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Îles non desservies : « Il faut que quelqu’un tombe malade pour que l’avion vienne chez nous »


Un mois après la réouverture du trafic aérien domestique, Air Tahiti n’a pas changé de discours : affaiblie financièrement par la crise, la compagnie ne peut pas reprendre l’exploitation des lignes déficitaires. 26 îles au total sont dans l’attente d’une éventuelle « solution » qui serait trouvée entre le transporteur et le gouvernement. Sauf que les discussions n’ont « pas commencé », d’après Manate Vivish.

Air Tahiti n’est pas « en situation de reprendre le niveau d’activité » d’avant-crise. C’est ce que déclarait le 29 avril Manate Vivish, espérant « que le Pays souhaite conserver ses liens aériens avec ses îles et qu’il y contribuera ». Depuis, le discours du directeur général n’a pas changé, le ton s’est seulement fait plus ferme. La compagnie, qui vole aujourd’hui vers 19 destinations en Polynésie (20 avec Moorea), contre 46 avant le confinement, n’avance aucune date pour la reprise de ses rotations vers les destinations les moins rentables. « Pour ne pas aggraver la situation financière déjà très délicate de notre compagnie, il nous faut renoncer à assurer la desserte des autres îles, et ce pour une durée indéterminée » écrit aujourd’hui le dirigeant dans un communiqué.

Le 17 mai, déjà, Air Tahiti était catégorique sur l’arrêt de la desserte de Ua Pou et Ua Huka, s’estimant incapable de « continuer à porter seule » le déficit d’exploitation de ces lignes de Twin Otter. Trois jours plus tard, Manate Vivish étendait ce constat à toute une partie du réseau : la péréquation interne – les lignes fréquentées et touristiques financent les lignes dites « de désenclavement », considérées par Air Tahiti comme une mission de service publique non financée « ne marche tout simplement plus ». Le ministre en charge des transports aériens domestiques, Jean-Christophe Bouissou était aux côtés du dirigeant ce jour-là. Et assurait qu’il n’y avait « aucun désaccord avec Air Tahiti », parlant de « concertations » en cours pour faire avancer le sujet « pas à pas ». Un mois plus tard, pourtant, Manate Vivish assurait vendredi que les discussions n’ont pas encore commencé avec le Pays. « Nous sommes prêts à discuter avec eux pour trouver des solutions, et j’espère qu’on en trouvera », pointe le directeur.

« Très compliqué » pour 26 îles sans liaison

En attendant 26 îles sont dans l’incertitude. Ua Pou et Ua Huka avaient déjà officiellement saisi le Pays sur la question avec la communauté de communes des Marquises. Mais Reao, Takume, Kauehi, Kaukura, Napuka, Niau, Nukutavake, Anaa, Apataki, Aratika, Faaite, Puka Puka, Pukarua, Puka, Raroia, Tureia, Vahitahi, Fakahina, Fangatau, Tatakoto, Katiu ou Hikueru sont elles aussi en mal de vols, sans compter Maupiti, qui devrait être desservi par Tahiti Air Charter. Un vrai casse-tête pour la population, qui peut difficilement compter sur les rotations maritimes, lentes et peu régulières, pour se rendre à Tahiti. A Takaroa, la mairie a bien essayé de proposer de faire desservir l’île principale, ainsi que Takapoto, lors de rotations communes avec Manihi et Ahe, mais sans succès, comme l’explique la maire sortante Teapehu Teahe.

Deux vols par semaine se posaient avant la crise sur l’atoll des Tuamotu. Aujourd’hui, la piste de Takaroa est « déserte ». « On a eu deux évacuations sanitaires ces dernières semaines, et forcément, ceux qui veulent revenir sur Takaroa ou qui doivent repartir vers Tahiti, pour le travail ou pour la famille, essaient de trouver une place à bord à ce moment-là », reprend la tavana. « On espère que quelqu’un va tomber malade pour que l’avion vienne chez nous, lance-t-elle en riant jaune. On en est là ! »

La position d’Air Tahiti, Teapehu Teahe dit la comprendre. Elle dit aujourd’hui « faire confiance au Pays pour trouver une solution » « J’espère que le Pays va pouvoir subventionner et aider cette compagnie à desservir les îles dont les lignes sont déficitaires ». Car nombreux sont ceux à Takaroa comme ailleurs, qui comptent sur ces rotations pour alimenter l’activité commerciale ou touristique de l’île, si réduite soit-elle. Une chance en fin de semaine : un « vol exceptionnel » de transport scolaire doit circuler entre Takaroa et Rangiroa.

 

Un plan social chez Air Archipels ?

Quand Manate Vivish avait annoncé un plan de « délestage de temps de travail » du personnel de Air Tahiti, le plus gros employeur privé du pays, c’était avant tout pour « éviter les licenciements ». Ce qui n’est visiblement pas le cas pour Air Archipels, pourtant filiale d’Air Tahiti. D’après nos confrères de Polynésie La 1ere, une quinzaine de postes pourraient être supprimés dans la petite compagnie qui en compte une cinquantaine. Il faut dire c’était Air Archipels, justement, qui assurait les vols inter-Marquises en Twin Otter pour le compte d’Air Tahiti, qui les a supprimés. Ou les rotations vers Apataki ou Takume, qui font partie des destinations qui ne sont plus desservies. Aucune précision, confirmation ou date n’a été donné par le groupe à propos de ce plan social. Air Archipels devrait quoiqu’il arrive poursuivre ses vols administratifs, de tournées médicales ou d’évacuations sanitaires.

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