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Valls et plusieurs ministres en désaccord au sujet des arrêtés anti-burkini

Paris (AFP) – Najat Vallaud-Belkacem et Marisol Touraine ont affiché jeudi leur désaccord avec Manuel Valls au sujet des arrêtés municipaux anti-burkini, condamnés par les ministres de l’Education et de la Santé mais soutenus par le chef du gouvernement.

De son côté, François Hollande a appelé, dans une claire allusion au débat virulent sur le burkini, à ne céder ni à la « provocation » ni à la « stigmatisation », à l’issue d’une rencontre avec des dirigeants sociaux-démocrates européens.

« Je suis contre le burkini », a déclaré Mme Vallaud-Belkacem, rappelant ses « convictions féministes », avec des « femmes libres et fières de leur corps ».

Mais la ministre de l’éducation a ajouté que « la prolifération des arrêtés sur le burkini (…) n’est pas bienvenue », car « car elle pose la question de nos libertés individuelles ». « Jusqu’où va-t-on pour vérifier qu’une tenue est conforme aux bonnes moeurs? », s’est-elle interrogée, jugeant également que « cela libère la parole raciste ».

« Pour moi, rien n’établit de lien entre le terrorisme de Daech et la tenue d’une femme sur une plage », a-t-elle conclu.

Pour Marisol Touraine, la référence au burkini comme une menace n’a pas lieu d’exister: « c’est oublier que la laïcité n’est pas le refus de la religion (…) elle ne peut pas et ne doit pas devenir le fer de lance d’une stigmatisation dangereuse pour la cohésion de notre pays », note-t-elle sur son blog. Et refuse de « faire du port du voile l’expression d’un refus de la République ». 

« Non, je pense que ces arrêtés ne sont pas une dérive », a répondu Manuel Valls sur RMC.

« C’est une mauvaise interprétation des choses. Ces arrêtés ont été pris au nom même de l’ordre public. Ils ont été pris à un moment donné, dans des plages du sud de la France, quelques jours après l’attentat de Nice dans un contexte particulier. Et le burkini, oui, encore une fois, c’est l’asservissement de la femme. Et les hommes et les femmes de progrès doivent le dire avec beaucoup de force », a ajouté le Premier ministre.

« Je ne suis pas d’accord avec elle. Ou alors c’est elle qui n’est pas d’accord avec moi », a-t-il admis au sujet de la ministre de l’éducation.

Interrogée plus tard lors d’un déplacement, Mme Vallaud-Belkacem a dit ne pas voir « de différence entre les déclarations de Manuel Valls et les [siennes] ».

« Je suis d’accord avec Manuel Valls quand il dit qu’il ne faut pas légiférer sur le burkini. Nous sommes évidemment d’accord sur l’essentiel. Le sujet, c’est l’efficacité face au terrorisme », a-t-elle ajouté.

– « Hystérie médiatique » –

Proche de Manuel Valls, le sénateur (PS) Luc Carvounas a semblé prendre ses distances avec le Premier ministre: « De la même manière que la loi ne demande pas aux femmes de ne pas porter de voile sur l’espace public(…) je ne vois pas pourquoi on les empêcherait si elles le souhaitent de porter le burkini dans l’espace public ».

« Il y a d’autres choses plus importantes en France », a pour sa part estimé la maire (PS) de Paris Anne Hidalgo, en présence de son homologue londonien, Sadiq Khan, lui aussi opposé à l’interdiction du burkini. « Aller chercher un sujet comme celui-là et le poser comme l’alpha et l’oméga autour duquel toute la vie politique devrait être tournée (…), je trouve que l’on est dans une sorte d’hystérie médiatique qu’il faut arrêter », a-t-elle lancé.

Saisi par la Ligue des droits de l’Homme, le Conseil d’Etat rendra sa décision vendredi sur la légalité des arrêtés anti-burkini. La plus haute juridiction administrative française a entamé jeudi l’examen d’une demande de suspension en urgence contre un arrêté de la commune de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes).

Mais il est en réalité appelé à trancher la querelle juridique pour la trentaine de communes françaises qui exigent sur leurs plages, cet été, une tenue « respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité » au nom de « l’ordre public ».

« On a vu des arrêtés pris dans des endroits où il n’y avait aucun problème, aucun trouble. Les maires qui les ont pris, certains avaient des raisons ». Mais « attention au risque de dérapage, de dérive et de stigmatisation », a pour sa part déclaré le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, sur iTELE.

De son côté, Nicolas Sarkozy appelle à légiférer pour interdire « tout signe religieux à l’école mais également à l’université, dans l’administration et aussi dans les entreprises ». Pour lui, « ne rien faire » contre le burkini « serait acter un nouveau recul de la République ».

Le Front national va plus loin en se prononçant pour « une loi d’interdiction générale des signes religieux ostensibles dans l’ensemble de l’espace public ».

Manuel Valls et Najat Vallaud-Belkacem à Créteil le 17 avril 2016. © AFP

© AFP/Archives PATRICK KOVARIK
Manuel Valls et Najat Vallaud-Belkacem à Créteil le 17 avril 2016

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