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Syrie: sérieux accrocs dans la trêve, tensions entre Moscou et Washington

Alep (Syrie) (AFP) – La trêve en Syrie a connu ses plus sérieux accrocs avec des bombardements aériens et de violents combats au moment où s’enveniment les relations entre les Etats-Unis et la Russie au sujet de l’aide humanitaire.

Une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU qui devait se tenir vendredi soir à New York a été annulée à la dernière minute à la demande de Washington et de Moscou, les deux parrains de la trêve.

Cette réunion devait permettre d’examiner la possibilité d’une résolution du Conseil qui soutiendrait l’accord americano-russe, lequel prévoit un cessez-le-feu, l’acheminement d’aide humanitaire et vise à favoriser l’émergence d’une solution politique à la crise syrienne.

Les ambassadeurs américain et russe devaient présenter à leurs partenaires les détails de l’accord, qui n’ont pas été rendus publics.

Mais la Russie a accusé les Etats-Unis de refuser de partager avec le Conseil de sécurité des documents sur l’accord.

– ‘Probablement pas de résolution’ –

« Nous n’allons très probablement pas avoir de résolution au Conseil de sécurité, parce que les Etats-Unis ne veulent pas partager ces documents avec les membres du Conseil de sécurité », a déclaré à des journalistes l’ambassadeur de la Russie à l’ONU, Vitali Tchourkine.

« Nous pensons que nous ne pouvons pas leur demander de soutenir un document qu’ils n’ont pas vu », a-t-il dit.

Auparavant, la mission américaine a expliqué sa position en mettant en avant des préoccupations de sécurité. « Comme nous n’avons pas pu nous mettre d’accord sur une manière de rendre compte au Conseil qui ne compromettrait pas la sécurité opérationnelle, la réunion a été annulée », a déclaré un porte-parole de la mission américaine.

Ces préoccupations porteraient sur la sécurité de certains des groupes armés que les Etats-Unis soutiennent en Syrie.

Le conflit en Syrie a fait plus de 300.000 morts depuis cinq ans selon une ONG, l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

La trêve a permis une baisse sensible des violences sur l’ensemble des fronts. Mais elle a été marquée à son quatrième jour par plusieurs accrocs notables, qui ont fait les premières victimes civiles depuis son entrée en vigueur, selon l’OSDH.

Trois personnes, dont deux enfants, ont péri à Khan Cheikhoun, une localité rebelle de la province d’Idleb (nord-ouest), dans des frappes menées par des avions non identifiés, d’après l’OSDH.

Une source militaire a fait état « d’affrontements intenses » dans la périphérie de Damas, où l’armée syrienne a bloqué une tentative des rebelles d’entrer dans la capitale par le quartier de Jobar.

Les combats ont tué trois combattants rebelles islamistes et quatre membres des forces du régime, selon l’OSDH.

Alors qu’une décision était attendue sur la prolongation de la trêve, Moscou et Washington ont affiché leurs divergences de vues, une semaine après avoir annoncé conjointement la conclusion de l’accord.

« Bien que le cessez-le-feu soit un accord bilatéral, seul un des belligérants le respecte véritablement », a déclaré dans la journée de vendredi le général Igor Konachenkov, porte-parole du ministère russe de la Défense. Il parlait du régime syrien, allié de Moscou.

Le général a toutefois indiqué que la Russie était prête à une prolongation de la trêve de 72 heures.

Le département d’Etat a pour sa part annoncé que les Etats-Unis ne coopèreraient pas militairement avec la Russie contre les jihadistes en Syrie (ce que prévoit l’accord) tant que le pouvoir syrien ne permettrait pas aux villes assiégées de recevoir de l’aide humanitaire.

L’accord prévoit notamment la livraison d’aide aux quartiers sous contrôle rebelle d’Alep, dans le nord.

Mais faute de garanties de sécurité suffisantes, des camions remplis de nourriture et de médicaments pour les habitants d’Alep-est sont toujours bloqués dans une zone tampon entre les frontières turque et syrienne.

Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a condamné, lors d’un contact téléphonique avec son homologue russe Sergueï Lavrov, « les retards répétés et inacceptables de l’aide humanitaire ».

– Obama ‘profondément préoccupé’ –

Le président américain Barack Obama a réuni vendredi à ce sujet son Conseil de sécurité nationale (NSC). « Le président s’est déclaré profondément préoccupé que, bien que la violence ait diminué dans le pays, le régime syrien continue de bloquer l’acheminement d’une aide humanitaire indispensable », a indiqué la Maison Blanche.

Selon l’accord russo-américain, Moscou doit faire pression sur son allié Bachar al-Assad tandis que Washington doit oeuvrer auprès des rebelles syriens, notamment pour qu’ils prennent leurs distances avec les jihadistes.

La situation en Syrie s’est complexifiée encore davantage avec l’annonce par le Pentagone que des forces spéciales américaines avaient été déployées en appui de l’armée turque et de groupes rebelles modérés dans leur offensive contre l’EI dans le nord de la Syrie.

Ce déploiement a été effectué « à la demande du gouvernement turc », a précisé le porte-parole du Pentagone.

Un convoi de soldats turcs à la frontière avec la Syrie, le 2 septembre 2016 à Jarablos. © AFP

© AFP/Archives BULENT KILIC
Un convoi de soldats turcs à la frontière avec la Syrie, le 2 septembre 2016 à Jarablos

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