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La politique de l’Energie passée au crible de la CTC

Radio 1 s’est procuré le rapport d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes (CTC) sur la politique de l’Energie du Pays qui doit être rendu public dans les jours à venir.  Un rapport aussi dense que complexe, qui passe en revue la politique énergétique du Pays, et notamment ses rapports avec EDT-Engie, depuis 2007. Dans les grandes lignes, les juges taclent l’absence de pilotage du Pays jusqu’en 2013, avant l’émergence d’un « plan de transition énergétique » ambitieux devenu la feuille de route du Pays. Mais si elle salue l’initiative de cette réforme, la chambre dénonce tout de même son caractère « inabouti et fragile », en raison principalement de l’absence de chiffrage du « coût » de ce plan. Enfin, la CTC reste très sceptique sur l’impact de ce plan sur la baisse des tarifs de l’électricité.

La chambre territoriale des comptes a transmis au gouvernement son dernier rapport portant sur la politique de l’Energie de la Polynésie française depuis 2007. Un rapport de 76 pages particulièrement dense qui doit être rendu public dans les jours à venir. Radio 1 s’est procuré le document et en révèle les principaux enseignements.

  • De 2007 à 2013 : une politique, quelle politique ?

Toute la première partie du rapport est consacrée à « l’efficacité discutable » de la politique du Pays en matière d’énergie entre 2007 et 2013, soit principalement sous les gouvernements de Gaston Tong Sang et d’Oscar Temaru, et dans une moindre mesure de Gaston Flosse (deux mois seulement en 2008). Pendant cette période « la politique énergétique s’est principalement focalisée sur le niveau élevé du prix de l’électricité » mais « sans que des progrès décisifs soient pour autant enregistrés en matière de contrôle comptable de la délégation ». Ce qui a eu pour principal effet, note la chambre : « d’aigrir exagérément les relations de la collectivité avec le concessionnaire historique (EDT) et de creuser les malentendus ».

  • La rentabilité « raisonnable » d’EDT-Engie

La CTC détaille les nombreux bras de fer entre le Pays et EDT, depuis le refus du gouvernement d’augmenter les tarifs de l’électricité entre 2005 et 2008 et le litige à 4 milliards de Fcfp qui s’en est suivi, jusqu’à l’annulation d’une formule d’électricité sans « éléments rationnels, objectifs et transparents » par le tribunal administratif, puis la cour d’appel, en 2013.

Pourtant, les juges livrent une information qui tord le cou à de nombreux préjugés sur le caractère « raisonnable ou non » de la rémunération du concessionnaire EDT-Engie. La CTC indique en effet que la mesure de la rentabilité d’EDT s’est située à 8,81% entre 2007 et 2015, en dessous de la « fourchette raisonnable » estimée par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) « de 9 à 11% ».

  • « L’ambitieux » mais « inabouti » Plan de transition énergétique de 2013

Pour la CTC, une véritable politique de l’énergie « est en cours d’émergence » depuis décembre 2013 avec le Plan de transition énergétique devenu la « feuille de route du gouvernement ». Un plan très « ambitieux », inspiré des conclusions de la CRE de 2012, et qui entend bouleverser le système actuellement en place à l’horizon 2030 : « (Il) prône le passage de système centralisé à base d’hydrocarbures à un foisonnement d’unités de production plus réduites fonctionnant à base d’énergies renouvelables ».

Un système totalement « inédit » en France et dans les outre-mers français qui sépare les métiers de production, transport et distribution d’électricité. Avec une place prépondérante et régulatrice donnée à la société d’économie mixte TEP de transporteur, entre les procducteurs et les distributeurs. Pourtant, la CTC regrette le caractère « inabouti » du plan et les nombreuses « questions sans réponses » notamment sur le coût de cette réforme.

  • « Le chemin à parcourir est encore long »

Parmi les points problématiques, la CTC regrette l’absence de chiffrage du coût du plan de transition énergétique. Elle note également que la question de la « péréquation » des tarifs de l’électricité dans les îles est un préalable absolu qui n’a toujours pas été réglé. Autre problème, la résiliation des contrats, notamment avec EDT-Engie, est jugé « indispensable à la réforme » mais n’a pas été anticipée ou déterminée. Par ailleurs, le « cycle de vie des groupes électrogènes » pourait offrir des possibilités de réduction de la part d’énergies thermiques, mais « les projets de relance de l’hydroélectricité ne progressent que très lentement ».

  • La baisse des prix « n’est pas garantie »

La chambre dit enfin craindre que le plan de transition énergétique « n’affecte pas immédiatement et favorablement le prix de l’électricité ». Selon les juges, cette baisse n’est liée qu’à deux ordres de considérenation : des facteurs spécifiques à la cherté (géographiques et pétro-dépendance) qui devraient pour l’heure « influencer les prix à la hausse » et le « maintien dans des limites raisonnables » des coûts et marges du concessionnaire dont le contrôle est encore « trop peu effectif ».

Les recommandations de la chambre territoriale des comptes :

Recommandation n° 1 : Clarifier et simplifier les tarifs, notamment en établissant les modalités d’un tarif social financé par l’impôt et régulé par les services sociaux.

Recommandation n° 2 : Renforcer le service des énergies en moyens humains et juridiques, notamment en affirmant leur droit de communication.

Recommandation n° 3 : Pérenniser la méthode du contrôle comptable pluriannuel des comptes de la délégation par des auditeurs externes, prestation finançable par la concession.

Recommandation n° 4 : Chiffrer et établir le coût et le financement de la transition énergétique (2015-2030).

Recommandation n° 5 : Arrêter des dispositions réservant une place et un rôle pérennes aux usagers du service public de l’électricité au sein de commissions réglementaires.

Recommandation n° 6 : Arrêter des dispositions réglementaires concernant les constructions et les rénovations des bâtiments selon les normes HQE.

Recommandation n° 7 : Orienter les interventions publiques vers la rénovation et la construction de bâtiments HQE adaptés au contexte et au climat polynésien.

Recommandation n° 8 : Simplifier la gestion de la compétence en matière d’électricité par la mise en œuvre effective de l’article 55 de la loi organique qui autorise les mutualisations par conventions.

Recommandation n° 9 : A l’occasion du renouvellement des concessions, adapter leur durée à l’état des installations.

Recommandation n° 10 : Réaliser en priorité les projets hydroélectriques, dont ceux intéressant la vallée de la Yaiiha.

Recommandation n° 11 : Réviser le taux normatif de pénétration des énergies intermittentes à mesure des avancées technologiques (stockage tampon, etc…).

Recommandation n° 12 : Etablir prioritairement les règles de péréquation fiscale pour l ’ensemble des usagers du service.

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1 Commentaire

  1. Pierre André
    30 octobre 2017 à 15h47 — Répondre

    Et le solaire dans tout ça ne représente que 20% de l’énergie produite. Dans un pays avec un tel ensoleillement, il y a lieu de s’inquiéter…

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