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Transports: les routes seront "intelligentes" et fourniront de l'énergie

Paris (AFP) – Des routes « intelligentes », plus résistantes, capables de s’éclairer et se dégivrer elles-mêmes, de guider les futurs véhicules autonomes et de fournir de l’énergie: bien que confrontés à un marché déprimé en France, les majors du BTP travaillent d’arrache-pied pour donner vie à ces innovations.

Malgré un contexte morose où les collectivités locales, soumises à de fortes contraintes budgétaires, peinent à assurer les travaux de maintenance indispensables, les géants Eurovia (Vinci), Colas (Bouygues) et Eiffage misent sur l’innovation pour convertir la route aux transitions numérique, environnementale et énergétique.

« Nous entrons dans une nouvelle ère : nous changeons de modèle après une période très dure, des années où l’on s’est demandé comment maintenir notre activité », explique Hervé Dumont, directeur technique du pôle route d’Eiffage.

Un virage compliqué pour des travaux publics « habitués à évoluer dans un milieu fermé », rapporte Pascal Tebibel, directeur prospective chez Colas. « Il nous faut nouer des alliances, dialoguer avec des start-ups, des collectivités, des groupes de télécoms. »

L’élan est venu de l’Union européenne et son programme « Forever Open Road », décliné en France avec la « route de 5è génération (R5G) » promue par l’Ifsttar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux).

Il prône des solutions pour assurer un « état de surface optimal » dans toutes les situations climatiques, et la communication et l’échange d’énergie entre infrastructure, véhicule et gestionnaire du réseau.

Il encourage aussi la conception de matériaux recyclables, capables de « s’auto-diagnostiquer » et « s’auto-réparer ». Des innovations dont l’intégration à l’échelle industrielle à des coûts mesurés demeure un vrai défi, admet l’Ifsttar.

« Tout ça est en phase de recherche », dit M. Tebibel. « Il est nécessaire de tester les prototypes sur des chantiers expérimentaux, dans des conditions hivernales, avec du trafic », précise Ivan Drouadaine, qui dirige le Centre de recherche Eurovia.

– Nouveaux emplois générés –

Des prototypes de routes « communicantes » voient le jour : « Smartvia » mise au point par Eurovia, est truffée de capteurs évaluant l’endommagement de la chaussée en mesurant température, pression, humidité et déformation.

Et ce, afin de « prévenir des dégradations avancées, tout en évitant des opérations lourdes d’auscultation ».

Equiper en capteurs et station de transmission des données une portion de route « représentative de l’équipement », coûte 50 à 100.000 euros. Aujourd’hui Eurovia gère Smartvia dans le cadre de contrats de recherche, en attendant de pouvoir facturer ces services aux collectivités, précise M. Drouadaine.

Colas, lui, teste les capteurs développés par sa filiale Aximum sur l’autoroute A63 qu’il construit dans les Landes.

Demain ces données, croisées avec d’autres (météo, trafic etc), guideront les voitures sans conducteur. Elles devront toutefois être traitées et sécurisées. 

« Toutes ces innovations vont générer de nouveaux emplois », dit M Tebibel. « Mais il faudra former davantage de gens à la gestion de l’open data ».

Lancé en octobre à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), le consortium « So mobility » (Cisco, CDC, Bouygues Immobilier, Engie, Transdev, Colas) développe des applications sur smartphone donnant accès aux places inoccupées de parkings d’hôtels ou de centres commerciaux.

« Dans une dizaine d’années, lorsqu’on construira un parking, il sera fait pour recharger les voitures électriques. La recharge par induction, sans contact, c’est le Graal, mais on n’a pas encore la solution technique », rapporte M Tebibel.

De son côté Eiffage met au point un revêtement plus sûr en conditions extrêmes, rafraîchi en été et réchauffé en hiver par la géothermie.

Soutenue par le ministère de l’Environnement, qui a fixé l’objectif de 1.000 kilomètres d’ici 5 ans, la route solaire développée par Colas – avec des dalles « Wattway » collées sur la chaussée, résistant au trafic automobile et produisant de l’énergie – suscite admiration et circonspection dans le secteur.

Développée depuis 5 ans avec l’Institut national de l’énergie solaire (Ines), elle sera testée sur « plusieurs dizaines de chantiers en France, en fonction des conditions climatiques, pour différents usages tels que l’alimentation d’un foyer isolé, d’un équipement routier, en 2016 et 2017 », précise M Tebibel.

Le premier site pilote de Mouilleron-le-Captif (Vendée), où 50 m2 doivent produire 6.300 kWh/an, a été inauguré le 2 juin, et Colas espère lancer des offres commerciales en 2018.

Aux sceptiques qui pointent la fragilité des cellules photovoltaïques, M Tebibel répond que ces dalles résistent au passage d' »un million de poids lourds » et dureront « 15 ans, comme une route classique ». Leur recyclage, lui, est « en cours d’amélioration ».

Aussi en phase de recherche : une chaussée auto-réparatrice, recyclable, en bitume composé de micro-algues… 

« Les technologies économiquement viables, sociétalement acceptables qui rendront un service s’imposeront. Les autres seront abandonnées », prédit M. Dumont.

Le directeur du centre de recherche Eurovia, Ivan Drouadaine, montre différents prototypes de route du futur à Mérignac, le 6 juin 2016. © AFP

© AFP/Archives MEHDI FEDOUACH
Le directeur du centre de recherche Eurovia, Ivan Drouadaine, montre différents prototypes de route du futur à Mérignac, le 6 juin 2016

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