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Tematai Legayic : la « citoyenneté maohi » plutôt que la « citoyenneté polynésienne »


Invité sur le plateau de Radio1 ce jeudi midi, le candidat Tavini de la 1ère circonscription a réagi à la proposition de Nicole Bouteau de faire inscrire la citoyenneté polynésienne dans la Constitution. À l’entendre, une telle citoyenneté est nécessaire pour protéger l’emploi et le foncier – des sujets sur lesquels le Tapura se réveille tardivement, estime-t-il – mais elle doit s’inscrire dans un processus de décolonisation, comme en Nouvelle-Calédonie.

En 2008, Richard Tuheiava, alors âgé de 34 ans, était devenu le plus jeune sénateur de la République. Tematai Legayic, à 21 ans, ambitionne quant à lui de devenir le benjamin du Palais Bourbon. Titulaire d’une double licence Histoire/Sciences politiques, et inscrit en master à l’École des hautes études en sciences sociales à Paris, l’ancien président de l’Association des étudiants de Polynésie française s’attaque à une circonscription difficile. La plus grande, avec ses 27 communes étalées depuis Papeete jusqu’aux Marquises en passant par les Tuamotu et les Gambier, mais aussi la seule qui a élue largement Emmanuel Macron (56%) le 23 avril dernier. Qu’importe pour le candidat s’il a été choisi par Oscar Temaru et par le Tavini, c’est parce qu’il était « prêt à se lever pour son pays ». Prêt aussi à parler à une jeunesse de plus en plus désintéressée par les bureaux de vote : « On a tendance à penser que la politique ne sert à rien et ne peut pas changer les choses, analyse-t-il. Ça n’est pas complètement faux mais c’est parce qu’on se situe dans une situation économique et sociale où il y a des groupements d’intérêts qui mettent la pression sur le politique, qui fait que le politique n’a pas forcément le dernier mot ». Lui assure pouvoir « faire bouger les choses », sur « l’urgence climatique, l’urgence sociale ou l’urgence sanitaire ».

Mélenchon et la Nupes « pour faire avancer les choses »

Comme les autres candidats Tavini – Moetai Brotherson et Steeve Chailloux – il siègera, en cas d’élection, dans un groupe de la nouvelle union populaire économique et sociales (Nupes), qui rassemble, autour de la France Insoumise, des partis de gauche comme EELV, le Parti communiste ou le Parti socialiste. Et qu’importe si aucun d’entre eux ne milite réellement pour une Polynésie indépendante : Jean-Luc Mélenchon est le seul a vouloir « respecter l’Onu et lui donner plus de pouvoir », et qui « reconnait le principe d’autodétermination ». « Faire comprendre cette situation coloniale », obtenir l’engagement d’un processus de décolonisation et l’organisation d’un référendum restent des priorités.

À entendre Tematai Legayic, c’est aussi dans cette union des gauches – qu’elle soit majoritaire, comme veulent le croire ses candidats, ou une force d’opposition – que les députés Tavini pourront au mieux défendre les « droits des Polynésiens sur leurs ressources marines ». Une thématique largement mise en avant, mardi 17 mai, pour le neuvième anniversaire de la réinscription du Pays sur la liste des territoires non-autonomes de l’ONU. Lors de cette « Fête de la réinscription », Oscar Temaru avait appelé la jeunesse à se mobiliser sur le sujet : « Nous devons gagner cette guerre et pour la gagner nous avons besoin de soldats », avait lancé le président du Tavini. Le jeune candidat a de son côté beaucoup mis en avant les questions d’éducation dans sa campagne, notamment aux Tuamotu : « Le programme et le principe même de l’Éducation nationale ne marchent pas partout », explique-t-il. Mettant en avant les modes d’enseignement alternatifs comme les écoles Montessori, il compte demander plus de moyens pour assurer l’éducation dans les petites îles, mais aussi la mise en place de filières professionnelles adaptées aux besoins, notamment en matière agricole et environnementale.

Foncier, emploi, citoyenneté… La « poudre de perlimpinpin » du Tapura

Le Tavini avait aussi fait du foncier un axe majeur de sa campagne. La loi sur les « 1000% » de taxe aux non-résidents et résidents de moins de 10 ans, proposée par le Tapura et votée à l’unanimité de l’assemblée, va-t-elle dans le bon sens ? Oui, mais elle est tardive, répond-il en substance : « Enfin le Tapura est conscient qu’il y a ici une situation de colonisation effective ». Mais à l’entendre, ce texte isolé et qui va être attaqué ne suffira pas : « c’est de la poudre de perlimpinpin », lâche-t-il en reprenant une saillie d’Emmanuel Macron. Le Tapura, et notamment Nicole Bouteau, sa rivale rouge et blanc dans la 1ère circonscription, ont pourtant aussi mis en avant l’inscription, dans le statut et la Constitution, d’une citoyenneté polynésienne, qui aiderait à développer des outils de préservation de l’emploi local et du foncier. Là encore, Tematai Legayic dénonce les incohérences de la majorité. Et explique que si la Calédonie a pu obtenir une citoyenneté, c’est parce qu’elle s’inscrit dans un processus de décolonisation :

Plutôt que la « citoyenneté polynésienne », le Tavini milite donc pour une « citoyenneté maohi ». Plutôt que de se concentrer sur les questions économiques, elle doit permettre de « reconnaître le peuple, la culture, les langues maohi », et paver la voie à un gel du corps électoral – gel qui existe et qui fait débat en Calédonie – et à un référendum d’autodétermination. « Et enfin faire de ce peuple un vrai peuple et pas seulement une population française de Polynésie ».

Nucléaire : 

Enfin, le candidat de 21 ans compte bien, avec les autres députés Tavini, hausser le ton sur la question du nucléaire à Paris. Si tous les candidats, aujourd’hui, parlent de réformer les systèmes d’indemnisation et d’obtenir le remboursement de la CPS des dépenses liées aux maladies radio-induites, lui rappelle que le député Tavini Moetai Brotherson a – en toute fin de mandat – déjà déposé une proposition de loi dans ce sens. Et qu’elle a été écartée par la majorité LREM. « Pendant 5 ans, sur le nucléaire ou la citoyenneté, ça n’a pas marché, alors qu’Édouard Fritch était en bons termes avec Emmanuel Macron, est-ce que pendant les cinq prochaines années, ça marchera ? Non, répond-il. Il faut qu’on ait pas une posture politique : rappeler qu’on est dans une situation coloniale, qu’on est un peuple maohi, et tous ensemble faire face à l’État colonial ».

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