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Turquie : le parti d'Erdogan étend la purge jusque dans ses rangs après le putsch raté

Istanbul (AFP) – Le parti au pouvoir en Turquie a étendu vendredi jusque dans ses propres rangs la purge des sympathisants du prédicateur en exil aux Etats-Unis Fethullah Gülen, qui a réagi vivement après le mandat d’arrêt émis à son encontre par Ankara.

Les relations diplomatiques de la Turquie ne se sont pas améliorées, tandis que de vifs échanges avaient lieu avec Vienne et que Washington ne confirmait pas la visite de son secrétaire d’Etat John Kerry annoncée par Ankara.

Le parti de la Justice et du développement (AKP) a ordonné que ses rangs soient « nettoyés » des sympathisants de Gülen, accusé d’être derrière le coup d’Etat depuis son exil en Pennsylvanie, a annoncé l’agence progouvernementale Anatolie.

L’AKP va ainsi être également touché par la traque implacable menée depuis le coup d’Etat raté du 15 juillet, qui s’est soldée par au moins 60.000 limogeages, arrestations et gardes à vue, surtout dans l’armée, la justice, la presse et l’éducation.

Signée par le numéro deux du parti, Hayati Yazici, une circulaire de l’AKP « ordonne l’urgent nettoyage de l’organisation du parti », afin d’en éliminer ceux qui sont liés au réseau de Gülen, accusé d’avoir noyauté les institutions et la société turques en créant un « Etat parallèle ».

L’ex-imam a vivement réagi vendredi à l’annonce que la Turquie venait de lancer contre lui un mandat d’arrêt dans la perspective d’une demande officielle d’extradition auprès des Etats-Unis. « Le système judiciaire turc n’est pas indépendant, donc ce mandat d’arrêt est encore un exemple de la tendance du président Erdogan à l’autoritarisme et aux écarts vis-à-vis de la démocratie », a-t-il dit dans un communiqué.

M. Gülen a rappelé avoir « condamné à plusieurs reprises la tentative de coup d’Etat », et nié « toute implication ».

La purge en cours, qui a provoqué de vives protestations à l’étranger, n’a encore touché que « le sommet de l’iceberg », a averti jeudi soir le président Erdogan.

Vendredi, 12 des 14 journalistes du quotidien Zaman qui étaient en garde à vue ont été placés en détention préventive. 

-« Racisme radical »-

La Turquie et l’Autriche ont à nouveau eu des échanges fort peu diplomatiques, au lendemain d’une vive passe d’armes sur les négociations d’adhésion turque à l’Union européenne, devenues « une fiction » selon Vienne.

« Le racisme est l’ennemi des droits de l’homme », a lancé le chef de la diplomatie Mevlut Cavusoglu à la télévision TGRT. « Le chancelier autrichien (Christian Kern) ferait mieux de regarder son propre pays. Aujourd’hui l’Autriche est la capitale du racisme radical ».

Son homologue autrichien Sebastian Kurz a immédiatement réagi sur Twitter : « J’appelle instamment le ministre des Affaires étrangères (turc) à faire preuve de retenue et rejette fermement ses critiques. La Turquie doit modérer (…) son langage et ses actes ».

Le président Erdogan a reproché amèrement aux Occidentaux de ne pas l’avoir soutenu après le putsch raté et de ne pas être venus le voir.

C’est le secrétaire d’Etat américain John Kerry qui pourrait être le premier haut responsable occidental à se rendre en Turquie. Du moins à en croire Ankara. M. Kerry viendra le 24 août, a assuré M. Cavusoglu après que M Erdogan a évoqué la date du 21, tandis qu’à Washington un porte-parole du Département d’Etat indiquait sèchement : « Nous n’avons pas de voyage à annoncer. »

Cette visite, si elle a lieu, interviendra à un moment où les relations turco-américaines sont ébranlées par l’exigence turque d’une extradition de Gülen. Ankara l’a déjà réclamée maintes fois à Washington. Parfois avec virulence, comme le président Erdogan qui a accusé les Etats-Unis de « cacher » Gülen.

Le ministère de la Justice « essaie toujours de déterminer si les documents fournis (par Ankara) constituent une demande formelle d’extradition », a simplement expliqué Mark Toner, porte-parole du Département d’Etat.

Premier chef d’Etat étranger à faire le voyage d’Ankara trois semaines après le putsch, le président du Kazakhstan Noursoultan Nazerbaïev a promis lors d’une conférence de presse avec M. Erdogan d’expulser vers la Turquie toute personne du réseau des écoles pro-Gülen qui aurait « des liens avec le terrorisme ». Mais il n’est pas allé jusqu’à s’engager à fermer cette trentaine d’écoles, dont Ankara lui a fourni une liste.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan le 2 août 2016 à Istanbul. © AFP

© TURKEY’S PRESIDENTIAL PRESS SERVICE/AFP/Archives KAYHAN OZER
Le président turc Recep Tayyip Erdogan le 2 août 2016 à Istanbul

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