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Tavini-Tahoeraa : la tentation du retour aux urnes

Loin de se retrouver uniquement sur les questions d’évolution statutaire, la « minorité majoritaire » Tahoeraa-Tavini discute également stratégie politique depuis plusieurs semaines. Au coeur des discussions aujourd’hui : la tentation d’un retour immédiat aux élections territoriales grâce à une spécificité du statut d’autonomie, avec par la suite l’ouverture de discussions sur une liste d’union « anti-Tapura et anti-Etat », sans Gaston Flosse, ni Oscar Temaru, tous deux inéligibles. Improbable ? L’idée, bien avancée, a été présentée officiellement lors du comité directeur du Tavini lundi soir, devant une soixantaine de personnes. Et elle tournait en boucle chez plusieurs cadres du parti orange toute la journée de mardi.

Selon les informations recoupées par Radio 1, les discussions politiques entre les deux partis d’opposition portaient essentiellement ces dernières semaines sur l’opportunité de monter des listes d’union aux municipales de 2020. L’objectif étant très clairement de s’attaquer aux nombreux maires Tapura, socle de la stratégie électorale d’Edouard Fritch.

Mais depuis quelques jours, une autre idée, rappelée récemment par le projet de toilettage du statut d’autonomie, fait son chemin dans les deux camps de l’opposition. Il s’agit de la possibilité, ouverte par l’article 107 du statut, de réorganiser de nouvelles élections territoriales complètes si la « vacance » d’au moins trois élus de l’assemblée de la Polynésie française est constatée.

Une vraie crainte de l’Etat, si l’on en croit l’exposé des motifs de son projet de toilettage du statut de novembre dernier : « le seuil déclenchant le renouvellement intégral de l’assemblée vaudrait aujourd’hui d’être relevé, afin d’éviter que quelques démissions volontaires suffisent à provoquer un renouvellement intégral de l’assemblée ».

Le Tavini envisage des démissions par « solidarité » avec Oscar Temaru

Lundi soir, le Tavini Huiraatira s’est réuni en comité directeur. Plus d’une soixantaine de militants ont répondu présents à l’invitation de leur président, Oscar Temaru. Une invitation envoyée surtout aux élus de l’assemblée et aux candidats de la section 3 (Faa’a et Punaauia) lors des dernières territoriales.

Au coeur des discussions : la proposition de démission des trois élus de la section 3 -Eliane Tevahitua, Moetai Brotherson et Cécile Mercier- et de tous leurs suivants de liste. Des démissions présentées comme une manifestation de « solidarité » envers le leader du Tavini dont l’élection a été récemment annulée par le Conseil d’Etat.

Un débat s’en est suivi lundi soir et les avis étaient partagés. Nombreux ont demandé un temps de réflexion car ils ne comprennent pas « l’opportunité » de ces démissions.

Mais une lettre type de démission ou de renonciation au remplacement des démissionnaires a néanmoins été remise aux trois élus de l’assemblée et à tous les suivants de liste de la section 3 lors des dernières territoriales.

Pour l’heure, aucun élu n’a encore signé ce document, alors que plusieurs suivants de liste s’y sont déjà engagés.

La liste unique « anti-Tapura et anti-Etat » dans toutes les têtes

Dans le même temps, lundi soir, le Tahoeraa Huiraatira était réuni en conseil politique. Et si plusieurs cadres du parti étaient parfaitement au courant du projet en cours du Tavini, le leader du parti orange ne l’a pas évoqué une seule fois. Gaston Flosse a surtout fait de la pédagogie pour faire passer son idée « d’Etat souverain associé à la France » que trop de militants Tahoeraa voient comme l’anti-chambre de l’indépendance.

Pour autant, les cadres du Tavini et du Tahoeraa s’accordent tous à le dire, cette opportunité d’un retour aux urnes n’aurait de sens qu’avec la création d’une liste d’union Tavini et Tahoeraa sur un leitmotiv simple : « anti-Tapura et anti-Etat », confirmait mardi un cadre de l’opposition.

Les deux partis veulent même tourner à leur avantage un double problème dans le timing de cette opération : ni Gaston Flosse, ni Oscar Temaru ne sont aujourd’hui éligibles ! « Ça nous évite à tous une guerre des chefs, c’est maintenant ou jamais », glissait mardi une autre source de l’opposition.

Vaite Urarii-Pambrun et Antoine Samoyeau