INTERNATIONAL

Turquie: l'armée va être remaniée en profondeur après de vastes purges

Istanbul (AFP) – Le Premier ministre turc Binali Yildirim doit rencontrer jeudi les plus hauts commandants de l’armée lors d’un Conseil militaire suprême (YAS) pour remanier une armée purgée de près de la moitié de ses généraux depuis le putsch raté.

Cette réunion au sommet intervient alors que le pouvoir islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan a intensifié mercredi « le grand ménage » destiné à mettre hors jeu les partisans du prédicateur exilé Fethullah Gülen qu’il accuse d’avoir ourdi le coup d’Etat, ce que nie ce dernier.

Les médias sont en première ligne des purges avec l’annonce officielle mercredi de la fermeture de 45 journaux, 16 chaînes de télévision, trois agences de presse, 23 stations de radio, 15 magazines et 29 maisons d’édition. Ces mesures viennent s’ajouter aux 89 mandats d’arrêts émis contre des journalistes entre lundi et mercredi.

La purge est tout aussi drastique dans les rangs de l’armée dont une petite partie s’est soulevée contre le pouvoir dans la nuit du 15 au 16 juillet, s’emparant d’avions de chasse et d’hélicoptères et semant le chaos dans les rues d’Ankara et d’Istanbul.

Cent quarante-neuf généraux et amiraux ont ainsi été exclus de l’armée pour leur « complicité dans la tentative de coup d’Etat », selon un responsable turc. Parmi eux, 87 hauts gradés de l’armée de terre, 30 de l’armée de l’air et 32 de la marine. En outre 1.099 officiers ont également été exclus pour cause d’indignité.

Le YAS devra donc remplacer une large partie de la hiérarchie lors de sa réunion de jeudi qui durera une journée.

Des officiers de rang inférieurs devraient être promus à des échelons supérieurs.

– Défiance –

Signe de la défiance du pouvoir, la réunion ne se tiendra pas comme d’habitude au quartier général de l’armée mais dans la résidence du Premier ministre à Ankara.

Depuis le coup d’Etat raté du 15 juillet, 178 généraux ont été placés en garde à vue, soit la moitié des généraux et amiraux de l’armée, selon des chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur.

D’après l’agence de presse progouvernementale Anadolu, un peu plus de 8.600 militaires ont pris part au coup d’Etat manqué, soit une petite fraction de l’armée turque — la deuxième la plus importante du monde après celle des Etats-Unis avec des centaines de milliers de militaires.

Le ministre de l’Energie et gendre du président Erdogan, Berat Albayrak, a révélé mercredi que le YAS avait déjà l’intention, avant la tentative de coup d’Etat, de se réunir dans le courant de l’été pour expulser de l’armée tous les officiers soupçonnés d’être liés au prédicateur Gülen, ancien allié devenu depuis trois ans la bête noire du régime islamo-conservateur.

C’est ce qui aurait, selon lui, poussé les militaires pro-Gülen à déclencher le soulèvement.

Ce Conseil militaire suprême se déroulera alors que la Turquie est de plus en plus critiquée par les Européens pour l’intensification des purges dans de vastes secteurs de la société.

Les médias, dont certains ont joué un rôle clé dans l’échec du putsch, paient ainsi un lourd tribut.

Si aucune liste n’a été fournie sur les 131 médias fermés mercredi, la chaîne de télévision privée CNN-Türk a indiqué qu’il s’agissait essentiellement de médias de province, mais aussi de certains médias à diffusion ou audience nationale.

L’agence de presse Cihan fait partie de ceux-ci, aux côtés de la télévision prokurde IMC TV et du quotidien d’opposition Taraf.

Mercredi matin, la justice avait déjà annoncé 47 nouveaux mandats d’arrêt visant d’ex-employés du quotidien Zaman en raison de leurs liens supposés avec le réseau de l’ex-imam Fethullah Gülen. Parmi eux figurent des rédacteurs en chef et des éditorialistes de renom.

Lundi, 42 journalistes avaient fait l’objet de mandats d’arrêts et certains d’entre eux ont été placés en garde à vue.

La Fédération internationale des journalistes (FIJ) a appelé l’Union européenne à faire pression sur le président Erdogan pour qu’il respecte la liberté de la presse.

Le Premier ministre turc  Binali Yildirim et le Premier ministre chypriote turc Huseyin Ozgurgun le 26 juillet 2016 à Ankara. © AFP

© AFP ADEM ALTAN
Le Premier ministre turc Binali Yildirim et le Premier ministre chypriote turc Huseyin Ozgurgun le 26 juillet 2016 à Ankara

Article précedent

Prêtre égorgé: hommage à Notre-Dame, les enquêteurs remontent la piste du second jihadiste

Article suivant

Prêtre assassiné: hommage à Notre-Dame, l'EI diffuse une video des assassins

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Turquie: l'armée va être remaniée en profondeur après de vastes purges