sociales et de la Santé, montre des couples d’hommes avec des messages tels que « Aimer, s’éclater, s’oublier. Les situations varient. Les modes de protection aussi ».

Une dizaine de villes sur les 130 où la campagne est diffusée ont écrit à JC Decaux qui assure l’affichage public pour demander le retrait des affiches, a indiqué à l’AFP une source proche de la société. Contractuellement l’entreprise est obligée de le faire si elle reçoit une demande écrite d’une municipalité.

Le maire d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), Bruno Beschizza (LR), a pris un arrêté en vertu duquel ces affiches diffusées notamment sur les abribus « devront être retirées ou masquées ».

Pour ce soutien de François Fillon, ces affiches sont « contraires aux bonnes moeurs et à la moralité » et « portent atteinte à la dignité au risque de heurter la sensibilité de l’enfance et de la jeunesse ». 

« On est sur une campagne qui n’est pas tous publics », a expliqué à l’AFP Bruno Beschizza, critiquant l’association des messages et des images et assurant qu’il aurait pris le même arrêté si les affiches avaient mis en avant des couples hétérosexuels.

Cette décision intervient au lendemain de celle similaire du maire LR d’Angers, de retirer les mêmes affiches placardées dans 70 emplacements de la ville depuis le 16 novembre.

Interrogé par l’AFP, le maire Christophe Béchu, soutien d’Alain Juppé, a confirmé avoir demandé le retrait des affiches mais « uniquement aux abords des écoles (primaires) et sur le parcours des bus scolaires » pour « protéger les enfants ».

La décision a été prise « à l’unanimité par le bureau municipal (le maire et ses adjoints, ndlr) lundi matin », à la suite de plusieurs dizaines de plaintes d’habitants, a-t-il ajouté.

– ‘Censure de la campagne’ –

En réaction, la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine a annoncé sur Twitter « saisir la justice » administrative « après la censure par certains maires de la campagne de prévention du VIH ».

« 30.000 personnes vivent avec le sida sans le savoir, il y a 7.000 nouveaux cas de sida chaque année (…) La prévention est nécessaire », a expliqué la ministre dans les couloirs de l’Assemblée nationale. « Attention à ne pas répondre par des considérations d’ordre moral d’un autre temps », a-t-elle plaidé, déplorant que « quelques élus » s’engagent sur ce terrain.

La ministre du Travail Myriam El Khomri a dénoncé « la paranoïa autour d’une campagne contre le VIH », après qu’Isabelle Le Callennec, députée LR et soutien de François Fillon, a critiqué une campagne « très suggestive » lançant « un message électoral en direction d’une communauté ».

Le président PS du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, a lui condamné dans un tweet une « droite (qui) pense que l’homosexualité est une maladie dont il faut protéger les enfants. #pathétique. L’homophobie tue!#loveislove« . 

En réponse au maire d’Angers, le président du Centre lesbien, gay, bi et trans d’Angers, Bernard Moreau, a estimé que ce qui est visé dans cette décision « c’est le couple homosexuel ».

« Cette campagne est beaucoup moins suggestive que certaines campagnes publicitaires », a-t-il estimé. Pour Bernard Moreau, c’est le résultat de « l’influence de la Manif pour tous et de Sens commun », son émanation au sein des Républicains, dont viennent deux adjoints du maire d’Angers. Selon lui, « on entre dans une campagne électorale et certaines pressions se font sentir ».

Aurélien Beaucamp, président de l’association de lutte contre le sida Aides a également défendu la campagne et le choix du ministère de la diffuser très largement. « 50% des nouvelles contaminations » par le VIH concernent des hommes homosexuels et tous « ne lisent pas forcément la presse spécialisée ou ne sortent (…) pas dans des lieux communautaires », cibles habituelles des campagnes de prévention, a-t-il souligné.

Une affiche de la campagne de prévention, lancée par le ministère des Affaires sociales et de la Santé, le 22 novembre 2016 à Marseille. © AFP

© AFP BORIS HORVAT
Une affiche de la campagne de prévention, lancée par le ministère des Affaires sociales et de la Santé, le 22 novembre 2016 à Marseille

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