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Sous-investissement, départ de soignants… Les praticiens hospitaliers demandent plus de moyens pour le CHPF

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Alors qu’une nouvelle vague épidémique couve en Polynésie, et qu’Emmanuel Macron comme Édouard Fritch sont attendus au Taaone en cette fin de semaine, le syndicat des praticiens hospitaliers interpelle les autorités sur la situation du CHPF. Statut inadapté, investissements repoussés, équipement sous-dimensionné, manque d’attractivité… Pour les médecins de l’hôpital, il est urgent de réagir.

Des moyens plutôt que des remerciements. C’est, en somme, la demande du Syndicat des praticiens hospitaliers de Polynésie, qui a publié un communiqué en forme de cri d’alarme ce jeudi. Le collectif, qui regroupe des médecins du CHPF et des autres hôpitaux de la Polynésie, interpelle les autorités alors que toutes les attentions convergent vers le Taaone. Demain soir, sous la nef de l’hôpital, plusieurs soignants et autres acteurs de la crise sanitaire vont recevoir des mains d’Édouard Fritch et de Jacques Raynal, des médailles de l’ordre de Tahiti Nui. Samedi soir, c’est le président de la République Emmanuel Macron qui est attendu au CHPF. Et dans les jours et semaines à venir, le centre hospitalier, « seul établissement de Polynésie à offrir des soins de derniers recours » comme le répètent les praticiens, pourrait être on ne peut plus sollicité vu la reprise rapide de la circulation du Covid et de son variant Delta.

« Sous-dimensionnement » et saturation

C’est dans ce contexte très particulier, que le syndicat, d’habitude plutôt discret, a choisi de s’exprimer. D’abord pour rappeler « l’exceptionnelle mobilisation de l’ensemble du personnel hospitalier, et à l’extraordinaire réorganisation mise en œuvre au CHPF » pendant la première vague épidémique, qui a vu défiler à l’hôpital plus de 2 000 malades, dont 200 sont passés par la réanimation. « 90% d’entre eux ont pu être sauvés », se félicite le syndicat. Mais cette réussite s’est faite au prix de déprogrammation « massive » des consultations, hospitalisations, et interventions chirurgicales non urgentes pendant la crise, qui « risque d’entrainer des retards de prise en charge, avec des pertes de chance préjudiciables ». Il faut dire qu’avant crise, le centre hospitalier connaissait déjà « des taux d’occupation des lits de plus de 90% et dépassants 100% dans certains services ». Un « sous-dimensionnement », déjà dénoncé par des médecins de l’hôpital par le passé, et qui est souvent contesté dans le privé. Pour le syndicat, aucun doute : « le savoir-faire et le dévouement du personnel ne peuvent pas occulter les difficultés structurelles majeures liées à la sous-estimation des moyens attribués à l’hôpital du Taaone ». « On est toujours à flux tendu », confirme le Dr Marc Levy, président du collectif.

Au fil des ans, « l’insuffisance du financement du CHPF s’est aggravée » continue le syndicat, qui rappelle que le budget de l’hôpital présente un déficit annoncé de plus d’un milliard de francs cette année. « Manque de personnel qualifié », « vétusté des équipements », « freins à l’innovation médicale »… Autant de constats qui appellent une réaction urgente, estime le Dr Marc Levy. D’abord en finançant le CHPF « selon son activité et ses besoins », mais aussi en donnant davantage d’attractivité aux carrières hospitalières polynésiennes, « notamment celle des médecins hospitaliers ».

D’après le président du syndicat, face aux évolutions réglementaires favorable en métropole et dans le reste de l’outre-mer, et à l’attractivité des carrières libérales, le Taaone a de plus en plus de mal à recruter. « Il ne s’agit pas seulement de salaire, précise-t-il. Mais de l’aménagement de carrière, du temps de travail, de la souplesse statutaire, remis au goût du jour en métropole pour réattirer les médecins à l’hôpital et éviter cette fuite dans le privé ». Plusieurs médecins du Taaone vont d’ailleurs quitter l’établissement cette année pour aller exercer dans le privé, précise Marc Levy.

Un nouveau statut pour l’hôpital ?

Le syndicat demande aussi aux autorités de revoir le statut du CHPF et des hôpitaux de Polynésie, aujourd’hui établissements publics administratifs du Pays. « Une situation unique parmi les autres hôpitaux ultramarins et de métropole, qui entrave durablement le fonctionnement et la gestion de l’hôpital, par sa lourdeur administrative hors d’âge » précise le syndicat. Le Taaone qui a heureusement pu s’affranchir de ce cadre pour répondre efficacement à la crise demande « le passage à un statut spécifiquement hospitalier depuis des années ».

Des revendications qui arrivent aussi en plein cycle de réflexion sur l’avenir de la protection sociale en Polynésie. Le problème est connu : des cotisations qui augmentent peu, voire plongent avec la crise Covid, des dépenses qui ne cessent d’augmenter. Les demandes hospitalières sont d’autant plus délicates que du côté des médecins libéraux, on s’estime aussi mal considéré par les autorités et on demande aussi une révision favorable de statut. Si le public et le privé ne s’opposent pas directement, confraternité oblige, les autorités, en plus de trouver de nouvelles sources de financement, devront bien mettre sur la balance leurs arguments respectifs. Chez les praticiens hospitaliers, on adopte un ton ferme : « L’obstination à ne pas reconnaitre que l’hôpital du Taaone est le seul établissement de Polynésie à offrir des soins de derniers recours, qu’il doit être financé selon son activité, et qu’il doit être attractif pour recruter du personnel qualifié, revient à renoncer à l’accès équitable aux connaissances et aux moyens actuels de la médecine pour les malades du Fenua ».

Sphpf – Communique de Presse 22 Juillet 2021

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